Libéralisme et constructivisme

Retour sur les idées présentées au début de l’excellent bouquin de Pascal Salin « Libéralisme ». Où l’on apprend la différence entre libéralisme et constructivisme, et que notre société française est majoritairement sous le signe du constructivisme. Les sources idéologiques du constructivisme y sont détaillées avec clarté et vigueur : égalitarisme, absolutisme démocratique et scientisme. Je sais dès à  présent que ce livre sera très enrichissant, et j’ai envie de partager les réflexions qu’il m’inspire avec vous.

Les livres et moi

J’ai un problème avec les livres : j’adore ça ! J’ai toujours plus ou moins 2 ou 3 livres en cours simultanément. Selon la facilité de lecture, selon mes envies du moment, je passe de l’un à  l’autre. J’ai presque fini l’excellent bouquin « Les prêcheurs de l’Apocalypse » de Jean de Kervasdoué (CNAM). J’ai été stoppé net dans ma lecture parce qu’ai reçu ma commande de deux bouquins de Pascal Salin : « Libéralisme » et « Français, n’ayez pas peur du libéralisme« . Je n’ai pas pu résister, hier soir, et je me suis plongé avec délectation dans « Libéralisme ». C’est écrit clairement, c’est puissant, et je sens déjà  que ce livre sera marquant, intellectuellement parlant. Il y a des livres comme ça, qui prennent presqu’autant de valeur qu’une rencontre avec quelqu’un (et c’en est une d’ailleurs).
Les quelques précisions que Pascal Salin donne dès le début sont très éclairantes, et je voudrais les partager avec vous (il y aura, je pense, plusieurs autres billets consacrés à  ce bouquin merveilleux). La distinction apportée par Alain Boyer entre morale de responsabilité et morale de conviction avait été super enrichissante, et bien plus structurante que la traditionnelle scission gauche/droite, dont le sens n’est pas net. Pascal Salin commence par distinguer le libéralisme et le constructivisme (c’est l’objet de cet article), et enchaine sur la distinction entre libéralisme « humaniste » et libéralisme « utilitariste » (ce sera l’objet d’un deuxième article). Cette distinction entre « individualisme ou libéralisme » et « constructivisme » a été proposée par Friedrich Hayek.

Libéralisme et constructivisme

Le libéralisme est fondée sur la liberté individuelle, et sur le droit qui garantie cette liberté individuelle à  tous. La société est, selon les vues libérales, libre d’évoluer au gré des initiatives des individus, et il n’est donc pas possible de la construire de toute pièce. En cela, le libéralisme et le constructivisme sont incompatibles : le constructivisme, en effet, consiste à  vouloir construire la société en fonction de valeurs et de la place qu’on veut donner à  telle ou telle catégorie de citoyens. Le libéral s’oppose à  cette vision parce que la seule entité raisonnable pour réfléchir est l’individu.
[…] le libéral est, selon les propres termes de Friedrich Hayek, celui qui « laisse faire le changement, même si on ne peut pas prévoir où il conduira ». Il implique, par conséquent, une confiance dans les capacités des personnes à  s’adapter continuellement à  des conditions changeantes et toujours imprévisibles.
Pascal Salin, fort de cette distinction, explique qu’en France la quasi-totalité des hommes politiques (de droite comme de gauche) est constructiviste. Que l’on soit réformateur, ou conservateur, on peut être constructiviste. Dans un cas on veut changer le système, dans l’autre on veut le maintenir, et dans les deux cas il s’agit de vouloir construire la société.

Sources du constructivisme

Pascal Salin détaille les sources de la prégnance très forte du constructivisme en France :

