CatĂ©gorie : 🧠 RĂ©flexions

  • Adapter l’Ă©cole et les entreprises à  l’humain

    Adapter l’Ă©cole et les entreprises à  l’humain

    J’ai trouvĂ© cette animation magnifique par le biais de Presentation Zen. Les thĂšmes dĂ©veloppĂ©s par Sir Ken Robinson rejoignent beaucoup ceux abordĂ©s par Seth Godin dans son livre Linchpin. En gros, le systĂšme Ă©ducatif, et beaucoup d’entreprises, fonctionnement encore de la maniĂšre dont fonctionnait le monde au moment de la sociĂ©tĂ© industrielle. Ces organisations loupent une bonne partie de la richesse de l’humain, et les gens sont Ă©touffĂ©s par ces systĂšmes. Un appel vibrant, qui rejoint celui de Seth Godin. Chaque ĂȘtre humain est indispensable. Extrait (traduit rapidement, soyez indulgents) :

    Les arts, en particulier, touchent à  l’idĂ©e d’expĂ©rience esthĂ©tique. Une « expĂ©rience esthĂ©tique » est un moment pendant lequel vos sens fonctionnent à  plein rĂ©gime. Un moment oĂč vous ĂȘtes dans l’instant prĂ©sent. OĂč vous rĂ©sonnez joyeusement avec cette chose que vous vivez. OĂč vous ĂȘtes pleinement vivant. Une expĂ©rience « an-esthĂ©(s)ique », c’est quand vous fermez vos sens, et que vous n’ĂȘtes plus ouvert à  ce qui arrive.

    Nous Ă©duquons les enfants en les « anĂ©sthĂ©(s)iant ». Et je pense que nous devrions faire tout l’inverse. Nous ne devrions pas les endormir, mais les Ă©veiller à  ce qu’ils ont à  l’intĂ©rieur.

    Pour ceux que ça intĂ©resse, j’avais dĂ©jà  renvoyĂ© vers une confĂ©rence pour TED.com du mĂȘme K. Robinson, parlant de crĂ©ativitĂ© (il y a moyen de mettre des sous-titres en français).

  • Le chef d’orchestre japonais


    J’ai passé une demi-heure, il y a quelques temps, à me balader près du Trocadéro. Je me rendais à un groupe de travail, et j’étais arrivé, comme toujours, avec une avance confortable. Tellement confortable que les troquets n’étaient même pas encore ouverts. J’en ai profité pour faire un tour du côté des jets d’eau qui descendent du Trocadéro vers la tour Eiffel. Le jour se levait, et quelques balayeurs nettoyaient les détritus laissés là, la veille, par la foule amassée pour voir un concert (une scène était encore en place). La multitude laisse-t-elle nécessairement des monceaux de déchets derrière elle, mécaniquement, où est-ce le signe d’une population d’assistés qui préfèrent payer des balayeurs plutôt que d’amener un sac pour y placer ses ordures ?

    Quoi qu’il en soit, le paysage était splendide, et les passants très rares. L’air frais était agréable. L’activité des garçons de café pour installer les terrasses était pleine de joie, cette joie de l’attente « avant« . Le potentiel de la journée encore plein, mais déjà vibrant et riche de promesses.

    J’ai croisé en remontant vers la place du Trocadéro un homme, de type japonais. Il marchait tranquillement, la tête tournée vers le sol, Il faut placer dans chaque être humain toute la richesse de l’humanitédans une attitude sereine. Il avait un beau visage, la quarantaine, et tout dans son être respirait la bonté et la profondeur d’âme. Un bel humain, comme on en croise de temps en temps. Je me suis dit que ce pouvait être un chef d’orchestre japonais, en vacances à Paris (ses tongues et sa tenue décontractée m’ont influencée, bien sûr). J’en ai ressenti une forme de respect et de curiosité à son égard. Je lui faisais spontanément confiance.

