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  • De la démocratie en Amérique

    De la démocratie en Amérique

    J’ai eu la chance d’avoir un Kindle lors de mon dernier anniversaire. Du coup, je découvre les joies de la lecture facile dans le métro, ou au dodo. C’est léger un Kindle, et on peut facilement annoter des choses en lisant. Le premier livre que j’ai lu, c’est le formidable livre d’Alexis-Henri-Charles Clérel, comte de Tocqueville, couramment connu sous le nom d’Alexis de Tocqueville (1805-1859). Personnage de roman, issu de la noblesse, homme politique, philosophe, sociologue avant l’heure, c’est surtout une plume incroyable de clarté et de concision. Alexis de Tocqueville a fait un voyage pour aller observer le système carcéral aux USA naissants, mais il y a passé plus de temps, et en a rapporté un premier livre (1835) et un second (1940) qui dessinent une analyse sociale et politique des USA : « De la démocratie en Amérique ».

    Livre de référence de philosophie politique

    C’est un livre formidable, fondamental, et qui consiste en une sorte d’analyse d’une Nation naissante, les USA, comparée avec ce que Tocqueville connait, c’est-à -dire la monarchie française post-révolutionnaire, et l’émergence de la même société démocratique en France.
    Le livre est formidable pour plusieurs raisons, outre les qualités stylistiques déjà  évoquées : un esprit synthèse extraordinaire, un goût pour la précision factuelle, et la rigueur intellectuelle, une grande connaissance du sujet.

    Je ne sais si j’ai réussi à  faire connaître ce que j’ai vu en Amérique, mais je suis assuré d’en avoir eu sincèrement le désir, et de n’avoir jamais cédé qu’à  mon insu au besoin d’adapter les faits aux idées, au lieu de soumettre les idées aux faits.

    On sent que Tocqueville s’est réellement plongé dans le pays américain, dans sa culture, dans son histoire. Ce qui en ressort, si je devais résumer à  l’extrême :

    • la vague de fond de l’égalité qui est en train de transformer le monde. Ce que Tocqueville voit dans l’Amérique, c’est l’avenir des nations européennes. Il souligne à  la fois l’inéluctabilité du phénomène, son extrême proximité avec l’idée de liberté, et en même temps en décrit très bien les aspects potentiellement excessifs (tome 2 notamment avec le concept de tyrannie de la majorité).
    • la construction de la société américaine qui s’est faite sur une base locale, communale, c’est-à -dire dans une logique de subsidiarité ascendante. Les institutions de chaque Etat ne sont légitimes que pour remplir les fonctions que l’échelon inférieur, communal, ne peut assurer/gérer seul. La constitution de l’Union est dans le même esprit : le niveau national ne peut prendre la main que sur des sujets délégués des différents Etats vers le gouvernement national. Tocqueville y voit un puissant levier pour limiter le pouvoir, par son morcellement. J’y vois aussi un moyen simple pour éviter une centralisation excessive. Tocqueville insiste également sur le rôle que les citoyens jouent dans l’administration et la politique locale, bien plus qu’en France.
    • A titre personnel, Tocqueville voit dans tous ces changements, qu’il sent bien arriver aussi en France, à  la fois un progrès pour la liberté en général, mais aussi une régression pour la liberté de penser et d’expression : la fameuse tyrannie de la majorité rend presque infréquentable celui qui ne pense pas comme la majorité. Une fois une idée adoptée par la majorité, elle n’est plus discutable. Cela ne vous rappelle rien ?
    • Enfin, on peut lire dans « De la démocratie en Amérique » un plaidoyer pour une libéralisme subsidiaire assez large dans la société, sauf pour les aspects de politique extérieures. Par ailleurs, et sur de nombreux aspects, il me semble être un vrai libéral humaniste, et un vrai critique de l’utilitarisme, position dont je ne saurais être plus proche.Je reviendrai là -dessus dans un billet à  venir.
    • Tocqueville pensait que les bienfaits de la démocratie américaine résidait dans la tranquille et pacifique coexistence des individus, et la prospérité. Il voyait dans cet état de choses un monde d’où l’esprit de grandeur, et d’entreprendre de grands projets, aurait disparu. Je pense qu’il avait en partie raison, et en partie tort sur ce point : il avait une grille de lecture militaire, aristocratique, de ce qui est grand ou non. Les démocraties ont montré par la suite, grâce aux progrès de la liberté et de la technique, qu’elles pouvaient aussi secréter de grands projets, et de grandes entreprises.

    Grand auteur

    Au-delà  de ces quelques points, très subjectifs et réducteurs, je vous recommande très vivement la lecture de cet ouvrage majeur. Beaucoup de passages sont extraordinaires de lucidité, de rigueur morale et intellectuelle, et c’est un plaisir de chaque instant que de suivre cette analyse, et cette langue française magnifique. Personne ne peut comprendre ce qu’est la démocratie, sans avoir lu Tocqueville. Le mot de la fin à  l’auteur (une citation parmi des dizaines et des dizaines notées sur mon kindle) :

    Il existe une loi générale qui a été faite ou du moins adoptée, non pas seulement par la majorité de tel ou tel peuple, mais par la majorité de tous les hommes. Cette loi, c’est la justice.