  • Egalitarisme :
    Il existe en effet deux notions différentes de l’égalité, l’égalité des droits et l’égalité des résultats. La première inspirait la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 («Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits», phrase qui était cependant immédiatement suivie d’une autre dont l’inspiration était plus collectiviste : « les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune») ; mais c’est la seconde notion qui est devenue dominante et elle est d’ailleurs formellement affirmée dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, qui reconnaît toutes sortes de «droits à » (droit au travail, à  la Sécurité sociale, etc.). La première notion est manifestement libérale et individualiste, puisqu’elle consiste à  reconnaître l’égale dignité de chacun, mais à  le laisser libre de développer son propre destin à  partir du moment où ses droits sont déterminés et respectés. La seconde est un pur produit du constructivisme, puisqu’elle consiste à  penser que l’on peut interférer avec les résultats de l’action humaine et imposer une répartition des richesses conforme au modèle décidé par les détenteurs du pouvoir, en donnant a priori à  chacun des droits sur l’activité d’autrui.
    Ce faisant, on crée, au nom de l’égalitarisme, de nouvelles inégalités, par exemple celles qui existent entre ceux qui vivent de leurs propres efforts et ceux qui profitent de la contrainte organisée ; ou encore entre ceux qui ont accès au pouvoir politique, instrument supposé de l’égalitarisme, et ceux qui en sont écartés.
  • Absolutisme démocratique :
    Le caractère démocratique d’un pays ou d’une institution quelconque est devenu le critère d’évaluation prioritaire. […]
    L’extension de cet absolutisme démocratique va évidemment de pair avec une méfiance très grande à  l’égard des solutions de marché et c’est pourquoi on s’achemine bien souvent vers la recherche de solutions de type collectiviste où la négociation et le «dialogue », par l’intermédiaire de représentants démocratiquement élus, sont censés conduire à  un consensus. C’est l’illusion de la convergence des intérêts, non pas entre les individus – ce que seul le marché permet de réaliser – mais entre les groupes organisés.
    Le résultat de cette conception de la vie sociale est évidemment le corporatisme qui, étrangement, a conduit la France d’aujourd’hui à  ressembler à  la France de l’Ancien Régime. Cette ressemblance n’est d’ailleurs pas le fruit du hasard. Elle est seulement le résultat d’une conception de la vie sociale où la source de tout pouvoir réside non pas dans les individus, mais dans la sphère politique. De ce point de vue, il importe relativement peu que le pouvoir politique soit de nature monarchique ou démocratique. Aucun pouvoir en effet n’a les moyens d’organiser la cohérence des besoins individuels, il ne peut qu’agir grossièrement en plaçant les individus dans des catégories, professionnelles, religieuses, ou sociales, en prétendant reconnaître l’existence d’intérêts catégoriels et en organisant centralement leur coexistence. Comme nous le verrons constamment, l’État crée des abstractions collectives – par exemple les intérêts catégoriels -, il prétend qu’ils existent par nature et qu’il est évidemment le seul à  pouvoir les organiser de manière à  assurer la cohésion sociale, puisqu’il s’agit d’«intérêts collectifs».
    Cette conception collectiviste de la société conduit naturellement à  la politisation de la vie quotidienne. Tout est le résultat des luttes pour le pouvoir, qu’il s’agisse de la santé, de l’éducation ou de l’activité entrepreneuriale. Mais parce qu’elle ignore les besoins individuels, aussi bien que les informations individuelles, cette conception, loin de conduire à  l’harmonie, est source de frustrations et d’envies insatiables. Lorsque les choix quotidiens de votre vie sont essentiellement effectués par d’autres que vous, même si ceux qui décident sont censés être vos représentants, vous devez soit subir leurs décisions, soit vous lancer dans un combat épuisant et inégal pour essayer d’exprimer et de faire comprendre la réalité de vos besoins.
  • Scientisme ou illusion du savoir :
    Le constructivisme repose sur un formidable orgueil intellectuel : pour vouloir modeler la société à  sa guise, il faut évidemment supposer à  la fois que l’on connaît les objectifs de ses membres – comme si l’infinie diversité de ces objectifs individuels pouvait faire l’objet d’un processus réducteur de synthèse globale – mais aussi que l’on connaît les meilleurs moyens d’y arriver, c’est-à -dire que l’on a une connaissance parfaite des processus d’interactions complexes qui composent une société. […]
    Tous ces constructivistes veulent plier la réalité à  leurs désirs, par des moyens nécessairement illusoires, puisqu’ils n’ont pas la connaissance, mais seulement la prétention de la connaissance. Aussi, pour poursuivre leurs desseins, mobilisent-ils toutes les théories-alibis de notre époque, toutes celles qui semblent parer leurs actes d’une couverture scientifique.
    En réalité, cette approche est non pas scientifique, mais scientiste, c’est-à -dire qu’elle prend l’apparence habituelle de la science, par exemple son caractère mathématique, mais elle ne répond pas à  ses exigences méthodologiques fondamentales.