    Aussitôt, je me suis fait la réflexion suivante : pourquoi juger (ici, en positif) cette personne sur son apparence ? Moi qui fais des efforts régulièrement pour ne pas juger négativement ceux qui ont des têtes franchement antipathiques, pourquoi le faire dans l’autre sens ? N’est-il pas plus juste de laisser son jugement en suspens tant qu’on ne connait pas un peu la personne ? L’habit ne fait pas le moine, ni le chef d’orchestre. Celui-ci, de chef d’orchestre, était peut-être en fait un sale con, qui cogne ses enfants, raciste comme pas deux, sectaire comme un poux.

    Mais je crois que j’avais raison, tout de même : il faut placer dans chaque être humain, et tant que ses actes ou ses paroles ne nous ont pas convaincu du contraire, toute la richesse de l’humanité. Chaque personne que nous croisons mérite d’être considérée comme un être bon, généreux, profond, sage, pacifique. Les humains sont fait aussi pour cela. C’est quand nous préjugeons en négatif que nous avons tort ; en positif, c’est simplement de la confiance placée en l’autre qui rend la relation possible, et la place sous un jour favorable.

    Il faut voir dans chaque humain un chef d’orchestre japonais.

  • JournĂ©e parfaite

    Journée parfaite

    Amusez-vous : dĂ©crivez votre « journĂ©e parfaite ». Listez de quoi elle serait faite. Vous pouvez faire l’exercice avec une semaine, ou un mois, ou une annĂ©e. Avec votre vie, si vous le voulez. L’exercice est le mĂȘme. Cela revient à  se poser la question du saupoudrage : quelle quantitĂ© de quoi je veux, en quelle proportion ?

    De l’amour, des sentiments, un peu de travail, de la musique ? Du dessin, des rigolades, une soirĂ©e entre amis ? Une promenade le long de l’eau, un barbecue sous les arbres en Ă©tĂ© ? Des jeux avec les enfants, un spectacle ? Du calme, de la lenteur ? Un peu de tout ça, et mĂȘme plus ?

    La rĂ©alitĂ©, c’est qu’une fois dressĂ©e, cette liste n’a plus de sens, et devient aussitĂŽt une caricature d’elle-mĂȘme. Pourquoi ?

    Parce que répétées telles quelles, planifiées, toutes ces choses joyeuses seraient bientÎt étouffantes, ou tristes.

    Pourquoi ? Parce nous changeons, et que ce qui Ă©tait notre dĂ©sir un jour, ne le sera pas forcĂ©ment le lendemain. Parce que nous sommes vivants, et que nous sommes curieux, et avides de nouveautĂ© : comment un jour – mĂȘme parfait – rĂ©pĂ©tĂ© à  l’identique, sans surprise, sans changements, pourrait-il nous combler ?

    La journĂ©e parfaite n’existe pas ; à  chacun de se dĂ©brouiller pour trouver de la joie dans chacune de ses journĂ©es. Personne ne sait de quoi l’avenir, son avenir, sera fait : dĂ©crire la journĂ©e parfaite (la semaine, le mois, l’annĂ©e) serait une maniĂšre d’interdire le futur, le dĂ©sir, les rĂȘves un peu fous qui donnent envie de se dĂ©passer. La perfection ne peut se produire que de maniĂšre fortuite, ponctuelle et spontanĂ©e, et c’est aussi cela, sa valeur.

    Il y a un étonnement, une surprise, dans la joie, qui en font une idée contradictoire avec celle de perfection.

    Une journĂ©e parfaite, ce serait une journĂ©e sans joie, et une journĂ©e sans joie ne saurait ĂȘtre parfaite.

    Un homme qui réussit est un homme qui se lÚve le matin et qui se couche le soir, et qui entre les deux fait ce qui lui plaßt.

    Bob Dylan

    La journĂ©e parfaite, c’est celle oĂč l’on fait ce que l’on veut. MĂȘme – surtout ? – si ce que l’on veut, c’est faire autre chose que la veille.