  • Gilets jaunes : insaisissable peuple ?

    Gilets jaunes : insaisissable peuple ?

    Comme tout le monde en France, je me suis interrogé sur la signification du mouvement des gilets jaunes. Je m’efforce d’écrire ce billet pour me forcer à  résumer ce que j’en pense. Je ne prétends pas apporter un regard nouveau ou original sur le sujet.

    En préambule : je précise que je ne parle que des Gilets Jaunes. Pas des insupportables racailles de banlieues qui viennent systématiquement utiliser les rassemblements pour piller et agresser la population. Ni des Black-blocks, que je mets dans le même panier. La place de tous ces haineux est en prison.

    Qui sont ces Gilets jaunes ?

    Cela étant posé, il est vrai que le mouvement est difficile en partie à  saisir : protéiforme, multi-revendications, très suivis donc en train de subir des tentatives de récupérations de tous les côtés de l’échiquier politique. C’est intéressant, car le soutien de nombreuses personnalités politiques et intellectuelles au mouvement permet de se rendre compte de certaines caractéristiques intrinsèques. Ce mouvement a démarré par une exaspération liée à  la hausse des taxes sur le carburant. C’est un mouvement populaire, spontané. Le Manifeste des gilets jaunes pour la France, qui circule sur Facebook me semble en saisir assez bien l’essence (« Marre du mépris »): rejet des élites (politiques et médiatiques), affirmation d’un peuple et de son identité, des terroirs, rejet de l’immigration massive et subie, rejet de la finance mondialisée. J’y retrouve assez bien le peuple que l’on ne voit pas dans les éternelles discussion entre « centre ville » et « banlieues ». Le peuple des moyennes et petites villes, le peuple de la campagne. Le peuple qui parle de quelque part, ancré.

    Bien sûr, il y a de multiples modèles mentaux, et perspectives, pour analyser et comprendre ce qui se joue. Bien sûr, chacune est en partie réductrice. Mais, voilà , j’ai à  vous proposer une analyse toute bête qui simplifie la question. A vous de me dire en commentaires si elle est simpliste ou non, et sur quels points…

    La colère est légitime

    Ma théorie est simple : la colère qui s’exprime dans le mouvement des gilets jaunes est une colère légitime, et qui parle du réel. Elle est en opposition avec des « élites » qui, avec tout un enrobage rhétorique, sont dans une forme d’idéologie permanente, d’utopie. Les gilets jaunes expriment une colère qui n’est pas neuve : elle couve depuis des dizaines d’années. Et j’ai la faiblesse de croire que deux éléments de la réalité rattrapent simplement le monde politique, via la colère des gilets jaunes, et le bon sens populaire. Je soutiens sans réserve les gilets jaunes, au titre de ces deux éléments, qui sont deux sujets connus de tous, mais qu’il est de bon ton de ne pas trop évoquer en société : c’est grossier de dire la vérité. Je vais donc l’écrire de manière très basique, très simple. Tout cela est connu, il y a des tonnes de livres et d’articles qui décrivent ce réel depuis longtemps. Ensuite, il y a ceux qui veulent voir, et ceux qui ne veulent pas voir.

    Identité vs multiculturalisme

    Le peuple a compris que le multiculturalisme est une impasse. On ne peut pas construire de force une culture abstraite, qui nie l’histoire, les traditions, les coutumes, des peuples. Se cristallisant par moment – et pour cause ! – sur l’islam politique, ce débat est plus vaste, et concerne simplement notre identité française. Nous sommes un pays occidental, judéo-greco-romano-chrétien. Nous sommes libéraux et universalistes. Dans notre pays, on est tolérants, libres de croire ou de ne pas croire, et les citoyens sont égaux devant la Loi. C’est simple, mais ça nous a pris plus de 2500 ans pour en arriver là . Ceux qui n’aiment pas ce qu’est la France sont libres d’aller vivre ailleurs. Il est temps de lire Levi-strauss, Braudel et Huntington.

    Liberté vs constructivisme

    Le peuple sait bien que l’Etat occupe une place beaucoup trop importante, délirante, dans la vie des citoyens. Réglementations étouffantes, fiscalité confiscatoire et incohérente, dépenses publiques mal évaluées, endettement honteux, nombres de fonctionnaires délirant. Cela nuit à  la liberté d’action, au niveau de vie du pays, cela créé du chômage, cela empêche la prospérité. La société ouverte et libre, c’est une société de coopération généralisée, via la division du travail et le partage du savoir. Il est grand temps que les idéologues/parasites qui veulent imposer un ordre social aux autres, d’en haut, disparaissent du jeu politique. Il est grand temps de comprendre que Von Mises et Hayek sont des penseurs mille fois plus justes que Marx.