Voilà . Pour un début de livre, je trouve ça passionnant, clair, lucide et raisonnable. Pour ceux que ça intéresse, le texte du début du livre (celui qui distingue Libéralisme et constructivisme) est disponible intégralement sur Catallaxia. Dire que je vous conseille d’aller le lire est un euphémisme. En conclusion, la fin du chapitre :
Comme le disait, je crois, Julien Freund, le libéral se doit d’être tolérant avec les hommes et intolérant avec les idées, en ce sens qu’on ne peut pas admettre qu’une idée et son contraire soient également et simultanément vrais, mais les hommes sont tous également dignes de respect. En France, c’est le contraire qui prévaut sur la scène politique : on est intolérant avec les hommes et tolérant avec les idées.


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Commentaires

29 réponses à “Libéralisme et constructivisme”

  1. Avatar de alakhnor

    C'est pas nouveau l'opposition libéralisme-constructivisme. Mais c'est trop caricatural pour déboucher sur quoique ce soit.

    La question n'est pas d'opposer l'un et l'autre, ni de catégoriser les sociétés en fonction des proportions respectives.

    La question est de savoir quel est le bon équilibre entre libéralisme et constructivisme au sein d'une société, les deux étant nécessaires.

    Je sens que tu vas te faire plaisir en lisant une nouvelle apologie du libéralisme. ^^

  2. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    salut,

    je crois (je te confirmerais ça en continuant la lecture) que justement le deuxième chapitre porte là-dessus : on ne peut pas, au niveau de la pensée, s'accommoder tranquillement d'une petite dose de constructivisme quand ça nous chante, en l'agrémentant d'une dose de libéralisme quand ça nous chante. Les deux sont mutuellement exclusifs. Son livre débute justement sur l'opposition de fond, de principe, qu'il y a entre les deux.

    Je met en citation un passage de l'article (cité dans mon billet) :

    Or, il n'est pas excessif de dire qu'en France, tout au moins dans l'univers politique, pratiquement tout le monde est constructiviste. Selon ses humeurs, ses préjugés, son niveau d'information ou le sens de ses propres intérêts, chacun s'efforcera soit de maintenir ce qui existe, soit au contraire de le modifier d'une manière plus conforme à ses propres souhaits.
    Il est bien évident que toutes ces visions particulières ne peuvent pas être compatibles. Chacun s'efforcera alors de faire prévaloir sa propre vision sur celle des autres et les chances d'y parvenir dépendront de la possibilité d'organiser les intérêts. Il en résulte évidemment une extrême politisation de la vie que traduit fortement le fameux thème du «tout est politique». Or, rien n'est politique par nature, mais tout le devient dès lors que l'approche constructiviste est dominante. Mais cette politisation ne traduit en rien une convergence des opinions et des actions, elle est au contraire l'expression de divergences qui ne peuvent être surmontées que d'une manière conflictuelle : on essaie de faire prévaloir sa propre vision de la société, c'est-à-dire de l'imposer aux autres. Dans ces circonstances, il est particulièrement erroné de penser, comme l'exprime Francis Fukuyama, que la «démocratie libérale» serait paisible et même ennuyeuse. Construite à partir d'une attitude constructiviste, elle exacerbe au contraire les conflits.

    Je précise par ailleurs que Pascal Salin a l'air d'être quelqu'un de modéré et profondément humaniste, ce qui rend la lecture particulièrement agréable. Il ne défend pas sa chapelle. Il essaye de promouvoir, au contraire, un système de pensée où la place, toute la place, est redonnée à l'individu. A nous d'avoir la souplesse intellectuelle pour aller à la rencontre de sa pensée. Ce que je fais en le lisant.

  3. Avatar de alakhnor

    Oui, c'est ce que je dis et que je réfute dès le début en terme de postulat : les deux ne sont pas mutuellement exclusifs, mais doivent co-exister pour ne pas s'auto-détruire. On ne peut pas penser une société en termes de "tout individus" ou "tout sociétal". L'un comme l'autre se traduirait par des excès (loi de la jungle d'un côté, totalitarisme de l'autre).

