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  • Ségolène Royal : interventionnisme, démagogie et quelques silences en forme d’aveux

    Hier soir, comme beaucoup de Français j’imagine, j’ai regardé la prestation de Ségolène Royal sur TF1. Si je devais résumer, je dirais qu’elle nous a servi un vaste foutoir de bons sentiments et de promesses sans réelle assise économique. Voyons plus en détail.

    Interventionnisme

    Ségolène Royal est bien dans la droite ligne des politiciens qui surtout ne veulent pas restreindre le rôle de l’Etat, et ses domaines d’intervention. En voilà  trois exemples abordés hier :

    • augmentation du SMIC et des autres salaires par intervention de l’état : les entreprises n’auront bientôt plus qu’à  suivre une grille des salaires fournie par le Ministère du Travail : vive la planification !
    • l’annonce de la réquisition des logements inoccupés par l’Etat est une atteinte à  la propriété : mais il vrai que nous devons tout mettre en commun pour le bien général : vive le communisme !
    • l’annonce d’empêcher les licenciements dans les entreprises qui font des profits ; les patrons peuvent être plus cool maintenant : l’Etat providence va gérer leur boîte à  leur place (il est vrai que l’Etat a depuis longtemps fait ses preuves en tant que gestionnaire et stratège !)

    La position du curseur qui définit le rôle que doit prendre l’Etat dans la force de ses interactions avec le marché a été clairement annoncée hier soir : interventionnisme forcené. Il est vrai que c’est ce que les Français voulaient entendre, tant ils sont habitués à  systématiquement se tourner vers l’Etat pour chaque problème de la vie.

    Démagogie

    Si la démagogie est l’art de flatter les gens en leur disant ce qu’ils veulent entendre, et la rouerie l’art d’utiliser l’habilité de la parole jusqu’au mensonge, alors Ségolène Royal est une sacrée démagogue, voire une menteuse. Dire tout et son contraire dans un intervalle de trois minutes, c’est ce qu’elle a fait à  plusieurs reprises hier :

    • augmenter le SMIC et diminuer le chômage (voir mon billet précédent)
    • il faut diminuer la dette de l’Etat Français, mais par contre, on ne touche pas aux fonctionnaires !
    • à  propos des OGM : il faut faire dela recherche sur les OGM, car ils peuvent apporter beaucoup, en terme de santé et d’environnement, mais José Bové a eu raison de faucher des champs d’OGM (contre ce que la justice vient pourtant de décider)
    • quant au progrès technique, il détruit des emplois, mais il crée des emplois (dans la même phrase!)

    N’oublions pas que la cohérence du discours, allant avec une utilisation saine de la raison, comporte le principe de non-contradiction : dois-je en conclure que Ségolène Royal, hier ne s’adressait pas à  la raison ?

    Quelques silences en forme d’aveux

    Certains sujets importants n’ont pas été abordés, et qu’ils aient donné lieu à  des questions ne change pas grand-chose :

    • la pérennité du système de retraite a fait l’objet de la première question et Ségolène Royal, au lieu de répondre sur le fond de la question (l’âge des départs à  la retraite) a préféré botter en touche et parler du montant des petites retraites
    • un intervenant, étudiant en chimie, a évoqué les émeutes de l’hiver 2005 : là  encore, silence sur ces évènements graves et sur leurs causes
    • en enfin le clou du spectacle : personne n’a abordé les 35 heures ! Ségolène Royal, selon moi, avait pourtant le devoir de clarifier sa position sur ce point précis…

    Ca fait franchement froid dans le dos !

    Profondeur des vues journalistiques

    Pour finir, il faut décerner la palme du ridicule à  PPDA, dont le rôle est pourtant bien passif dans ce type rendez-vous : les seules interventions qu’il a faite pour rappeler des questions posées, et que Mme Royal avait oublié portaient sur … les 35 heures ? les banlieues ? l’inégalité de traitement homme/femme au travail ? le coût de la main d’oeuvre ? NON ! PPDA est intervenu pour relancer sur deux points essentiels de la campagne présidentielle, et cruciaux pour l’avenir de la France :

    • le remaniement en cours de l’équipe de Ségolène Royal, mais sur les gens, hein ?
    • est-ce que M. Hollande aura un poste et si oui, lequel ?

    Merci pour ces interventions de journaliste « peopolitique », on s’en serait passé, et j’aurais pour ma part préféré qu’il relance Mme Royal sur les émeutes…
    Pour finir sur une note d’humour, le monsieur qui a posé la question concernant le futur poste de Hollande en cas de victoire de Royal, l’a tourné de la sorte — vous me direz que j’ai l’esprit mal tourné, et c’est peut être vrai! – :

    Quelle sera la position de M. Hollande?
    :mrgreen:

    Posée à  la femme de l’intéressé, c’est une question qui ne manque pas de piquant ; ça m’a bien fait marrer. Il n’y a que les propos de Ségolène qui auraient pu être aussi drôles, s’ils n’avaient pas été aussi pathétiques.

