Étiquette : Vérité

  • La vérité peut-elle se partager ?

    La vérité peut-elle se partager ?

    C’est une petite réflexion qui est venu suite à  certains commentaires sur un billet précédent. J’expliquais que je votais avec mon cerveau, pas avec une conviction ou des sentiments. Ce à  quoi Babas répondait ceci :

    Un dernier point, je ne vote pas avec mon cerveau mais avec mon impression. Je pars du principe que toutes les informations sont tronquées orientées manipulées par l’émetteur , le transmetteur et même le recepteur. A partir de là , je moyenne de façon totalement subjective.

    Nous avons rediscuté de ça entre frangins ce week-end, et Simon me disait qu’il pensait ça aussi. Personnellement je ne suis pas trop d’accord ; mais la discussion était intéressante. On en arrive assez rapidement à  la question du titre : « La vérité peut-elle se partager ? ». J’avais fait un petit article, il y a quelques temps, sur ma vision des rapports entre réalité et vérité. On y trouvait ces deux définitions :

    Réalité :
    ce qui existe indépendamment du sujet, ce qui n’est pas le produit de la pensée.

    Vérité :
    1. Scientifique : connaissance reconnue comme juste, comme conforme à  son objet et possédant à  ce titre une valeur absolue, ultime
    2. Philosophie : norme, principe de rectitude, de sagesse considéré(e) comme un idéal dans l’ordre de la pensée ou de l’action
    3. Logique : conformité de la pensée ou de son expression avec son objet

    Je concluais qu’il fallait essayer, autant que faire se peut, de rapprocher la réalité et notre vérité.
    Rappeler et souligner l’incapacité de l’être humain à  communiquer totalement, j’en suis bien d’accord : qui pourrait nier cela ?
    Mais dire que pour cette raison-là , on vote sur des impressions uniquement, je n’en suis pas d’accord. Bien sûr, la part de l’impression n’est pas nulle : tout le monde est influencé par la tête du candidat, sa manière de parler, et tout un tas de facteurs conscients ou inconscients liés au candidat, à  notre histoire personnelle, et à  la tonalité des médias qui transmettent ces informations. Mais on ne peut pas s’arrêter à  cette constation : ce n’est pas parce que quelque chose est important, que nous devons nous y arrêter et considérer que c’est le seul facteur. Les arguments rationnels, la réflexion que l’on peut mener sur le monde qui nous entoure, sur les rapports de force existants, sur le sens dans lequel les choses évoluent sont aussi une part importante du choix d’un bulletin de vote. II clair que nous sommes des animaux (qui pourrait le nier ?), avec notre part d’impulsion inconsciente, notre part d’impression (pour reprendre le mot de Babas). Mais nous sommes aussi doués de raison, et capables – dans une certaine mesure, peut-être très restreinte – d’intégrer des faits dans un raisonnement et nous extirper, ne serait-ce qu’un peu, des jugements a priori et du conditionnement médiatique, familial, sociétal. Non ?

    Mettre l’accent sur ce qui gêne la communication et la transmission d’idée, c’est oublier de le mettre sur ce qui permet la communication et la transmission d’idée : les faits, les arguments rationnels qui nous relient au travers de ce qu’on pourrait appeler la réalité. Il y autant de vérité que d’êtres humains, mais il n’y a qu’une réalité. Et c’est de cette réalité là  dont on parle, il me semble, lorsque l’on choisit un bulletin de vote pour le mettre dans l’urne. L’acte de voter est un acte réfléchi, et le contraire de la passion. La passion, en politique, ce sont les armes, les combats. La raison, en politique, c’est le vote et la réflexion ; l’acceptation de la raison des plus nombreux est un pas énorme vers moins de conflits et plus de débats rationnels. Qu’en pensez-vous ?

    La politique est le lieu de la pensée où l’on met en relation la réalité et des valeurs ; j’ai l’impression que, souvent, l’absence d’effort pour regarder la réalité « comme elle est » empêche de se rendre compte que sur les valeurs, nous sommes beaucoup plus proches les uns des autres que nous le pensons. C’est cela, ce que je voulais dire en expliquant que je votais avec ma raison : faisons ensemble un constat partagé sur la réalité des faits, et les différences de valeur ne seront, bien souvent, plus un problème mais une richesse.