    Que les buts recherchés par l'un ou l'autre système soient divergents, et que leurs applications soient conflictuelles, cela se comprend. Mais ça ne veut pas dire qu'on doive en abandonner un au profit de l'autre.

    (peut-être au chapître 3 ? ^^)

  4. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    Je ne vois pas pourquoi tu veux que l'application du libéralisme soit la loi de la jungle. Le libéralisme prône l'application de la Loi tout court. Le libéralisme est une philosophie du Droit.

    La loi de la jungle, c'est la loi du plus fort, et c'est ce qui passe quand on n'est pas dans un état de Droit, justement.

  5. Avatar de alakhnor

    Le libéralisme met en avant le droit de l'individu et la défense irrévocable de ses libertés. Poussé à bout, le concept débouche sur la loi du plus fort, dans la mesure où il n'existe plus de restriction à l'usage du pouvoir ou de la force (qui est un droit naturel). cf la NRA d'ailleurs. La force n'est pas nécessairement illégale.

    De la même manière, si on pousse à bout le socialisme ou le constructivisme, on débouche sur le totalitarisme.

    Tu as l'air de penser que le libéralisme se suffit à lui-même comme construction sociale et est par nature auto-régulé. C'est loin d'être vrai. Comme toute doctrine, elle se doit d'être caricaturale et idéalisée, mais dans son application pratique, doit être confrontée à la réalité des comportements humains.

    Un des problèmes que n'a pas réussi à résoudre le libéralisme (comme les autres) est l'abus de pouvoir/puissance. Si tu acceptes de dire que le constructivisme peut déboucher sur le totalitarisme, il faut accepter que le libéralisme puisse déboucher sur la loi du plus fort.

    Et ça ne veut dire, ni que le constructivisme est une doctrine totalitaire, ni que le libéralisme prône la loi de la jungle.

  6. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    pas d'accord avec toi.

    1) le libéralisme restreint l'usage de la force ou du pouvoir par la Loi, justement. Il ne conduit donc pas à la loi du plus fort.

    2) tu dis :

    Tu as l’air de penser que le libéralisme se suffit à lui-même comme construction sociale et est par nature auto-régulé.

    Mais le libéralisme n'est pas une construction sociale, justement. Il ne dit pas quelle doit être la place de l'un ou de l'autre. Il dit juste que tout le monde doit avoir des droits identiques, et ne pas empiéter sur la liberté des autres. Il ne construit rien de plus. Il laisse le champ ouvert à l'initiative des individus. Le libéralisme est presque un synonyme d'humanisme.

    à bientôt !

  7. Avatar de Gontman
    Gontman

    Article très intéressant !! Bravo Lomak :)

    Gont

  8. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    salut Gontman,

    c'est à Pascal Salin qu'il faut dire bravo ! Je n'ai fait que recopier les idées du premier chapitre. D'ailleurs, je te conseille d'acheter ce bouquin, à mon avis le fruit d'un très grand intellectuel. La clarté des idées, la force du propos, sont mis en valeur par un style simple mais précis. Un super bouquin !!!

    à bientôt !

  9. […] richesse lui paraissent donc légitimes. Il est donc libéral par goà»t personnel, mais finalement constructiviste dans les faits car il a une approche consistant à  organiser la société. C’est donc un […]

  10. […] et simple. Et cela pose beaucoup de questions dans un contexte o๠le démocratisme est le cadre de pensée de la plupart. Qu’en pensez-vous ? Pensez-vous que Guillaumat va trop […]

  11. Avatar de Mathieu L.

    En fait, Salin semble enfoncer une porte ouverte en affirmant que les hommes politiques sont constructivistes. Ils le sont forcément, sinon, quel intérêt de faire de la politique pour eux??? En fait, Salin développe ici les thèses des économistes de l’école du Public Choice, dont Buchanan en particulier, qui ont montré que l’Etat pouvait aussi être mené par les intérêts individuels des élites politiques en place, plus que par l’intérêt général. Même si ces économistes là  sont des libéraux, ils posent de vraies questions à  la gauche.