  • L’esprit de l’athéisme

    L’esprit de l’athéisme

    Je viens de terminer « L’esprit de l’athéisme« , de Comte-Sponville. C’est Max qui me l’avait offert Noël. Super cadeau ! C’est un livre court, dense et plein de raison, comme d’habitude avec Comte-Sponville.

    Le livre est découpé en trois parties, chacune avec un titre sous forme de question :

    1. Peut-on se passer de religion ? Voilà  le paragraphe de conclusion du chapitre :
      Résumons-nous. On peut se passer de religion ; mais pas de communion, ni de fidélité, ni d’amour. Ce qui nous unit, ici, est plus important que ce qui nous sépare. Paix à  tous, croyants et incroyants. La vie est plus précieuse que la religion (c’est ce qui donne tort aux inquisiteurs et aux bourreaux) ; la communion, plus précieuse que les Eglises (c’est ce qui donne tort aux sectaires) ; la fidélité, plus précieuse que la foi ou que l’athéisme (c’est ce qui donne tort aux nihilistes aussi bien qu’aux fanatiques) ; enfin – c’est ce qui donne raison aux braves gens, croyants ou non – l’amour est plus précieux que l’espérance ou que le désespoir. N’attendons pas d’être sauvés pour être humains.
    2. Dieu existe-t-il ? Dans ce deuxième chapitre, sont passées en revues les trois « preuves » historiques de l’existence de Dieu, et Comte-sponville y ajoute trois raisons pour lui importantes qui le confortent dans sa non-croyance. Un passage de la conclusion de ce chapitre :
      Dieu existe-t-il ? Nous ne le savons pas. Nous ne le saurons jamais, en tout cas dans cette vie. C’est pourquoi la question se pose d’y croire ou non. Le lecteur sait maintenant pourquoi, pour ma part, je n’y crois pas : d’abord parce qu’aucun argument ne prouve son existence; ensuite parce qu’aucune expérience ne l’atteste; enfin parce que je veux rester fidèle au mystère, face à  l’être, et à  l’horreur et à  la compassion, face au mal, à  la miséricorde ou à  l’humour, face à  la médiocrité (si Dieu nous avait créés à  son image et absolument libres, nous serions impardonnables), enfin à  la lucidité, face à  nos désirs et à  nos illusions. Ce sont mes raisons, du moins celles qui me touchent ou me convainquent le plus. Il va de soi que je ne prétends les imposer à  quiconque. Il me suffit de revendiquer le droit de les énoncer publiquement, et de les soumettre, comme il convient à  la discussion. […] La religion est un droit. L’irréligion aussi. Il faut donc les protéger l’une et l’autre (voire l’une contre l’autre, si c’est nécessaire), en leur interdisant à  toutes deux de s’imposer par la force. C’est ce qu’on appelle la laïcité, et le plus précieux héritage des Lumières. On en redécouvre aujourd’hui toute la fragilité. Raison de plus pour le défendre, contre tout intégrisme, et pour le transmettre à  nos enfants. La liberté de l’esprit est le seul bien, peut-être, qui soit plus précieux que la paix. C’est que la paix, sans elle, n’est que servitude.
    3. Quelle spiritualité pour les athées ? Ce dernier chapitre expose la spiritualité selon Comte-sponville, toute orientée vers l’action, et la prise de conscience que le seul absolu que nous ayons est celui de l’Etre, vécu plus comme un silence, une sensation que comme une pensée. Il est proche là -dessus des mystiques et des bouddhistes. J’ai un peu plus de mal à  le suivre là , même si des passages me touchent beaucoup…

    Pour conclure, c’est un superbe livre : un appel à  la raison, au doute, à  la discussion et à  la spiritualité. Message rare par les temps qui courent. Pour donner un petit bémol, qui n’est que personnel : j’aborde la question de l’absolu différemment de Comte-sponville. Il le cherche malgré tout dans le mystère de l’être ; il ne veut pas s’en séparer complètement. Personnellement, et c’est certainement mon caractère qui parle, l’absolu me semble une notion pas forcément utile pour vivre. Je me sens plus proche en cela de Montaigne.
    Enfin, tout au long des pages, Comte-Sponville illustre ses pensées de plein de citations excellentes, que j’utiliserais certainement pour mes rituelles « citations du dimanche »… En voilà  deux que j’ai bien aimées, et que je trouve profondes…

    Pour les éveillés, il n’est qu’un seul monde, qui leur est commun; les endormis ont chacun leur monde propre, où ils ne cessent de se retourner.
    Héraclite

    Si l’on entend par éternité non la durée infinie mais l’intemporalité, alors il a la vie éternelle celui qui vit dans le présent.
    Wittgenstein

    Si ces questions de spiritualité, de Dieu, de mystère vous intéresse, alors n’hésitez pas : ce livre est une mine de réflexion passionnantes.