    Fin du coup de gueule.

    Le peuple n’est insaisissable que l’on si l’on ne veut plus le regarder en face, ainsi que la réalité dans laquelle il est plongé. J’espère sincèrement pour Macron, et son gouvernement, que son allocution de ce soir sera pertinente, et parlera de ces deux éléments de la réalité, frontalement, sans faire du bla-bla de politicien. Je n’en suis pas sûr du tout.

  • Illibéralisme ?

    Illibéralisme ?

    Le dernier numéro de l’Incorrect est probablement le meilleur depuis le début. Il tape très fort en mettant l’accent sur ce qui se passe dans les pays de l’Est, et avec des interviews d’Eric Zemmour et Boualem Sansal. Et il m’a bousculé : dès l’édito de Jacques de Guillebon, La muselière, apparaît le mot illibéralisme. C’est un point de controverse récurrent avec mes amis de L’Incorrect : je suis le libéral de la bande, et ils n’entendent pas la liberté comme je l’entends.

    Bien sûr, il ne s’agit pas d’un tic de langage. Il s’agit d’un des thèmes mis en avant par Viktor Orban dans ses discours. Dire qu’il a théorisé l’illibéralisme, c’est tout de même un peu fort ; disons qu’il utilise le terme, et qu’il y a un mis un contenu. Le numéro du magazine m’a donc bousculé, énervé, et finalement m’a forcé à  réfléchir. Ce qui est le meilleur compliment que je puisse faire à  l’équipe de rédaction.

    Le libéralisme, bouc émissaire ?

    Raymond Boudon utilise également le terme illibéralisme pour désigner « cette théorie latente, souvent présente à  l’état semi-conscient, selon laquelle toute relation sociale conflictuelle serait un jeu à  somme nulle. Ce prisme d’analyse, très couramment utilisé, ignore qu’une possible coopération se cache derrière tout conflit […]». Rien à  voir, ou pas grand-chose avec ce dont il est question ici.

    Les opposants affichés au libéralisme font une sorte de gloubiboulga pour mettre sur le dos du libéralisme, tour à  tour : le consumérisme, la marchandisation du corps humain, l’abandon des frontières, Le libéralisme est devenu le bouc-émissaire idéologique par excellence.la perte d’identité. Et pourquoi pas la destruction de la planète, pendant qu’on y est ? Quelle boutade ! C’est la logique du bouc-émissaire, si bien décrite par René Girard : le libéralisme est devenu le bouc-émissaire idéologique par excellence. Comme l’avait bien décrit Christian Morel : quand il y a un problème, soit on cherche un coupable, le bouc émissaire, que l’on sacrifie pour exorciser le mal, soit on se comporte de manière rationnelle, et on cherche la manière de modifier nos modes de fonctionnements pour que le problème ne se pose pas à  nouveau dans quelques temps.

    Il est probablement commode de choisir le libéralisme comme bouc-émissaire. C’est surtout commode quand on vit dans une société dont le mode d’organisation, pacifique, ouvert, tolérant, libre, avec une égalité des citoyens devant la loi, doit à  peu près tout au libéralisme, et permet de dire à  peu près tout et n’importe quoi. Mais scier la branche sur laquelle on est assis n’a jamais constitué une manière adéquate de se comporter. Par ailleurs, choisir le libéralisme comme bouc-émissaire, c’est lui donner un caractère sacré, presque divin, qui n’est absolument pas juste intellectuellement. S’il y a une pensée rationnelle, peu idéologique, c’est bien le libéralisme. Sa vertu et sa cohérence doit probablement attiser des jalousies.

    Quelle est la fonction du bouc émissaire ? Celle d’expier les fautes pour le groupe, et de stopper la propagation de la violence. Ne sous-estimons pas les faits : le besoin et la recherche de bouc émissaire correspond à  une période sociale difficile, violente. Quelle est cette violence qui nécessite un bouc émissaire idéologique ? La vraie violence de la société d’abord, bien sûr. Les attentats. Le désarroi idéologique aussi, il me semble. Dans un époque où la vérité devient si difficile à  dire et à  discuter, où l’esprit rationnel et critique est si peu présent dans la société, il est probable que cette logique de victime expiatoire soit naturelle. Naturelle, mais dangereuse, car elle entretient une forme d’illusion de réglage des problèmes. On ne règle rien par la violence, et surtout pas dans la logique de bouc émissaire.

    Mais ça ne prend pas : intellectuellement, tout cela est du pipeau. Comment expliquer qu’il y a trop de libéralisme, dans un pays où l’état est omniprésent ? La libéralisme, c’est le respect de l’ordre spontané, la cattalaxie. La libéralisme, c’est la subsidiarité. Il n’y a pas grand chose dans la France de 2018 qui ressorte d’un excès de libéralisme.