    Je rebondis sur les vieux commentaires. La conclusion de Salin sur l’intolérance envers les idées est inacceptable, car elle marque une arrogance terrible pour un intellectuel. De plus, je te pose une question, LOmiG: les idées libérales sont parmi les plus anciennes du champ politique actuel, puisqu’elles prennent leurs sources à  la fin du XVIIIe siècle. Elles ont parfois été appliquées, mais jamais aussi radicalement que tu le proposes en général. Alors, pourquoi ont-elles été contestées par de nombreux politiques, économistes et citoyens? Pourquoi d’autres idéologies ont-elles émergé? Quelles sont finalement les faiblesses du libéralisme que tu défends?

    A bientà´t,

  12. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    Salut Mathieu L.,
    oui tu as raison : Salin pense que nous vivons dans une société beaucoup trop politisée, et o๠l’Etat intervient dans beaucoup trop de domaines. D’o๠la critique de constructiviste, qui ne serait plus d’actualité si les politiciens ne voulaient pas à  tout prix « construire » une société, et donc décider de mesures dans un peu tous les domaines…

    La dernière phrase que je cite (de Salin) n’a rien d’une arrogance intellectuelle. Elle explique simplement qu’on ne peut pas dire qu’une chose et son contraire sont vraies en même temps. Cela s’appele etre exigeant (et non pas arrogant), et vouloir baser les réflexions sur la réalité.

    Les idées libérales, ont été appliquées de manière assez forte aux USA, au royaume uni, en nouvelle zélande. CE ne sont que des exemples. Le jour o๠nous auront en France un homme politique capable de dire « je vais diminuer le rà´le de l’Etat », nous n’en serons plus très loin.

    La faiblesse du libéralisme vient à  mon avis dans une sorte de contradiction – pour moi – qu’il faut articuler proprement. Il faut un état -minimal- pour garantir l’Etat de droit. Il faut donc veiller à  ce qu’il soit suffisament puissant pour empêcher des groupes de faire régner un ordre autre que celui de la république. Ce qui signifie que, si on ne doit pas laisser le monopole de la contrainte à  l’Etat (il faut légitimer l’autodéfense en réponse à  une agression comme c’est déjà  le cas), il faut aussi s’assurer qu’il ne peut pas être renversé. Pas facile. Mais dans une société relativement pacifiée comme la nà´tre, et o๠la plupart n’aspirent qu’à  pouvoir vivre simplement leur vie, je pense que ça ne pose pas de problème particulier….

    à  bientà´t !

  13. Avatar de Mathieu L.

    Le problème est qu’en politique, comme en économie, en histoire, en géographie et en sociologie, la vérité est une valeur bien illusoire. Elle est souvent plus le fait de fondement idéologique que d’une analyse rationnelle des événements et des faits. La preuve en est que j’analyse les extraits de Salin que tu cites d’une manière bien différente de la tienne. Et pourtant, l’un de nous deux a-t-il plus raison que l’autre?

    Les pays que tu cites sont aussi très interventionnistes sur de nombreux domaines. Pour moi, ils ne sont libéraux que dans leurs politiques sociales, bien peu ailleurs.

    Eh oui, ce que tu cites est la faiblesse de l’ensemble du raisonnement libéral, et je ne parviens pas à  la surmonter.

    A bientà´t,

  14. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    salut Mathieu L.,
    ne te méprends pas : je ne suis pas théoricien du libéralisme, et l’avis que je te donne n’est que la vision partielle que je peux avoir, à  l’instant t. Je découvre seulement la pensée libérale, et je ne pense pas du tout en avoir découvert une « faille ». C’est simplement le point que, moi, j’ai du mal à  articuler, ici et maintenant. ça ne veut pas dire que ce soit une incohérence ou une faille.

    Par ailleurs, et sur le fond, je ne pense pas que la vérité soit une valeur illusoire. Au contraire, et prétendre le contraire me semble être ce que j’appelle du « relativisme ». C’est à  dire qu’on peut accepter finalement n’importe quelle « vérité », puisque tout dépendrait du « point de vue ». Je m’insurge contre cette idée, conduisant à  tolérer des idées fausses et à  les excuser.

    à  bientà´t !

  15. Avatar de Mathieu L.

    Pourtant, LOmiG, je peux te dire qu’en histoire, qui est ma discipline de formation, les historiens mènent des travaux très calibrés, en adoptant une méthode quasi-scientifique. Et, ça ne rate jamais, ils sont capables d’arriver à  des conclusions parfois diamétralement opposées sur des faits identiques. Je ne te donnerai pas d’exemples précis, parce que trop long à  développer, mais il y en a sur de nombreuses périodes historiques. De même, quand on s’intéresse un peu à  l’économie, on voit bien que les économistes arrivent à  des conclusions radicalement différentes sur des phénomènes identiques. Tout cela fait quand même relativiser les choses, y compris au plan du discours politique.