  • Citation #12

    Ne pas prévoir, c’est déjà  gémir. Léonard de Vinci

  • Un brin fragile de courage…

    L’autre jour, notre promenade nous a fait passer dans une petite rue, entre l’avenue du Maine et le boulevard du général Leclerc. Nous avons doublé un vieil homme qui marchait aidé de deux cannes, avec une lenteur incroyable. Ses jambes semblaient à peine le porter, et le mouvement de ses pieds – incontrôlés, fragiles – qui se soulevaient et s’abaissaient comme des membres morts montrait bien la nécessité des béquilles.
    En le doublant, j’ai tourné la tête et j’ai aperçu son visage : un beau visage, pas aussi vieux que son handicap le laissait penser, et tourné légèrement vers le sol avec comme un air d’extrême concentration, comme si tout son être était absorbé par l’effort de la marche. Ca m’a mis une bouffée d’émotion en pleine tête, qui revient dès que j’y repense, et me submerge jusqu’à m’en mettre les larmes aux yeux… Je suis certainement trop sensible ! 

    Alors, j’essaye de la dire, cette émotion. Je ne sais pas si c’était de la compassion ; l’émotion est venue en pensant que c’était admirable de faire l’effort d’aller prendre l’air alors qu’on a autant de mal à marcher, et ensuite en pensant à son retour chez lui : vit-il seul ? Est-ce que quelqu’un l’attend ? Je crois que la vague d’émotion que j’ai ressentie est venue de la combinaison de ces deux pensées : la peine qu’il puisse être solitaire en plus d’être handicapé, et l’admiration pour son courage. Car il s’agit bien de courage, et c’est ce qui se lisait sur son visage : sa marche lente, solitaire, difficile, absurde – comme chacune de nos vies – ressemblait tout de même bien aux efforts incessants et nobles d’un coeur humain qui se bat.

    J’aurais voulu prendre un café avec lui, et le connaitre, savoir s’il est heureux…et puis le temps de ressentir tout ça, de l’échanger avec ma femme, nous étions déjà cent mètres devant lui : c’était trop tard. Et puis, l’émotion était passée…

    Il ne lira jamais ce texte. Mais je veux quand même lui exprimer mon émotion et mon admiration.

  • De droite ou de gauche ?

    Toujours sur l’excellent « Ami du laissez-faire » , un test sympa (rubrique « articles », tout en haut !) pour répondre à  la question : où vous situez-vous sur l’échiquier politique ? Je l’ai fait (ça prend 1/4 heure), et voilà  mon résultat (point bleu) :
    Position
    Je me retrouve entre les sociaux-démocrates et les libéraux, plutôt proche des libéraux : c’est exactement ce que j’aurais dis au « feeling »…! à‡a marche plutôt pas mal. Et pour vous ? N’hésitez pas à  laisser votre résultat en commentaire…Bon test !
    Edit du 17/04/2009 : je viens de refaire le test et l’image présentée ici est ma nouvelle position. C’est amusant de voir l’évolution en 2 ans de temps.

  • Toute l’économie en une page !

    Voilà  ce que j’ai trouvé sur l’excellent site de « L’ami du laissez-faire » (site crée par Patrick Madrolle, qui tient aussi un blog), une récapitulation très synthétique (et néanmoins assez complète) des lois économiques…ça ne fait jamais de mal de se cultiver un peu — ou de se rafraîchir la mémoire – …et puis, pour ceux qui veulent attaquer le soi-disant « dogme », il est important de le formuler préalablement à  la discussion, non ?
    Je cite donc Patrick Madrolle, parce qu’il n’y a rien à  rajouter…:

    Milton Friedman, prix Nobel d’économie, a eu l’occasion de dire :

    Ce qui est extraordinaire avec la science économique, c’est que toutes ses lois tiennent réellement en une page, mais leur simplicité n’a jamais été acceptée par la plupart des gens.

    L’économiste américain Mark Skousen a relevé le défi. Le texte ci-dessous a été publié par la revue du F.E.E. (Foundation for Economic Education, New York), Freeman, Janvier 1997. Et ce texte a été traduit par Jacques Garello, président de l’ALEPS, Association pour la liberté économique et le progrès social, pour La Nouvelle Lettre, numéro du 15 février 1997.