  • Ce que les enfants changent

    Tout. Avant d’en avoir, on le pense. Après, on le sait, on le vit. Concrètement, qu’est-ce que ça change d’avoir des enfants ? Je ne parle pas, ici, de l’expérience que la femme vit, c’est à elles de nous raconter cette aventure qui est probablement au-delà de ce qu’on peut décrire (le corps se transforme, les équilibres hormonaux aussi, et puis les femmes donnent la vie). Nous pouvons accompagner les femmes dans cet acte, les soutenir, mais comprendre ce qu’elles vivent, je ne pense pas. Trop physique, trop biologique pour être partagé complètement. D’ailleurs, quelle expérience peut-être complètement partagée ?

    Le mieux est l’ennemi du bien, commençons par décrire les choses, on verra si ça se partage. Pour un père, donc, ou une mère (hors grossesse et accouchement), qu’est-ce qui change avec des enfants ? On apprend le sens de plusieurs mots important, que l’on avait laissé de côté, à tort. J’en livre quelques-uns, spontanément.

    Le bonheur réside dans la santé. Quand la santé va, le reste suit. C’est un immense bonheur d’avoir la chance d’être en bonne santé. Le plus grand drame humain est certainement de perdre un enfant, ou d’avoir des enfants malades, ou qui souffrent.

    Sacrifice. Avoir des enfants, c’est sentir au plus profond de soi à quel point on peut se sacrifier pour eux. Si l’on me demandait demain de choisir entre ma vie et celle de mes enfants, je n’hésiterais pas une seconde. On découvre le sens du mot sacrifice avec des enfants. Son sens propre. C’est parce qu’on les aime, bien sûr, au-delà de ce qui est imaginable lorsqu’on n’a pas d’enfants. De l’amour qui veut juste donner, qui n’attend pas en retour. Agapè, selon la classification des grecs.

    Joie. Les enfants, spontanément, dès leur plus jeune âge, jouent. Ils sont joyeux, naturellement. Ils nous forcent à sortir de notre temps d’adulte, et à nous replonger dans l’instant présent. C’est une source infinie de sagesse. D’humilité. Car ce que les enfants font spontanément, nous devons, nous, faire l’effort de le redécouvrir. Pas en les imitant, bien sûr. Mais ils apportent quelque chose qui est de l’ordre du jeu permanent, qui malmène à bon escient notre sérieux d’adulte.

    Patience. Les enfants demandent de la patience. Ils apprennent, se trompent. Nous ne sommes pas toujours dans les bonnes dispositions pour leur laisser le temps. Et nous devons faire cet effort aussi : être patient, s’adapter, à nouveau à leur temps propre, à leurs besoins d’enfants. C’est dur, souvent, d’être patient. C’est un travail. Et comme tout travail, il donne des fruits. Notre caractère grandit au contact des enfants; Etre à l’écoute, tout en dirigeant les choses, en les cadrant à la bonne mesure.

    Responsabilité. Liberté. Nous sommes responsables de nos enfants. Responsables de leur bien-être, mais aussi et surtout de leur développement harmonieux. A nous de leur apprendre à être libres et heureux. A nous de les aider en les guidant, tel le tuteur avec la plante, sans les empêcher. A nous d’adapter le degré de liberté selon l’âge, les circonstances, l’enfant (aucun n’est identique). Comment douter que l’essentiel du sens dans notre vie vient des enfants ? Le monde qu’on veut participer à leur construire, les chances qu’on veut leur donner, les efforts que l’on peut faire, tout cela n’a de sens que par eux et pour eux. Tout cela inclut, bien sûr, le développement et l’épanouissement de leurs parents, en couple, et hors de la famille. Il ne s’agit pas d’un amour fusionnel. Au contraire. On donne à ses enfants. Mais plus rien ne peut être comme avant avec des enfants.

    Tout est mieux. Avec des enfants, le monde est plus riche, plus joyeux, plus doux, plus vivant, plus surprenant, plus angoissant, plus merveilleux, plus sensé, plus fou, plus tragique, plus tendre, plus beau. Plus humain.