    Je ne pensais pas que la « relativité » ferait peur à  un sicentifique… :wink:

  16. Avatar de Mathieu L.

    Ouh la faute!!! scientifique, bien sà»r!

  17. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    Un exemple de vérité qui devrait être partagée : on sait bien que ce sont les règlementations (notamment les freins au licenciement) et la hausse artificielle du salaire minimum qui créent du chà´mage. Cela c’est la réalité objective, économique. Ensuite, vient la décision politique qui consiste à  savoir s’il faut règlementer, dérèglementer. Et là , il y a effectivement plusieurs « vérités ». Mais on ne peut pas aller contre la réalité : celui qui dit en même temps, je vais augmenter le SMIC, mettre en place de multiples « protection » pour les salariés, et dans le même temps qui dit je vais faire baisser le chà´mage, celui là  MENT. Qu’il assume donc ses choix politiques, en particulier son choix du chà´mage.

    à  bientà´t !

  18. Avatar de Mathieu L.

    Désolé, mais tu te trompes:
    – Lorsque François Mitterrand met en place les 39 heures en 1981, le chà´mage continue à  augmenter. Là , tu as raison, c’est vrai, apparemment.
    – Lorsque les socialistes baissent le temps de travail à  35 heures, le chà´mage baisse de 2 points entre 1998 et 2000. Là , tu as tort.

    D’autre part, les hausses du salaire minimum et les réglementations existaient sous les Trente Glorieuses et n’empêchaient pas le plein-emploi. Je pense que les choses sont beaucoup plus complexes que cela.

    A bientà´t,

  19. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    Je ne pense pas que la baisse du chà´mage soit entièrement dà»e aux 35h. Il me semble avoir entendu que la conjoncture économique globale était favorable à  ce moment là .

    Par ailleurs, et malgré tout ce qu’on pourra dire, la France reste un pays o๠il y a beaucoup de règlementations, et des contraintes fortes sur le travail. ET, à´ surprise, un chà´mage élevé.

    je suis d’accord pour dire que les choses sont complexes. Mais les humains réagissent de manière raisonnable à  leur environnement. Le système mis en place en France est totalement désincitatif pour les employeurs, et pour les chà´meurs.

    à  bientà´t !

  20. Avatar de Mathieu L.

    C’est vrai, c’était une période de croissance, mais dans ce cas, cela signifie que les 35 heures n’ont pas bloqué les créations d’emploi.

    Les chiffres du chà´mage sont très discutables sur de nombreux points, et cela mériterait de nombreux articles de blog.

    A bientà´t,

  21. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    d’accord avec toi !

  22. […] Libéralisme et constructivisme […]

  23. Avatar de Maxime Zjelinski

    Sur la « loi de la jungle »
    La loi de la jungle est plutà´t celle d’un monde o๠ce ne sont pas les plus compétents qui réussissent mais les mieux capables de contourner le mécanisme de l’échange – le cartel et l’assistanat sont deux formes de ce refus de jouer le jeu.
    Quand un employeur accepte la candidature de tel demandeur d’emploi plutà´t que de tel autre, s’il le fait parce qu’il a le sentiment que le premier est suffisamment docile et/ou qu’il ne lui fera pas de l’ombre, il s’agit bien de la loi du plus fort, car l’offre de travail est évaluée en termes de force et non en termes de compétence. Le chà´meur longue durée diplà´mé, qui depuis des années cherche un emploi, comprend bien qu’il ne s’agit pas d’avoir telle ou telle ligne sur son CV, mais d’adopter telle ou telle attitude le jour de l’entretien, de n’avoir l’air ni trop faible ni trop fort, ni trop détaché ni trop volontaire – bref les compétences ne suffisent plus, il faut en plus que la demande plaise à  l’offre. C’est ça, la loi du plus fort : quand les compétences ne sont plus LE critère essentiel sur le marché de l’emploi, l’offreur se permet des caprices et le demandeur se met en quatre pour les satisfaire.
    Donc je préfère, pour le libéralisme, parler de la loi du plus compétent, et non du plus fort.