    Est-on illibéral parce qu’on veut affirmer l’identité culturelle et historique de son pays ? Je ne crois pas, d’autant plus que notre identité culturelle est profondément occidentale et libérale.

    Les marxistes ont gagné ?

    Les marxistes ont réussi leur tour de force sémantique et idéologique : tout le monde, de l’extrême gauche à  l’extrême droite, rejette le libéralisme. La plupart du temps sans savoir ce que c’est. Mais la guerre idéologique est sur ce point, gagnée. Il est de bon ton, pour être audible, de cracher sur le libéralisme.

    Les vrais combats

    L’ennemi, on l’aura compris, n’est pas le libéralisme. Quel est-il ? Il y a, à  mon sens, deux choses qu’il s’agit de combattre, et qui ressortent d’un même trait, à  savoir une tendance à  l’excès : un excès d’ouverture à  des moeurs et éléments venant d’autres civilisations, et un excès dans l’expansion des droits à , qui est un trait de notre propre culture démocratique.

    Excès de tolérance

    Pour faire vite, par excès de tolérance à  la différence et dans une forme écoeurante de relativisme moral, nous avons laissé en France se développer des moeurs, et des modes de fonctionnement qui ne sont pas compatibles avec les valeurs occidentales. Les zones de non-droit, le communautarisme, la mise sous coupe réglée d’une partie de la communauté musulmane par les islamistes sont quelques exemples. Ces incompatibilités, ces différences, sont toujours au fond liées à  des différences de civilisations, donc de religion.
    En laissant se développer l’islam radical, par aveuglement anticlérical conduisant à  nier le fait religieux, on a provoqué un retour vers l’expression politique du fait religieux. Le christianisme doit-il s’engouffrer là -dedans ? Notre excès de tolérance nous a conduit à  tolérer des moeurs inacceptablesLes politiciens conservateurs, ou simplement amoureux de leur pays, doivent-ils nécessairement porter le drapeau d’une religion dans leurs combats politique ? Je ne le crois pas. Le christianisme, qui a inventé la laïcité, se perdrait dans ce jeu de dupes.
    C’est aux politiciens de lutter contre l’idéologie islamique, pas aux religieux. Ce faisant les catholiques et autres chrétiens tombent dans le piège redoutable d’accréditer l’idée selon laquelle l’islam serait une religion, au même titre que le christianisme. Ce qui est faux. Le christianisme est sécularisé. Le christianisme ne prône pas la guerre mais l’exemplarité, par la vertu. Sur les liens, entre politique, conservatisme et religions, je ne résiste pas à  citer un passage d’Hayek, grand philosophe, issu d’un article, « Why i am not conservative« , où il explique que le terme « libéral » a déjà  été tellement abîmé par la gauche qu’il hésite à  se dire encore « libéral ».
    Il y a cependant un aspect qui justifie de dire que le libéral occupe une position à  mi-chemin entre le socialiste et le conservateur: il est aussi éloigné du rationalisme brut du socialiste qui veut reconstruire toutes les institutions sociales selon un modèle prescrit par sa raison individuelle, que du mysticisme auquel le conservateur doit si souvent recourir. Ce que j’ai décrit comme la position libérale partage avec le conservatisme une méfiance envers la raison dans la mesure où le libéral est très conscient du fait que nous ne connaissons pas toutes les réponses, et qu’il n’est pas sûr que les réponses qu’il a sont certainement les bonnes ou même que nous pouvons trouver toutes les réponses. Il ne refuse pas non plus de demander de l’aide à  des institutions ou des habitudes non rationnelles qui ont fait leurs preuves. Le libéral se distingue du conservateur par sa volonté de faire face à  cette ignorance et d’admettre à  quel point nous savons peu de choses, sans revendiquer l’autorité de sources de connaissances surnaturelles là  où sa raison lui manque. Il faut bien admettre que, sous certains aspects, le libéral est fondamentalement un sceptique – mais avec suffisamment de modestie pour laisser les autres chercher leur bonheur à  leur manière et pour adhérer systématiquement à  cette tolérance qui est une caractéristique essentielle du libéralisme.

    Il n’y a aucune raison pour que ce besoin signifie une absence de croyance religieuse de la part des libéraux. À la différence du rationalisme de la Révolution française, le libéralisme vrai n’a rien contre la religion, et je ne peux que déplorer l’anticléricalisme militant et essentiellement illibéral qui animait le libéralisme continental du XIXe siècle. Le fait que cela n’est pas essentiel dans le libéralisme est clairement démontré par ses ancêtres anglais, les Old Whigs, qui, au contraire, étaient bien trop étroitement liés à  une croyance religieuse particulière. Ici, ce qui distingue le libéral du conservateur, c’est que, aussi profondes que soient ses croyances spirituelles, il ne se considérera jamais comme ayant le droit de les imposer aux autres et que, pour lui, le spirituel et le temporel sont des sphères différentes qui ne doivent pas être confondues.
    Notre excès de tolérance nous a conduit à  tolérer des moeurs inacceptables, à  commencer par la place de la femme dans l’islam, et par le rejet de la liberté de croyance, et de la laïcité. Rien de tout cela n’est attribuable au libéralisme.