    Il n’y a qu’une seule et même raison pour tous les hommes ; ils ne deviennent étrangers et impénétrables les uns aux autres que lorsqu’ils s’en écartent.
    Simone Weil

  • Idéologie incompétente contre pragmatisme volontaire

    Fameux débat hier soir ! Le débat n’a pas été trop lissé, je trouve. Les commentateurs soulignent la combativité de Royal et la mise sur la défensive de Sarkozy (les pro-Royal), d’autres la perte de sang-froid de Royal et le Zen de Sarkzoy (les pro-Sarkozy). J’ai personnellement eu beaucoup plus l’impression d’un rouleau compresseur qui écrasait une brindille, ou un courant d’air.
    J’ai noté pour ma part l’excellente gestion du temps de Sarkozy qui – dès le début – a réussi à  gagner quelques minutes de temps de paroles qu’il a systématiquent conservées et qui lui permettaient, sur tous les sujets, de commencer par donner sa vision, laisser Royal parler, puis conclure. Deux interventions sur chaque sujet pour encadrer celle de Royal, avec un temps total identique : chapeau !
    Nous avons noté également trois petites entorses aux règles CSA : deux fois on a aperçu Royal pendant que Sarkozy parlait, et une fois PPDA a dit à  Royal « oui, mais si vous ne répondez pas aux questions… ».
    Ce qui me semble plus important, c’est que sur quasiment tous les sujets, Royal ne répondait pas aux questions posées, et refusait de rentrer dans le détail. Tactique ? Incompétence ? la question reste ouverte pour certains. Sarkozy donne tout de même une impression de connaissance des dossiers plus flagrante.
    Sur quasiment tout les sujets, Royal propose une discussion entre les partenaires sociaux. Un peu court comme politique, non ? Il ne me semble pas que ce soit les syndicats qui sont les candidats à  la présidentielle…
    J’ai surtout vu dans ce débat l’opposition entre l’idéologie et le pragmatisme, entre les voeux pieux et la volonté, entre l’incantation socialisante et le libéralisme modéré.
    Vous me direz que je suis partisan ? oui, c’est vrai : je suis toujours partisan de la raison, du pragmatisme, de la vérité au-dessus de l’idéologie, de la compétence et de la culture du résultat. Et c’est pour ça que j’espère que le vainqueur, au final, ce sera Sarkozy, qui porte ces valeurs.

  • Information, opinion publique et propagande…

    Information, opinion publique et propagande…

    Medias et Information

    Pour approfondir un peu la conclusion de mon billet sur le CSA, je suis allé chercher quelques définitions pour voir quelle distinction objective on peut mettre entre information factuelle et opinion (je trouvais que la scission entre les deux n’étaient pas très claire dans la plupart des médias français).
    Commençons par définir « média » tout d’abord (étymologie : moyen, c’est-à -dire « moyen de transmission ») ; j’ai eu la surprise de voir que média est le raccourci pour « mass média ».

    MASS-MEDIA :
    Ensemble des moyens de diffusion de masse de l’information, de la publicité et de la culture, c’est-à -dire des techniques et des instruments audiovisuels et graphiques, capables de transmettre rapidement le même message à  destination d’un public très nombreux.

    Les médias diffusent l’information ; jusque là , rien de bien surprenant. Qu’est-ce que l’information ?

    INFORMATION:

    1. Ensemble des activités qui ont pour objet la collecte, le traitement et la diffusion des nouvelles auprès du public.
    2. Faits, événements nouveaux, en tant qu’ils sont connus, devenus publics.
    3. Ensemble de connaissances réunies sur un sujet déterminé.

    L’information, c’est donc ce qui a un caractère nouveau, factuel et public.
    C’est également des connaissances réunies sur un sujet donné : un dossier préparé sur un thème donné, un travail de synthèse, c’est aussi de l’information. Il me semble assez évident que le travail de base des journalistes est assez bien décrit par cette définition de l’information, non ?

    Opinions individuelles et collectives

    Voyons maintenant ce qu’est une opinion, pour préciser un peu la frontière entre l’information et l’opinion. L’opinion est définie selon deux grands axes : les opinions individuelles et les opinions collectives.

