Catégorie : 📚 Livres

  • Apprendre à  vivre

    Apprendre à  vivre

    Rien que ça ! C’est le titre du livre de Luc Ferry que je viens de terminer. Bien sûr, c’est un peu prétentieux, mais en même temps, n’est-ce pas ce que nous essayons tous, chacun à  notre manière, de faire ? 

    Le livre est magnifique : simple, pédagogique sans être simpliste. J’ai appris beaucoup. Luc Ferry passe en revue une bonne partie de l’histoire de la philosophie, de la pensée, à  travers un filtre particulier : chaque doctrine ou courant est décrypté selon trois axes.

    1. Théorie (que pouvons-nous connaitre et expliquer ?)
    2. Ethique (comment vivre avec les autres ? quelles sont les bonnes règles ?)
    3. Sagesse ou doctrine du salut (quel sens donner à  la vie ? )

    C’est passionnant, tout simplement. J’étais déjà  un peu familier avec la pensée stoïcienne, un peu moins avec le christianisme. J’ai adoré l’introduction que Luc Ferry fait de la pensée de Nietzsche, qui est pour le moins obscur en VO. Notamment, j’ai aimé l’idée suivante.

    Nietzsche décrypte deux types de « forces ». Les forces « réactives » d’une part (propres à  la pensée rationnelle, à  la négation du sensible) qui ne se déploient qu’en annihilant d’autres forces. C’est la volonté de vérité, la pensée rationnelle. Et les forces « actives » d’autre part (propre à  l’affirmation du corps, qui s’affirment dans l’art) et qui existent sans avoir besoin de renier autre chose. Et Nietzsche définit la grandeur comme la conciliation en nous de ces deux types de forces (je cite Ferry) : 

    C’est cette conciliation qui est, au yeux de Nietzsche, le nouvel idéal, l’idéal enfin acceptable parce qu’il n’est pas, à  la différence de tous les autres, faussement extérieur à  la vie mais, au contraire, explicitement arrimé à  elle. Et c’est cela, très exactement, que Nietzsché nomme la grandeur – un terme capital chez lui – le signe de la « grande architecture », celle au sein de laquelle les forces vitales, parce qu’elles sont enfin harmonisées et hiérarchisées, atteignent d’un même élan la plus grande intensité en même temps que la plus parfaite élégance.

     

    Au final, je recommande vraiment ce livre. Direct, sincère, il pose un certain nombre de questions essentielles, et ce n’est qu’en tout fin d’ouvrage que Luc Ferry donne son propre point de vue, tout en nuance. A lire. Pour apprendre à  penser et à  vivre. 

  • DLL – La persistance du constructivisme dans la pensée courante

    Chapitre premier : « Raison et évolution »

    La persistance du constructivisme dans la pensée courante

    Le rejet des récits par lesquels la religion expliquait la source et les fondements de la validité des règles traditionnelles de la morale et du droit conduisait au rejet de ces règles mêmes, dans la mesure où elles ne pouvaient être justifiées rationnellement. C’est à  leur succès dans cette « libération » de l’esprit humain que nombre de penseurs célèbres de cette époque doivent leur réputation.

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  • Chaine de Noël

    Je viens d’être invité par Rubin à  poursuivre une petite chaine consistant à  donner six livres. Six livres ? Les meilleurs ? ceux qu’on emmènerait sur une île déserte ? les 6 derniers à  nous avoir intéressés ? Bon, j’imagine un peu de tout ça, mais je retiens surtout l’idée de conseiller 6 livres qui nous ont marqué, et qu’on relit avec plaisir.

    Je passe à  présent le relais à  Criticus, à  Mathieu L., à  Sheiro, à  Internecivus Raptus, à  René Foulon, à  Aymeric I et à  Aymeric II, et enfin à  M. Pingouin. J’ai hâte de découvrir quels livres ils vont nous conseiller. En ces périodes de pré-fêtes de Noël, ces listes de livres vont être bien utiles…!

  • La Loi, de Frédéric Bastiat

    J’ai reçu hier mon exemplaire de « La Loi« , de Frédéric Bastiat. Bien entendu, je n’ai pas pu résister, et j’ai commencé à  le lire. Je vous en donne quelques extraits ici, pour vous donner envie d’aller le lire…

    J’ai retrouvé avec exaltation, et un plaisir intense, la langue pure et belle de Bastiat, sa manière de rigoureusement exprimer les idées. Sa verve aussi, car c’est réellement un grand écrivain. Comme ce livre est disponible en intégralité sur le net, j’ai pu aller vous chercher deux extraits lus hier soir. En guise d’amuse-gueule…