    Expansion infinie des « droits à  … »

    Pierre Manent en a très bien parlé dans son dernier ouvrage. Notre culture démocratique nous a conduit à  accroître sans cesse l’exigence de nouveaux droits, qui dépassent maintenant largement les droits naturels qui avaient été explicités par les différents textes des révolutions libérales. Cet excès, interne à  l’Occident, et non plus externe, doit évidemment être combattu avec force. Je crois que c’est une partie de la discussion. Les dérives eugénistes, GPA, et autres délires transhumanistes, n’ont pas tellement de rapport avec le libéralisme, mais plutôt avec un manque d’éducation, de barrières morales délimitant le bien et le mal. Pas grand-chose à  voir avec le libéralisme.

    Il est tout de même piquant que ces deux choses (excès de tolérance, extension infinie des droits), que je crois lire dans les critiques du libéralisme, soient des excès ; alors que le libéralisme est une philosophie qui justement a pensé les limites que l’on devait poser au pouvoir et à  la liberté pour que la société soit juste. Le libéralisme est une pensée de la modération et de la régulation ; lui attribuer des excès est tout de même bien paradoxal, voire franchement ridicule.

    Libéral-conservatisme

    Combattre ces deux excès – excès de tolérance à  la différence, et excès d’extension des droits – doit être notre combat. Et si la cible est une partie de nos élites, alors critiquons les pour de vraies raisons… les tenants d’une Europe qui nierait l’identité des peuples ne pèchent pas par libéralisme, ils pèchent par manque d’enracinement dans leur propre histoire. C’est probablement une forme d’universalisme un peu abstrait et niant les particularismes que l’on pourrait leur reprocher, certainement pas leur libéralisme.

    Illibéralisme ou conservatisme ?

    Le petit encart de Benoît Dumoulin (p 58) pose très bien le débat. En gros, l’illibéralisme n’est pas opposé aux valeurs fondamentales du libéralisme, mais est simplement la forme actuelle « la plus aboutie du conservatisme ». Et l’on retombe sur l’éternel problème de la droite, qui décidément ne veut pas comprendre qu’elle doit être capable de faire la synthèse entre libéralisme et conservatisme, non pas de continuer à  opposer les deux.

    Il n’y a, à  mon sens, aucune incohérence dans une position politique libérale-conservatrice. Continuer à  opposer les deux, c’est manquer ce qui permettrait d’unifier, justement, la droite. Et le grand paradoxe de ce numéro de l’incorrect, c’est que Chantal Delsol, toujours passionnante, et connue pour son positionnement libéral-conservateur, rentre dans ce credo « illibéral », au lieu de nous aider à  articuler les deux, et d’être ainsi la cheville ouvrière de l’union des droites.

    La tolérance et les droits naturels sont au coeur de la pensée libérale. Il suffit pour cela de relire cette très belle phrase du préambule de la Déclaration d’indépendance américaine :

    Nous tenons pour évidentes pour elles-mêmes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux ; ils sont doués par le Créateur de certains droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur.

    C’est l’excès de tolérance dont nous avons collectivement fait preuve qui fait du libéralisme une cible. Mais ni la tolérance, ni la liberté, ne doivent devenir nos ennemis. Ce sont de belles choses. Battons-nous contre ce qui n’est pas tolérable (y compris la tolérance à  l’intolérable), et n’unissons pas nos cris à  ceux qui ne visent qu’une forme ou une autre d’asservissement.

    Il appartient aux intellectuels de droite ou de gauche, de France et de Navarre, d’articuler tout cela et de penser les tensions et les paradoxes : l’universel et le particulier, la tolérance et l’identité, la liberté et l’égalité.

    L’illibéralisme n’est pas le bon outil conceptuel. Qu’Orban soit un allié potentiel pour réinventer une Europe qui assume son identité, c’est une chose. Cela ne fait pas de l’illibéralisme, mot niant la liberté, un idéal intéressant.

  • La loi naturelle et les Droits de l’Homme

    La loi naturelle et les Droits de l’Homme

    Je viens de terminer le recueil de six conférences que Pierre Manent a donné, en mars 2018, dans le cadre de la Chaire Etienne Gilson, publié sous le titre « La loi naturelle et les Droits de l’Homme ». J’avais déjà  eu l’occasion de faire la recension ici d’un de ses livres (Situation de la France), et j’ai retrouvé avec plaisir ce penseur rigoureux, sincère, et épris de vérité. Mon modeste billet reviendra sur quelques points clés de ce livre, et quelques interrogations qu’il a provoqué. Pour en savoir plus, et mieux, je vous recommande d’aller lire la très bonne interview de Pierre Manent par Valeurs Actuelles, ou encore, mais c’est antérieur à  ce livre, le dialogue mémorable organisé par le magazine L’incorrect entre Pierre Manent et Rémi Brague.