  24. Avatar de Maxime Zjelinski

    On pourrait dire de la société ce que Saussure, dans son Cours, disait de la langue : elle évolue, mais aucun locuteur en particulier n’est l’auteur de cette évolution, qui échappe à  tous et s’impose à  chacun (désolé, je ne retrouve pas le passage). Ce qui explique, peut-être, que l’esperanto, malgré l’intelligence du principe initial, soit aussi peu répandu. Et si la langue de l’Etat hébreu aujourd’hui est l’hébreu moderne (plutà´t que le russe, l’anglais, l’allemand ou le yiddish), c’est parce que cette langue de l’alya a des racines profondes.
    Ce qui vaut pour les langues vaut pour les sociétés. Evoluer consciemment, volontairement, activement est possible, mais l’esprit de réforme doit toujours respecter les moeurs. C’est la justification du libéralisme mais aussi de la modération contre les réformateurs enragés, et plus encore contre les révolutionnaires de toute sortes.

  25. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    Salut Maxime,
    je ne te rejoins pas du tout sur la distinction que tu fais entre « loi du plus fort » et « loi du plus compétent », et je trouve qu’elle est loin de ce qu’est le libéralisme. Le libéralisme, c’est la propriété privée et la responsabilité, qui toutes deux permettent de définir les limites à  la liberté.
    Dans le cas d’un recruteur, il est responsable de ses choix devant les propriétaires de l’entreprise qui recrute. Ces propriétaires sont libres de fixer les critères qu’ils souhaitent pour recruter dans ce qui est leur propriété. S’ils préfèrent embaucher des gens dociles plutà´t que des gens compétents, grand bien leur en fasse. Quel est le problème ? S’ils gèrent mal la chose, leurs concurrents les rappeleront rapidement à  la raison en étant meilleurs (parce qu’ayant recruté des gens plus compétents)…
    Complètement d’accord par contre avec ta dernière phrase :  » l’esprit de réforme doit toujours respecter les moeurs. C’est la justification du libéralisme mais aussi de la modération contre les réformateurs enragés, et plus encore contre les révolutionnaires de toute sortes. »
    à  bientà´t !

  26. Avatar de michka
    michka

    Je souscris aux observations de Lomig en ce qui concerne sa critique de la loi du plus fort.
    J’ ajoute qu’ une entreprise est une organisation complexe dont la performance est tributaire de la bonne ou mauvaise coopération des individus qui la composent. Le chef d’ entreprise lors de l’ embauche d’ un nouveau salarié doit ,outre la compétence proprement dit du candidat ( diplà´mes , expérience professionnelle) , tenir compte des critères suivants:
    -la présentation et la manière d’ être si le poste à  pouvoir inclut le contact avec la clientèle;
    -la fiabilité ( c’ est le plus dur à  détecter : ponctualité, qualité du travail fourni bref que l’ on soit obligé de repasser derrière );
    -la compatibilité avec les autres salariés de l’ entreprise ( esprit de coopération ).
    Se fonder sur la seule compétence est donc le meilleur moyen de se planter pour une embauche. C’ est le défaut majeur du recrutement des enseignants qui est fondé prioritairement sur la compétence .Le métier d’ enseignant requiert également des qualités humaines et pédagogiques indispensables pour que la transmissions des connaissances s’ effectue de façon optimale.

  27. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    « Le métier d’ enseignant requiert également des qualités humaines et pédagogiques indispensables pour que la transmissions des connaissances s’ effectue de façon optimale. »
    oui et s’ils n’ont pas cette compétence, alors c’est qu’ils ne sont pas recrutés sur la compétence pour leur métier ! Mais sur des critères abstraits de connaissances. Il suffirait de laisser les chefs d’établissements recruter eux-mêmes les enseignants pour régler le problème. Mais ça n’est pas possible dans le système centralisé à  l’extrême de procéder comme ça : vous vous rendez-compte, ma bonne dame, ça va faire une école à  deux vitesses ! Comme si le système n’était pas hallucinamment injuste et à  plusieurs vitesses dans l’état actuel des choses…
    à  bientà´t

  28. […] Libéralisme et constructivisme […]

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