J’ai eu la chance d’aller avant-hier découvrir l’exposition consacrée à Doisneau au Musée Maillol. Plusieurs centaines de photos y sont exposées, par grandes thématiques (l’enfance, les ateliers d’artistes, les écrivains, Renault, les troquets, etc..). Bien sûr, les photos sont pour un grand nombre d’entre elles très belles, formellement, mais ce n’est pas ce qui ressort, je dois dire, de l’exposition. Doisneau n’est pas un photographe qui structure autant sa toile photographique qu’un Cartier-Bresson, par exemple. Deux autres choses m’ont frappées, et c’est ce qui a rendu l’exposition passionnante, et saisissante.
Monde disparu
La première, c’est que le monde photographié par Doisneau a quasi-disparu. C’est logique, d’ailleurs, puisque cet homme était à peu près de la génération de mes grands-parents : les premières photos de l’expo, datant d’avant la seconde guerre mondiale, montrent un monde dans lequel mes propres parents n’étaient pas encore nés. Mais au fil de l’expo et des thèmes, on arrive dans le monde où je suis né (en 1974), et ce monde là aussi a disparu. Les décors, les voitures, les habits, les attitudes, tout semble venir d’un passé très lointain. Il est vrai que je ne suis plus tout jeune. Mais la technologie, le grand remplacement, le fait que chacun maintenant ait un appareil photo dans sa poche a changé le monde, notre regard sur celui-ci et notre regard aussi sur ceux qui capturent des images. Même les photos des années 80 semblent vraiment tiré d’un monde très ancien. J’imagine que c’est le propre des photos que de montrer et faire ressentir le temps qui passe et les choses qui ne seront plus jamais les mêmes…
Regard tendre
L’autre point très marquant des photos de Doisneau c’est le regard incroyable qu’il pose sur les gens qu’il photographie. Les sujets sont parfois difficiles, mais on sent, et on voit, qu’il a la confiance des gens qu’il a immortalisé, et toujours la photo montre leur dignité et leur humanité. Souvent avec tendresse et humour. C’est assez incroyable, et je pense que ça dit beaucoup de la relation qu’il devait tisser avec eux avant de les photographier. Ce monde étrange et poétique des banlieues en pleine construction avec leurs terrains vagues, des bistrots de quartier, des cercles d’artistes et d’auteurs, de gueules cassées, de pauvres gens, ce monde de la haute société aussi quand il travaillait pour Vogue, est un monde profondément humain, plutôt joyeux, jamais misérabiliste, parce que visiblement Doisneau n’a jamais regardé quelqu’un avec pitié mais toujours avec respect, en cherchant à montrer la dignité et l’étrangeté de ses congénères. Chapeau le journaliste reporter photographe.
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