    Eléments

    Pierre Manent décrit comment la logique de « droits » attachés à  la personne humaine a constitué une rupture, pour le pire et pour le meilleur. Il revient surtout sur le pire dans son livre. Notamment un point essentiel : en passant aux Droits de l’Homme, on a mis le doigt dans une évolution complexe, faisant glisser le rapport à  la nature d’un point de vue à  un autre. Dans l’idée d’une loi naturelle, il y avait une forme d’acceptation de « règles » données/à  découvrir/à  suivre. La Loi naturelle, c’est selon Pierre Manent :

    cet ensemble de règles qui ordonnent nécessairement la vie humaine et que pourtant les hommes n’ont pas faites. Ce sont les règles qui à  la fois fixent des limites et offrent des orientations à  notre liberté. Elles sont données à  l’homme avec sa nature et sa condition.

    La liberté sans limites

    Avec la notion de droits attachés à  chaque personne, nous changeons la perspective : même si les deux notions (loi naturelle et droits naturels) sont proches, la logique de droits naturels récuse celle de Loi naturelle et nous fait entrer dans une logique de « pure liberté, comme capacité illimitée d’ordonner à  notre guise la vie humaine. La revendication, virulente et même féroce, de cette pure liberté, de cette capacité illimitée, nous livre à  l’arbitraire d’une volonté prétendant tirer d’elle-même sa règle. Au bout du compte, s’il n’y a pas de ”loi naturelle », il n’y a rien pour guider la liberté humaine. La loi naturelle est la seule défense sérieuse contre le nihilisme. »
    Fort de ce point de départ, Pierre Manent aborde entre autres les points suivants :

    • la logique de droits de l’homme introduit la notion d’individu (plutôt que de personne), c’est-à -dire une sorte d’atome abstrait, portant l’intégralité du potentiel humain. Faisant fi de toutes les différences culturelles et individuelles, ce concept d’individu, très générique, et très abstrait, utile pour penser l’universel, manque une partie de ce que sont les humains de fait, pour mettre en avant une égalité totale (de droits), visant un idéal. Cela sépare le réel (l’être) et l’idéal (le devoir être), en rendant presque impossible la réconciliation des deux, puisque l’idéal est dessiné sur un modèle abstrait et partiel de l’humain.
    • Le droit qui décrivait adossé à  la Loi, une frontière principalement négative (ce qu’on ne peut pas faire), devient le domaine de l’expression de tout ce que les humains ressentent et désirent. Les droits deviennent un outil pour légitimer tout ce que nous voulons être. L’exemple du mariage gay analysé par Pierre Manent décrit très bien tout cela, avec notamment la perte de la nuance entre privé/intime et public. Pour revendiquer le « droit à « , chacun est sommé d’étaler sur la place publique son intimité, ses ressentis, sa vie privée.
    • La notion d’autonomie, si prisée à  notre époque, est très critiquée par Manent, comme étant partiellement sans aucun sens lorsqu’on parle d’un individu : l’autonomie ne peut se concevoir, pour un humain, que dans un cadre qui délimite son action (cadre au sens large, c’est-à -dire règles et contraintes structurant l’action). Se donner à  soi-même sa propre loi (ce qui est le sens de l’autonomie) n’a pas de sens puisque nos actions dépendent de lois (dont la loi naturelle) qui ne sont pas créés par l’homme.

    Logique d’action

    En fin connaisseur de Machiavel, Pierre Manent propose une voie pour sortir de tous ces délires : penser à  nouveau l’individu comme un être agissant, et donc toujours intégrer dans la réflexion sur la loi et les règles, ainsi que dans le champ de la morale, des éléments de ce qu’est l’action.

    • la première notion importante est celle du couple commandement/obéissance. Il n’y pas d’action sans commandement, et obéissance. Que l’on veuille distinguer ces modes d’actions ou non, ils sont présents. Les structures de commandement/décision sont toujours là , les endroits où c’est l’obéissance aussi (à  la loi, aux régles, aux dirigeants, etc…). Notre pensée de l’action est limitée par la non-prise en compte de ces éléments.
    • Pierre Manent propose également de revenir aux motifs humains de l’action. Trois éléments permettent de décrire les critères de valeur de nos actes : l’utile, l’agréable, et le noble (juste, bon, honnête). Ces 3 piliers sont les motivations de nos actes, et doivent permettre de sortir de l’éternelle tension entre être et devoir-être (ce qu’est la morale finalement), pour se recentrer sur des choses plus pragmatiques, plus dans l’action.

    Interrogations

    Tous ces éléments me paraissent très utiles, et pertinents. Je partage maintenant avec vous quelques interrogations, et critiques qui me sont venues à  la lecture de cet excellent livre.