    Voilà  donc la liste:

    1. Intérêt personnel : Personne ne dépense l’argent des autres avec autant de soin que le sien propre.
    2. Croissance économique : La clé de l’élévation du niveau de vie est de développer l’épargne, la formation de capital, l’éducation et la technologie.
    3. Commerce : Lors de tout échange volontaire, quand ils disposent d’une information précise, l’acheteur et le vendeur sont tous les deux gagnants ; de ce fait, une augmentation du commerce entre individus, entre groupes ou entre pays est profitable aux deux parties.
    4. Concurrence : Étant donné la réalité universelle des ressources limitées et des demandes illimitées, la concurrence existe dans toutes les sociétés et ne peut pas être abolie par décret gouvernemental.
    5. Coopération : Puisque la plupart des individus ne sont pas autosuffisants, et que presque toutes les ressources naturelles doivent être transformées pour devenir utilisables, les individus – travailleurs, propriétaires, capitalistes et entrepreneurs – doivent travailler ensemble dans le but de produire des biens et services de valeur.
    6. Division du travail et avantage comparatif : Les différences de talents, d’intelligence, de savoir et de propriété conduisent à  la spécialisation et à  un avantage comparatif détenu par chaque individu, entreprise ou pays.
    7. Dispersion du savoir: L’information sur le comportement du marché est si diverse et omniprésente qu’elle ne peut être saisie ni calculée par une autorité centrale.
    8. Perte et profit : Le profit et la perte sont des mécanismes du marché qui indiquent ce qui doit être ou ne pas être produit dans le long terme.
    9. Coût d’opportunité : Étant donné les contraintes de temps et de ressources, il faut toujours faire des arbitrages. Vouloir faire quelque chose demande de renoncer à  d’autres que l’on aurait aimé faire aussi. Le prix payé pour s’engager dans une activité est égal au coût des activités auxquelles on a renoncé.
    10. Théorie des prix : Les prix sont déterminés par l’estimation subjective des acheteurs (demande) et des vendeurs (offre), et non par un quelconque coût de production objectif ; plus le prix est élevé, moins les quantités achetées seront grandes et plus les quantités offertes seront importantes.
    11. Causalité : À chaque cause correspond un effet. Les actions des individus, des entreprises ou des gouvernements ont un impact sur les autres acteurs de l’économie, impact qui peut être prédit, bien que le niveau de prédictibilité dépende de la complexité des actions engagées.
    12. Incertitude : Il existe toujours une dose de risque et d’incertitude sur l’avenir, car les gens effectuent des réévaluations, tirent des leçons de leurs erreurs et changent d’avis, ce qui rend délicate toute prédiction sur leurs comportements à  venir.
    13. Économie du travail : L’augmentation des salaires sur le long terme ne peut être réalisée que par une plus grande productivité, c’est-à -dire par davantage d’investissements en capital pour chaque travailleur ; le chômage chronique est une conséquence de l’action du gouvernement qui fixe les taux de salaire au-dessus du niveau d’équilibre du marché.
    14. Contrôles du gouvernement : Les contrôles des prix, des salaires ou des loyers peuvent bénéficier à  certains individus ou groupes, mais pas à  la société dans son ensemble ; en fin de compte, ces contrôles créent de la pénurie, du marché noir et une détérioration de la qualité et des services. Les repas gratuits, ça n’existe pas.
    15. Monnaie : Des tentatives délibérées pour déprécier la monnaie nationale, ou baisser artificiellement les taux d’intérêt, ou encore pour s’engager dans des politiques d’argent facile conduisent inévitablement à  l’inflation, à  des cycles prospérité/récession et aux crises économiques. C’est le marché, et non l’État, qui devrait régler la monnaie et le crédit.
    16. Finances publiques : Dans toutes les entreprises publiques, et afin de maintenir un haut niveau d’efficacité et une bonne gestion, les principes du marché doivent être adoptés chaque fois que cela est possible:
      1. le gouvernement devrait essayer de se cantonner à  ce que les entreprises privées ne peuvent pas faire ; il ne doit pas s’engager dans des affaires que le secteur privé gère mieux que lui.
      2. le gouvernement devrait fonctionner selon ses moyens.
      3. l’analyse coût/avantage: les bénéfices marginaux doivent être supérieurs aux coûts marginaux.
      4. le principe de commutativité: ceux qui bénéficient d’un service devraient payer pour ce service.

    Il y a tout de même matière à  réfléchir là -dessus, non ? Et se poser quelques questions sur l’idéologie ambiante : ces lois sont des lois d’économie positive (ce qui est de l’ordre du savoir scientifique) et non pas normative (ce qu’on décide en connaissant l’économie positive, et en y rajoutant nos valeurs morales et politiques)…Merci à  nos politiques de ne pas en oublier la moitié en court de route…!