Georges Amar a longtemps dirigĂ© les activitĂ©s de recherche et d’innovation de la RATP (en savoir un peu plus). Il y est devenu prospectiviste. J’ai la chance de pouvoir le cĂŽtoyer dans le cadre de la CommunautĂ© d’Innovation. C’est quelqu’un d’excessivement gentil et abordable, tout en Ă©tant impressionnant de culture et de profondeur de rĂ©flexion. Il vient de publier un remarquable essai sur le futur, et sur l’activitĂ© de prospective. J’ai adorĂ© l’approche de Georges Amar : ce qui l’intĂ©resse dans le futur, ce n’est pas la partie prĂ©visible, mais la partie nouvelle, radicalement neuve. La prospective n’en donc pas un travail d’aide Ă Â la gouvernance (« gouverner, c’est prĂ©voir). Pour autant, Georges Amar n’est pas non plus dans une posture de stricte construction (« le futur Ă©tant essentiellement imprĂ©visible, construisons-le »). Georges Amar est un amoureux de la langue, et il l’utilise comme un moyen de dire le futur : le futur ne se prĂ©dit pas, il se dit. Il ne se prĂ©voit pas, il se lit.
Lecture du présent
Il y a une parentĂ© avec Michel Serres dans l’approche poĂ©tique de Georges Amar. Prendre les mots au pied de la lettre, mais aussi dans toute leur profondeur sĂ©mantique, Ă©tymologique, fait partie d’un jeu que j’aime beaucoup suivre, et qui me parle. Une sorte d’interprĂ©tation du futur, par le langage. La prospective comme hermĂ©neutique du prĂ©sent ? L’exercice de palĂ©o-rĂ©tro-prospective sur la domestication du feu est un rĂ©gal, et trĂšs Ă©clairant sur la mĂ©thode de prospective de Georges Amar.
Il s’agit donc de dire l’inconnu. En cela, la prospective n’est pas une science, mĂȘme si elle s’appuie sur les savoirs disponibles. En effet, la science transforme l’inconnu en connu, et l’enjeu Ă©thique majeur pour Georges Amar est de dire un futur, d’apprĂ©hender l’inconnu, d’une maniĂšre qui permette de lĂ©guer aux suivant un futur qui ne soit pas prĂ©emptĂ© par nous. Un futur ouvert. Aller Ă Â la rencontre de l’inconnu, sans le figer, sans le faire coller avec notre vision. C’est bien ce que nous apprend ce merveilleux petit essai : il nous montre un chemin, une posture permettant de dire le futur sans le figer, Ă Â explorer l’inconnu sans ĂȘtre aveugle. Il nous sert Ă Â ne pas oublier de dialoguer avec le futur, Ă Â le questionner.
Aimer le futur : Georges Amar met dans le mot aimer un « mode de connaissance qui ne sĂ©pare pas le sujet de l’objet, le concept de l’affect, qui ne dissocie pas connaissance et crĂ©ation ».