Medias et Information
Pour approfondir un peu la conclusion de mon billet sur le CSA, je suis allé chercher quelques définitions pour voir quelle distinction objective on peut mettre entre information factuelle et opinion (je trouvais que la scission entre les deux n’étaient pas très claire dans la plupart des médias français).
Commençons par définir « média » tout d’abord (étymologie : moyen, c’est-à -dire « moyen de transmission ») ; j’ai eu la surprise de voir que média est le raccourci pour « mass média ».
MASS-MEDIA :
Ensemble des moyens de diffusion de masse de l’information, de la publicité et de la culture, c’est-à -dire des techniques et des instruments audiovisuels et graphiques, capables de transmettre rapidement le même message à destination d’un public très nombreux.
Les médias diffusent l’information ; jusque là , rien de bien surprenant. Qu’est-ce que l’information ?
INFORMATION:
- Ensemble des activités qui ont pour objet la collecte, le traitement et la diffusion des nouvelles auprès du public.
- Faits, événements nouveaux, en tant qu’ils sont connus, devenus publics.
- Ensemble de connaissances réunies sur un sujet déterminé.
L’information, c’est donc ce qui a un caractère nouveau, factuel et public.
C’est également des connaissances réunies sur un sujet donné : un dossier préparé sur un thème donné, un travail de synthèse, c’est aussi de l’information. Il me semble assez évident que le travail de base des journalistes est assez bien décrit par cette définition de l’information, non ?
Opinions individuelles et collectives
Voyons maintenant ce qu’est une opinion, pour préciser un peu la frontière entre l’information et l’opinion. L’opinion est définie selon deux grands axes : les opinions individuelles et les opinions collectives.
- sous l’angle individuel :
- Manière de penser sur un sujet ou un ensemble de sujets, jugement personnel que l’on porte sur une question, qui n’implique pas que ce jugement soit obligatoirement juste
- Point de vue, position précise que l’on a dans un domaine particulier: social, religieux, politique, intellectuel.
- PHILOS., LOG.État d’esprit qui consiste à reconnaître le caractère subjectif de la connaissance que l’on a d’une chose, en inclinant à penser que cette connaissance se rapproche de la vérité tout en admettant qu’on se trompe peut-être.
- sous l’angle collectif :
- Jugement collectif, type de pensée, ensemble d’idées partagées par un groupe humain sur un sujet ou un ensemble de sujets.
- Ensemble des attitudes morales, intellectuelles et sociales dominant dans une société, dans la manière dont elles se manifestent, s’appréhendent ou s’évaluent.
Tout de suite on peut remarquer deux choses :
- les journalistes devraient avoir pour règle déontologique stricte de garder leurs opinions personnelles pour eux, ou au moins prévenir quand ils donnent un avis, une position personnelle ; pour cet aspect je pense que la neutralité est à peu près respectée (sinon aucun journaliste n’irait interviewer Le Pen, par exemple)
- il est extrêmement difficile de ne pas décrire la réalité sans faire intervenir une part de l’opinion collective ; ce devrait être cependant être une ligne de conduite exigée par l’honnêteté intellectuelle : pour rester dans l’information factuelle, le journaliste doit savoir prendre de la hauteur par rapport aux attitudes morales, intellectuelles et sociales dominantes ! L’orientation des interviews, le point de vue déformé donné aux faits, le choix même des sujets est souvent l’expression d’opinions collectives…un exemple : j’ai vu l’autre jour un reportage où les journalistes allaient rencontrer des électeurs du FN. Ils étaient pistés, presque traqués, avec en fond comme une sorte de message subliminal « l’électeur du FN se cache, c’est normal il a honte de voter pour Le Pen »…je n’ai jamais vu un reportage où on allait chercher, pour les montrer comme des bêtes curieuses, les électeurs de Besancenot ou Laguiller, qui votent pourtant pour des candidats ayant des idées tout aussi renfermées, dangereuses et passéistes.
Le problème avec les opinions collectives et les médias, c’est qu’il y a un renforcement mutuel : les médias peuvent colporter les opinions collectives, mais les fabriquent également. Comme de plus ils cherchent à les flatter pour gagner de l’audience, un message factuel et objectif devient difficile à faire passer…
Et la propagande, dans tout ça ?
A force de ne pas faire attention aux interactions entre les opinions collectives ou personnelles et les focus qu’ils mettent sur l’actualité, les journalistes pourraient-ils tomber dans la propagande ?
PROPAGANDE :
SC. SOC. ET POL., courant.Action psychologique qui met en oeuvre tous les moyens d’information pour propager une doctrine, créer un mouvement d’opinion et susciter une décision.
Il semble bien au vu de la définition, que la réponse est oui : à force de ne pas faire proprement le tri entre opinions personnelles, opinions collectives et information, les journalistes — parce qu’ils font partie du système d’information — prennent le risque de participer, sciemment ou non, à une action psychologique propre à créer un mouvement d’opinion, c’est-à -dire à faire de la propagande. A nous d’être vigilants face aux messages véhiculés directement ou pas par les médias !
Source des définitions : Dictionnaire LEXILOGOS
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