    OPINION:

    • sous l’angle individuel :
      1. Manière de penser sur un sujet ou un ensemble de sujets, jugement personnel que l’on porte sur une question, qui n’implique pas que ce jugement soit obligatoirement juste
      2. Point de vue, position précise que l’on a dans un domaine particulier: social, religieux, politique, intellectuel.
      3. PHILOS., LOG.État d’esprit qui consiste à  reconnaître le caractère subjectif de la connaissance que l’on a d’une chose, en inclinant à  penser que cette connaissance se rapproche de la vérité tout en admettant qu’on se trompe peut-être.
    • sous l’angle collectif :
      1. Jugement collectif, type de pensée, ensemble d’idées partagées par un groupe humain sur un sujet ou un ensemble de sujets.
      2. Ensemble des attitudes morales, intellectuelles et sociales dominant dans une société, dans la manière dont elles se manifestent, s’appréhendent ou s’évaluent.

    Tout de suite on peut remarquer deux choses :

    • les journalistes devraient avoir pour règle déontologique stricte de garder leurs opinions personnelles pour eux, ou au moins prévenir quand ils donnent un avis, une position personnelle ; pour cet aspect je pense que la neutralité est à  peu près respectée (sinon aucun journaliste n’irait interviewer Le Pen, par exemple)
    • il est extrêmement difficile de ne pas décrire la réalité sans faire intervenir une part de l’opinion collective ; ce devrait être cependant être une ligne de conduite exigée par l’honnêteté intellectuelle : pour rester dans l’information factuelle, le journaliste doit savoir prendre de la hauteur par rapport aux attitudes morales, intellectuelles et sociales dominantes ! L’orientation des interviews, le point de vue déformé donné aux faits, le choix même des sujets est souvent l’expression d’opinions collectives…un exemple : j’ai vu l’autre jour un reportage où les journalistes allaient rencontrer des électeurs du FN. Ils étaient pistés, presque traqués, avec en fond comme une sorte de message subliminal « l’électeur du FN se cache, c’est normal il a honte de voter pour Le Pen »…je n’ai jamais vu un reportage où on allait chercher, pour les montrer comme des bêtes curieuses, les électeurs de Besancenot ou Laguiller, qui votent pourtant pour des candidats ayant des idées tout aussi renfermées, dangereuses et passéistes.

    Le problème avec les opinions collectives et les médias, c’est qu’il y a un renforcement mutuel : les médias peuvent colporter les opinions collectives, mais les fabriquent également. Comme de plus ils cherchent à  les flatter pour gagner de l’audience, un message factuel et objectif devient difficile à  faire passer…

    Et la propagande, dans tout ça ?

    A force de ne pas faire attention aux interactions entre les opinions collectives ou personnelles et les focus qu’ils mettent sur l’actualité, les journalistes pourraient-ils tomber dans la propagande ?

    PROPAGANDE :
    SC. SOC. ET POL., courant.Action psychologique qui met en oeuvre tous les moyens d’information pour propager une doctrine, créer un mouvement d’opinion et susciter une décision.

    Il semble bien au vu de la définition, que la réponse est oui : à  force de ne pas faire proprement le tri entre opinions personnelles, opinions collectives et information, les journalistes — parce qu’ils font partie du système d’information — prennent le risque de participer, sciemment ou non, à  une action psychologique propre à  créer un mouvement d’opinion, c’est-à -dire à  faire de la propagande. A nous d’être vigilants face aux messages véhiculés directement ou pas par les médias !
    Source des définitions : Dictionnaire LEXILOGOS

  • L’idéal comme guide d’action

    L’idéal comme guide d’action

    La définition de l’idéal montre deux utilisations possibles que l’on peut en faire :

    IDEAL :
    Ce que l’on conçoit comme conforme à  la perfection et que l’on donne comme but ou comme norme à  sa pensée ou son action dans quelque domaine que ce soit.