    • une critique tout d’abord, qui est le pendant des qualités du livre : analytique, rigoureux, mais au point d’en être impersonnel. A de nombreuses reprises, la situation philosophique que décrit Pierre Manent nous révolte, et on sent qu’il ne l’approuve pas (notamment la manière de penser des individus coupés de tout contexte, dont les droits sont uniquement des moyens de se faire croire que l’on peut être ce que l’on désire). Mais on n’a jamais sa position à  lui. Il reste curieusement en retrait, dans une position compréhensible de chercheur, qui regarde tout cela de loin. Il manque du Pierre Manent dans son livre.
    • La charge portée en fin de livre contre le libéralisme me parait assez fragile, et peu convaincante. D’une part parce qu’il critique le libéralisme comme étant porteur de cette vision extensive des « droits à « , ce qui est loin d’être vrai. Par ailleurs, il regarde tous les sujets du point de vue d’une réflexion sur l’Etat, ce qui limite considérablement la portée du propos : la société ne résume pas aux structures législatives et de commandement portée par le gouvernement ou les assemblées représentatives. Pierre Manent dit ouvertement ne pas penser utile la notion d’ordre spontané, ou catallaxie. A nouveau, un vrai point aveugle dans sa pensée, très constructiviste, et qui manque toute la réflexion puissante et importante des libéraux de l’école autrichienne, notamment la pensée développée par Hayek dans « Droit, législation et liberté », portant sur les institutions, leur évolution, et ce que l’on peut mettre dans les notions de lois et de réglementation. Par ailleurs, il laisse penser que le libéralisme est une philosophie qui voit la liberté comme une sorte d’absolu sans limite, ce qui n’est absolument pas le cas. Le libéralisme considère que la liberté ne va pas sans le respect des règles communes, qui s’appuient notamment sur des institutions sociales comme la propriété et la responsabilité. Il manque la pensée libérale dans sa réflexion, ce qui est assez surprenant quand on prétend la critiquer et l’affubler d’un certain nombre de maux.
    • Un dernier point : dire qu’un des motifs de l’action humaine est la recherche de l’action noble (juste, bonne, etc…) me convient très bien. Mais comment définit-on le « noble » et le « bon » ? On ne peut pas discuter de cette question, surtout avec une logique d’action, sans rentrer dans le contenu de ce terme. Des humains jugent noble et juste de tuer pour faire gagner leur cause : peut-on mettre ce « noble »-là , au même niveau que le commandement « Tu ne tueras point » ? Certainement pas. Il faut donc assumer que le contenu positif mis en avant pour penser le « devoir-être » n’est pas un simple paramètre interchangeable. C’est le coeur de la discussion, escamoté il me semble par Manent. Il manque un peu de courage peut-être à  Pierre Manent pour ne pas tomber dans une forme de relativisme. Tout ne se vaut pas. Si l’on veut parler de visée universaliste, il faut assumer que certaines cultures sont plus aptes que d’autres à  dégager des valeurs/règles/structures universelles. Ce n’est pas juger les individus qui en ressortent que d’affirmer cela, c’est simplement continuer à  vouloir chercher la vérité. L’universalisme, qui est le sujet du livre, contient (dans tous les sens du terme) un impérialisme : si quelque chose est « bon » (noble, honnête, juste) universellement, alors souhaitons que ce « bon » devienne la règle. L’universalisme est en tension avec le respect des différences culturelles : ne pas en discuter limite la portée de la discussion.

    Bref : très bon livre, riche de notions complexes rigoureusement exposées, mais manquant d’ampleur et de prise de position.

  • Politique et éthique [bis]

    Politique et éthique [bis]

    J’avais il y a quelque temps publié un article pour essayer de dégager/construire une grille de positionnement politique. Les commentaires (et les discussions avec certains en chair et en os) m’avaient conduit à  chercher un peu plus, et à  rencontrer le cadre conceptuel d’Arnold Kling.

    Cadre conceptuel d’Arnold Kling

    J’étais tombé sur le blog de Nicomaque (alias Damien Theillier), que j’ai eu la chance de côtoyer à  l’époque de mon activité de blogueur politique (LHC et compagnie). L’article en question revient sur le découpage proposé par Arnold Kling, économiste et membre du CATO institute. Ce découpage consiste à  expliquer qu’il existe trois types de pensées politiques : conservatrice, progressiste et libérale. Chacune ayant sa grille de lecture, sa tension centrale, son axe entre un Bien et un Mal. Ces différentes grilles de lecture du monde expliquent en partie la difficulté de dialoguer entre courants politiques. Je vous invite à  lire l’article de Nicomaque en entier, il vaut le détour. Pour rappel je recolle ici les tensions identifiées par Kling :

    PROGRESSISME
    Opprimés <————————-> Oppresseurs

    CONSERVATISME
    Civilisation <————————-> Barbarie

    LIBÉRALISME
    Libre-choix <————————-> Coercition

    Adaptation et mise en image

    Je les ai modifiées un peu, car je trouvais intéressant les points suivants :