    Propriété, Spoliation et Loi

    L’homme ne peut vivre et jouir que par une assimilation, une appropriation perpétuelle, c’est-à -dire par une perpétuelle application de ses facultés sur les choses, ou par le travail. De là  la Propriété.
    Mais, en fait, il peut vivre et jouir en s’assimilant, en s’appropriant le produit des facultés de son semblable. De là  la Spoliation.
    Or, le travail étant en lui-même une peine, et l’homme étant naturellement porté à  fuir la peine, il s’ensuit, l’histoire est là  pour le prouver, que partout où la spoliation est moins onéreuse que le travail, elle prévaut; elle prévaut sans que ni religion ni morale puissent, dans ce cas, l’empêcher.
    Quand donc s’arrête la spoliation ? Quand elle devient plus onéreuse, plus dangereuse que le travail.
    Il est bien évident que la Loi devrait avoir pour but d’opposer le puissant obstacle de la force collective à  cette funeste tendance ; qu’elle devrait prendre parti pour la propriété contre la Spoliation.
    Il est bien évident que la Loi devrait avoir pour but d’opposer le puissant obstacle de la force collective à  cette funeste tendance ; qu’elle devrait prendre parti pour la propriété contre la Spoliation
    Mais la Loi est faite, le plus souvent, par un homme ou par une classe d’hommes. Et la Loi n’existant point sans sanction, sans l’appui d’une force prépondérante, il ne se peut pas qu’elle ne mette en définitive cette force aux mains de ceux qui légifèrent.
    Ce phénomène inévitable, combiné avec le funeste penchant que nous avons constaté dans le coeur de l’homme, explique la perversion à  peu près universelle de la Loi. On conçoit comment, au lieu d’être un frein à  l’injustice, elle devient un instrument et le plus invincible instrument d’injustice. On conçoit que, selon la puissance du législateur, elle détruit, à  son profit, et à  divers degrés, chez le reste des hommes, la Personnalité par l’esclavage, la Liberté par l’oppression, la Propriété par la spoliation.
    Il est dans la nature des hommes de réagir contre l’iniquité dont ils sont victimes. Lors donc que la Spoliation est organisée par la Loi, au profit des classes qui la font, toutes les classes spoliées tendent, par des voies pacifiques ou par des voies révolutionnaires, à  entrer pour quelque chose dans la confection des Lois. Ces classes, selon le degré de lumière où elles sont parvenues, peuvent se proposer deux buts bien différents quand elles poursuivent ainsi la conquête de leurs droits politiques : ou elles veulent faire cesser la spoliation légale, ou elles aspirent à  y prendre part.

    Loi, Morale et Justice

    Aucune société ne peut exister si le respect des Lois n’y règne à  quelque degré ; mais le plus sûr, pour que les lois soient respectées, c’est qu’elles soient respectables. Quand la Loi et la Morale sont en contradiction, le citoyen se trouve dans la cruelle alternative ou de perdre la notion de Morale ou de perdre le respect de la Loi, deux malheurs aussi grands l’un que l’autre et entre lesquels il est difficile de choisir.
    Il est tellement de la nature de la Loi de faire régner la Justice, que Loi et Justice, c’est tout un, dans l’esprit des masses. Nous avons tous une forte disposition à  regarder ce qui est légal comme légitime, à  ce point qu’il y en a beaucoup qui font découler faussement toute justice de la Loi. Il suffit donc que la Loi ordonne et consacre la Spoliation pour que la spoliation semble juste et sacrée à  beaucoup de consciences. L’esclavage, la restriction, le monopole trouvent des défenseurs non seulement dans ceux qui en profitent, mais encore dans ceux qui en souffrent. Essayez de proposer quelques doutes sur la moralité de ces institutions. « Vous êtes, dira-t-on, un novateur dangereux, un utopiste, un théoricien, un contempteur des lois ; vous ébranlez la base sur laquelle repose la société. » Faites-vous un cours de morale, ou d’économie politique ?

  • DLL – Le développement de l'optique évolutionniste

    Chapitre premier : « Raison et évolution »

    Le développement de l’optique évolutionniste

    Il devint de plus en plus clair que la formation de types réguliers de relations humaines qui ne sont pas le but conscient d’actions humaines soulevait un problèmes qui nécessiterait le développement d’une théorie sociale systématique. La réponse à  ce besoin fut fournie pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle dans le domaine économique par les philosophes moralistes écossais, conduits par Adam Smith et Adam Ferguson, cependant que les conséquences à  en tirer pour la théorie politique recevaient leurs magnifiques formulations du grand visionnaire Edmund Burke, encore que l’on chercherait vainement dans son oeuvre une théorie systématique.

    Hayek s’emploie ensuite à  dissiper certains malentendus à  propos de la théorie évolutionniste.

    Il y a d’abord la croyance erronée que c’est une conception empruntée à  la biologie. Ce fut en réalité l’inverse, et si Charles Darwin a su appliquer avec succès à  la biologie un concept qu’il avait largement reçu des sciences sociales, cela ne rend pas ce concept moins important dans le domaine où il avait pris naissance. C’est à  l’occasion de la réflexion sur des formations sociales telles que le langage et la morale, le droit et la monnaie, qu’au cours du XVIIIe siècle les conceptions jumelles de l’évolution et de la formation spontanée d’un ordre furent enfin clairement formulées, fournissant ainsi à  Darwin et ses contemporains des outils intellectuels qu’ils purent appliquer à  l’évolution biologique. Ces philosophes moralistes du XVIIIe siècle et les écoles historiques du droit et du langage peuvent bien être nommés — comme certains des théoriciens du langage du XIXe se sont eux-mêmes qualifiés — des darwiniens avant Darwin.

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  • DLL – La fausse dichotomie du "naturel" et de "l'artificiel"

    Chapitre premier : « Raison et évolution »

    La fausse dichotomie du « naturel » et de « l’artificiel »

    Hayek explique ensuite la confusion, due à  la tradition philosophique grecque, entre plusieurs types de phénomènes. Les grecs divisaient les phénomènes en deux catégories (« naturels » et « artificiels »), dont la seconde comportaient à  son tour deux types non suffisamment distingués de phénomènes (nomos et theisis). Finalement il était nécessaire d’introduire, pour limiter les confusions, une troisième classe distincte de phénomènes « résultant de l’action humaine, mais sans être le fruit d’un dessein humain ».

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