    Toute la nuance réside dans le ou (que j’ai mis en gras). Utilisé comme un mètre-étalon (la norme), et c’est la meilleure manière d’être malheureux : c’est le pessimisme; utilisé comme un but, c’est la voie de l’action et du bonheur : c’est l’optimisme.
    Sur le constat, un optimiste et un pessimiste peuvent être d’accord : le monde est injuste, dur, cruel, tragique, plein de menaces, mais aussi beau, riche de la nature et des hommes, plein de promesses.
    Nous sommes tous un peu pessimistes et optimistes :

    Le pessimisme de la connaissance n’empêche pas l’optimisme de la volonté.
    Antonio Gramsci

    Mais la connaissance du monde doit inclure ce qu’il y a de bien dedans, et ce qui pourrait en naître de positif…

    Pourquoi ce qui est beau ne devrait-il pas être vrai ? Quel pessimisme dans ces simples mots !
    Mark Fisher

    J’ai l’impression que dans le pessimisme, il y a comme une manière de partir de l’idéal et d’aller vers le monde réel : quelle déception ! Dans l’attitude optimiste, au contraire, le point de départ est le monde réel et on utilise l’idéal comme un but, une visée : quel guide efficace pour l’action !
    Alors soyons lucides sur l’état du monde (en ne laissant pas de côté la beauté, l’amour, la sincérité, l’échange qui font aussi partie du monde), et utilisons l’idéal non pas pour broyer du noir, mais pour regarder ensemble dans la même direction.

    Un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, un optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté.
    Winston Churchill

  • Eloge de la simplicité

    Complexité du monde, nécessaire simplicité

    Le monde est extraordinairement complexe. Les humains sont extraordinairement complexes. Vouloir appréhender le monde nécessite d’intégrer une certaine complexité. On ne peut évidemment pas résumer le monde entier et la condition humaine en une phrase. Mais pour qui veut une certaine efficacité dans l’action, il est nécessaire de savoir simplifier. Simplifier, c’est viser la simplicité, et non pas oublier la complexité.

    La simplicité n’a pas besoin d’être simple, mais du complexe resserré et synthétisé.
    [Alfred Jarry]

    Simplifier ce qui ne l’est pas : mariage de notre vérité et du monde

    Tout le travail de la connaissance — scientifique ou non — est de simplifier. Le monde n’est pas plus simple parce qu’on opère des simplifications, c’est notre vision qui en est modifiée. La simplicité ne peut exister que pour un être pensant.

    Il n’y a pas de simplicité véritable. Il n’y a que des simplifications.
    [Léon-Paul Fargue]

    La simplicité n’est donc pas un état du monde (puisqu’il est complexe), mais donc un travail à  accomplir.

    La simplicité est en définitive très difficile à  atteindre. Elle repose sur l’attention, la pensée, le savoir et la patience.
    [John Pawson]

    Comme tout travail, il n’a pas de fin. Et comme tout travail bien mené, il est source de bonheur. C’est parce que le monde est complexe, difficile, tourmenté, que nous devons essayer de le penser simplement. C’est une voie de sagesse, à  mon avis. Vouloir faire coller sa vérité avec la complexité du monde en compliquant sa vérité est une erreur. Au contraire, il faut choisir, et simplifier la complexité de notre conception du monde.

    L’homme devrait mettre autant d’ardeur à  simplifier sa vie qu’il en met à  la compliquer.
    [Henri Bergson]

    L’art de vivre pleinement ne consiste pas tant à  compliquer les choses simples qu’à  simplifier celles qui ne le sont pas.
    [François Hertel]

    Sagesse de la liberté et du choix

    Alors, bien sûr, choisir la simplicité implique d’exclure des choses. Cela implique de savoir faire le deuil des branches multiples pour conserver les plus solides. La jeunesse accueille plus facilement la complexité du monde sans trancher. C’est quelque chose que l’on apprend en vieillissant, parce qu’on se construit en faisant des choix :

    Vieillir c’est simplifier.
    [Daniel Thibault]

    Chance et volonté de simplicité : clef du bonheur ?

    Viser la simplicité est un chemin de bonheur : et comme le bonheur, c’est exigeant mais indispensable. C’est la seule manière de marier notre vérité à  la réalité du monde.
    Rencontrer quelqu’un avec qui la vie est simple, c’est peut-être la plus belle chose qui puisse arriver. C’est ce qui m’est arrivé avec Ben’. Chance de la rencontre, et désir réciproque de simplicité dans les relations.

    Il y a quelques rencontres dans la vie où la vérité et la simplicité sont le meilleur manège du monde.
    [Jean de La Bruyère]

  • Citation #4

    Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereux que les mensonges.

    Nietzsche (1844-1900) philosophe, critique culturel, compositeur, poète, écrivain et philologue allemand