Année : 2012

  • La sagesse des mythes

    La sagesse des mythes

    Je viens de terminer la lecture du second volume de la série de Luc Ferry « Apprendre à  vivre » (voir mon article concernant le tome 1). Il s’intitule « La sagesse des mythes », et Luc Ferry y revient sur la mythologie grecque, en essayant de faire une lecture philosophique de ces magnifiques et terribles histoires.

    Il donne, quand c’est nécessaire, des précisions sur les différents auteurs utilisés (chaque mythe a été raconté et utilisé par plusieurs auteurs), et surtout il ne cherche pas à  les expurger de leur violence réelle. C’est un superbe livre, facile à  lire, et qui permet une plongée rapide dans l’univers mythologique et philosophique grec. Quelques points que je retiendrai :

    • le mythe de la création du cosmos, fascinant, et qui se conclut par un formidable combat entre Zeus (qui veut installer l’ordre, et la justice) et Typhon (qui est le symbole du désordre, du chaos et de la violence, mais aussi du temps, de la génération). La conclusion est magnifique : Zeus triomphe de l’horrible Typhon, mais Gaia – la première déesse, et mère de ce dernier – insiste pour que Typhon ne soit pas tué, mais enfermé sous Terre. Parce que si l’harmonie triomphait, le cosmos sans le temps, le chaos, le déséquilibre ne serait rapidement plus rien d’autre qu’un univers immobile, figé, sans mouvement.
    • bien sûr, la très belle histoire d’Ulysse, qui est une parabole magnifique sur la condition humaine, avec la philosophie des grecs en ligne de soubassement. C’est un trajet qui va du désordre (la guerre, le fameux siège de Troie) vers l’ordre, la place retrouvée (Ulysse finira, après bien des aventures, par retrouver sa place au sein de sa famille, et parmi les mortels) malgré les épreuves. Parmi lesquelles, deux particulièrement (dont Ulysse aurait pu se tirer en ne restant pas à  sa place d’humain, et donc en cédant à  un orgueil démesuré, l’hybris) :
      • la tentation de l’immortalité (qui lui est proposée par Calypso), et
      • sortir du monde (oublier son identité et sa place, c’est Circé qui parvient presque à  cela).

    L’histoire d’Ulysse est un chemin vers la sagesse, la sagesse d’un mortel.

    Les deux mythes d’Oedipe et d’Antigone, qui rappellent à  quel point la condition des mortels est tragique, sont magnifiques également.

    Bref, si vous ne connaissez rien à  la mythologie grecque (ce qui était peu ou prou mon cas avant la lecture de cet ouvrage), voilà  un petit livre, facile à  lire, profond néanmoins et riche de détails. Courez l’acheter !

  • Pourquoi sommes-nous heureux ?

    Pourquoi sommes-nous heureux ?

    Je vous invite à  regarder cette très belle conférence de Dan Gilbert (professeur de psychologie à  Harvard) pour TED.com. Il y revient sur la manière dont le cerveau fabrique le bonheur, de manière à  la fois drôle et passionnante !

  • Qu’est-ce que l’Occident ?

    Qu’est-ce que l’Occident ?

    Je viens de terminer l’excellentissime petit livre de Philippe Nemo : « Qu’est-ce que l’Occident ? ». Le propos est simple : Philippe Nemo essaye de dégager ce qui constitue l’identité spirituelle et culturelle de l’Occident. Il articule son propos en décrivant cinq moments-clés, cinq « miracles » qui consituent l’épine dorsale de la culture occidentale. Brièvement, les voici : 

    1. l’invention de la Cité, de la liberté sous la loi, de la science et de l’école par les Grecs
    2. l’invention du droit, de la propriété privée, de la « personne » et de l’humanisme par Rome
    3. la révolution éthique et eschatologique de la Bible : la charité dépassant la justice, la mise sous tension eschatologique d’un temps linéaire, le temps de l’Histoire
    4. la « Révolution papale » des XIe-XIIIe siècles, qui a choisi d’utiliser la raison de la science grecque et du droit romain pour l’inscrire dans l’histoire éthique et eschatologique bibliques, réalisant ainsi la première véritable synthèse entre « Athènes », « Rome » et « Jérusalem »
    5. la promotion de la démocratie libérale accomplie par ce qu’il est convenu d’appeler les grandes révolutions démocratiques (Hollande, Angleterre, Etats-Unis, France, puis, sous une forme ou une autre, tous les autres pays de l’Europe occidentale). Le pluralisme étant plus efficient que tout ordre naturel ou que tout ordre artificiel dans les trois domaines de la science, de la politique et de l’économie, ce dernier évènement a conféré à  l’Occident une puissance de développement sans précédent qui lui a permis d’engendrer la Modernité.

    Nemo explique que le propre de l’Occident serait d’avoir été modelé par tous ces cinq miracles, et par aucun autre. Philippe Nemo termine en posant la question centrale de l’universalité de l’Occident, puis en proposant une Union Occidentale. J’ai adoré la lecture de ce livre : simple, synthétique au possible (130 pages), magistral dans l’enchaînement des idées et des concepts. Les passages sur la construction du droit romain, ou sur la révolution Papale étaient particulièrement instructifs pour moi (car inconnus auparavant).

    Il conclut en expliquant que le meilleur moyen pour que les cultures, les civilisations différentes puissent se parler entre elles, et que ce dialogue puisse déboucher, et être mené en vérité, il faut que chacun y soit authentiquement lui-même. Son livre participe à  faire émerger, superbement et simplement, ce « soi-même » essentiel des occidentaux.

    Pour une recension plus détaillée, je vous invite à  lire cet article sur Actu Philosophia.