    • chaque tension peut être lue comme un axe Bien/Mal. J’ai donc modifiée celui des progressistes pour le formuler avec un Mal (l’oppression) et un Bien (l’Egalité). De même, pour les libéraux, étant connaisseur de la pensée libérale, le terme de coercition me parait inadapté. Les libéraux ne sont pas contre l’application de la Loi, ils sont contre son extension infinie par la réglementation constructiviste. J’ai donc choisi le terme d’irresponsabilité (un peu faible, mais qui décrit mieux le positionnement libéral).
    • Un axe Bien/Mal m’a envoyé dans un registre moral, au sens propre du terme. Qu’est-ce que la morale, si ce n’est cette tension entre l’être et le devoir-être ? L’être, c’est le réel. Et le devoir-être, c’est le monde de l’idéal visé. Intéressant pour tempérer les velléités idéologiques. Rester relié au réel, bien sûr. Mais aussi accepter que les autres courants de pensée disent quelque chose de ce réel qui est tout aussi recevable.
    • j’ai tenté de formuler ce qui peut être commun aux courants de pensée (pris deux à  deux) sur les bords du triangle. Par construction, chaque courant trouverait ce qui l’oppose aux deux autres sur le bord opposé du triangle.

    Le résultat est la figure qui illustre l’article. Qu’en pensez-vous ? Est-ce que cela fonctionne à  votre avis ? Seriez-vous capable de vous positionner dans un des courants ? Lequel est le plus loin de vous ? Dans mon cas, cela fonctionne pas trop mal. Je me sens libéral-conservateur (si je devais choisir, car par ailleurs je crois au Progrès…)

  • Politique et éthique : proposition de segmentation

    Politique et éthique : proposition de segmentation

    [note de l’auteur : billet mis à  jour suite aux échanges en commentaires… la discussion continue !]
    J’ai souvent le sentiment que les discussions politiques s’enlisent à  cause d’un manque de précision dans les termes. Par ailleurs j’aime la controverse, qui se nourrit des différences de points de vue : explicitons-les ! Dans cet esprit, j’ai essayé de trouver 2 oppositions fortes, structurantes, qui permettraient à  chacun de se positionner philosophiquement dans le champ politique.
    Le but de couples opposés n’est pas de forcer à  choisir : chacun des termes contient sa part de vérité, et le travail intellectuel qui nous incombe n’est pas de se positionner d’un côté ou de l’autre, en prétendant que l’autre est faux, mais de travailler à  l’articulation de ces contraires.

    Universalisme / Relativisme

    La première tension à  laquelle chacun apporte comme il peut des éléments de réponse, c’est celle existant entre une logique universaliste (certaines valeurs transcendent les différences culturelles et sont valables pour tous les humains), et une logique relativiste (chaque personne humaine doit être considérée dans sa particularité, sa spécificité culturelle). L’universalisme met l’accent sur une égalité de droit entre tous les humains, quand la logique relativiste privilégie le respect des différences.
    Il est assez difficile de concilier ces deux visions : elles s’excluent mutuellement, logiquement. Il y a certainement des outils de pensée pour articuler ces deux pôles.

    Collectivisme / individualisme

    La seconde tension est celle résultant des morceaux de vérité contenus par l’individualisme d’une part, et le collectivisme d’autre part. L’individualisme est une pensée du droit, et de l’ordre ouvert spontanée d’une société basée sur la liberté, tandis que le collectivisme justifie une organisation plus centralisée de la société, notamment pour organiser la solidarité entre ses membres, et penser l’organisation collective.
    Le collectivisme vise à  la justice sociale et à  la cohésion du groupe, tandis que l’individualisme pose la liberté comme fin en soi.
    Un outil utile pour réconcilier ces deux pôles me semble être la notion de subsidiarité. C’est en gros la liberté à  chaque niveau de décision, en commençant par l’individu, d’organiser les choses jusqu’à  ce qu’un échelon plus large soit nécessaire. L’organisation sociale y est légitime, mais en partant des besoins et de la liberté des personnes, et/ou des groupes. C’est à  la fois une pensée de l’action libre au bon niveau, ET une prise en compte de constructions sociales dépassant l’individu.

    En se positionnant sur ces deux axes on obtient le schéma suivant. J’ai fait figurer en rouge les risques ou travers de chaque position, en bleu les valeurs ultimes, et en vert le registre d’éthique mobilisé.
    Il ne me reste plus qu’à  inventer un petit questionnaire court, permettant en une dizaine de questions, de se positionner sur ce tableau. Ce serait une bonne manière d’en tester la pertinence, non ? Surtout, surtout, n’hésitez pas à  « boxer » ce schéma, et ce post : j’aimerai rendre robuste ce modèle, et j’accepterai tout à  fait qu’il soit en partie faux.
    J’ai continué la réflexion avec le découpage de Kling