  • Se changer pour changer le monde


    La conduite du changement m’intĂ©resse. Parce que j’aime l’action, et que l’action c’est le changement. Comment agir sans rien changer ?

    Pour agir, il faut accepter le monde comme il est. Pas comme on le voudrait, mais simplement comme il est. Seth Godin revient lĂ -dessus avec talent dans son dernier bouquin.

    J’ai toujours aimĂ© cette citation de Marc-AurĂšle :

    Que la force me soit donnĂ©e de supporter ce qui ne peut ĂȘtre changĂ© et le courage de changer ce qui peut l’ĂȘtre mais aussi la sagesse de distinguer l’un de l’autre.

    Marc-AurĂšle

    ƒuvrer efficacement, cela implique d’avoir un but. Cela peut-ĂȘtre inconscient, ou simplement faire changer les choses, se faire sa place, Ă©voluer vers ce qui nous plait, peu importe. Chacun ses motivations. Mais chacun est bien obligĂ©, dans la poursuite de ses buts, de se fixer certaines limites. Les rĂšgles morales, Ă©thiques, servent Ă  cela, Ă  mon sens. Cela permet de chercher l’efficacitĂ©, mais pas de maniĂšre brutale : de maniĂšre humaine. C’est-Ă -dire en prenant en compte les autres, leurs propres intĂ©rĂȘts, en prenant en compte notre volontĂ© de continuer Ă  se regarder dans une glace sans rougir : la fin ne justifie pas tous les moyens, c’est une question de fidĂ©litĂ© Ă  ce que nous sommes. Pas d’accomplissement dans l’action, si cela devait se faire au dĂ©triment de l’estime que l’on a de soi.

    Il faut arriver Ă  lutter contre l’attachement qui nous lie Ă  des choses irrĂ©elles (un passĂ© fantasmĂ©, un prĂ©sent illusoire, un avenir utopique), pour Ɠuvrer sur les choses telles qu’elles sont, tout en restant fidĂšle Ă  ce que nous sommes.

    C’est cela, l’action, non ? Se dĂ©faire d’une partie de soi, en conservant une autre partie de soi. Accepter le changement en nous, tout en le conduisant Ă  l’extĂ©rieur.

    On ne peut rien changer sans se changer soi-mĂȘme.

  • Etes-vous indispensable ?

    Etes-vous indispensable ?

    Je voulais vous raconter l’histoire de ma reconversion dans ma boite. Et voilĂ   que Dominique me met dans les mains « Linchpin« , de Seth Godin. C’est un superbe livre, passionnant, riche, foisonnant, dĂ©rangeant parfois. Au final, il a changĂ© ma maniĂšre de penser mon travail, mĂȘme si cela n’a fait que me permettre de mettre des mots sur ce que je ressentais. Je repousse donc un peu le premier billet de la sĂ©rie, et vous conseille ce livre admirable. De quoi parle ce livre ? De la maniĂšre dont on peut se rendre indispensable au travail, s’Ă©panouir, enrichir les autres, crĂ©er des connexions. C’est ce que Seth appelle faire son travail comme un art. L’art, c’est ce qui touche les autres et les fait changer. En donnant aux autres, en Ă©crivant le plan plutĂŽt qu’en suivant celui donnĂ© par les chefs. Un Linchpin, c’est un pivot, c’est celui qui créé du lien. C’est celui qui change les autres par son art (sa maniĂšre pleine de faire son travail). C’est chacun de nous : voilĂ   le propos de Seth Godin. Chacun peut devenir un « linchpin », et il suffit pour cela de vaincre la rĂ©sistance, le cerveau reptilien (le « lĂ©zard »), qui veut tout sauf se retrouver dans l’inconfort, dans le risque, dans l’inattendu. Je ne saurais trop conseiller ce livre Ă   tous ceux qui veulent marier travail et passion. Cela ne dĂ©pend pas du travail, mais de nous. Il y a des « linchpin » parmi les garçons de cafĂ©, parmi les ingĂ©nieurs, parmi les artistes, parmi les dirigeants. Partout. Pourquoi pas vous ?