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  • La sagesse des mythes

    La sagesse des mythes

    Je viens de terminer la lecture du second volume de la série de Luc Ferry « Apprendre à  vivre » (voir mon article concernant le tome 1). Il s’intitule « La sagesse des mythes », et Luc Ferry y revient sur la mythologie grecque, en essayant de faire une lecture philosophique de ces magnifiques et terribles histoires.

    Il donne, quand c’est nécessaire, des précisions sur les différents auteurs utilisés (chaque mythe a été raconté et utilisé par plusieurs auteurs), et surtout il ne cherche pas à  les expurger de leur violence réelle. C’est un superbe livre, facile à  lire, et qui permet une plongée rapide dans l’univers mythologique et philosophique grec. Quelques points que je retiendrai :

    • le mythe de la création du cosmos, fascinant, et qui se conclut par un formidable combat entre Zeus (qui veut installer l’ordre, et la justice) et Typhon (qui est le symbole du désordre, du chaos et de la violence, mais aussi du temps, de la génération). La conclusion est magnifique : Zeus triomphe de l’horrible Typhon, mais Gaia – la première déesse, et mère de ce dernier – insiste pour que Typhon ne soit pas tué, mais enfermé sous Terre. Parce que si l’harmonie triomphait, le cosmos sans le temps, le chaos, le déséquilibre ne serait rapidement plus rien d’autre qu’un univers immobile, figé, sans mouvement.
    • bien sûr, la très belle histoire d’Ulysse, qui est une parabole magnifique sur la condition humaine, avec la philosophie des grecs en ligne de soubassement. C’est un trajet qui va du désordre (la guerre, le fameux siège de Troie) vers l’ordre, la place retrouvée (Ulysse finira, après bien des aventures, par retrouver sa place au sein de sa famille, et parmi les mortels) malgré les épreuves. Parmi lesquelles, deux particulièrement (dont Ulysse aurait pu se tirer en ne restant pas à  sa place d’humain, et donc en cédant à  un orgueil démesuré, l’hybris) :
      • la tentation de l’immortalité (qui lui est proposée par Calypso), et
      • sortir du monde (oublier son identité et sa place, c’est Circé qui parvient presque à  cela).

    L’histoire d’Ulysse est un chemin vers la sagesse, la sagesse d’un mortel.

    Les deux mythes d’Oedipe et d’Antigone, qui rappellent à  quel point la condition des mortels est tragique, sont magnifiques également.

    Bref, si vous ne connaissez rien à  la mythologie grecque (ce qui était peu ou prou mon cas avant la lecture de cet ouvrage), voilà  un petit livre, facile à  lire, profond néanmoins et riche de détails. Courez l’acheter !

  • Pourquoi sommes-nous heureux ?

    Pourquoi sommes-nous heureux ?

    Je vous invite à  regarder cette très belle conférence de Dan Gilbert (professeur de psychologie à  Harvard) pour TED.com. Il y revient sur la manière dont le cerveau fabrique le bonheur, de manière à  la fois drôle et passionnante !

  • Qu’est-ce que l’Occident ?

    Qu’est-ce que l’Occident ?

    Je viens de terminer l’excellentissime petit livre de Philippe Nemo : « Qu’est-ce que l’Occident ? ». Le propos est simple : Philippe Nemo essaye de dégager ce qui constitue l’identité spirituelle et culturelle de l’Occident. Il articule son propos en décrivant cinq moments-clés, cinq « miracles » qui consituent l’épine dorsale de la culture occidentale. Brièvement, les voici : 

    1. l’invention de la Cité, de la liberté sous la loi, de la science et de l’école par les Grecs
    2. l’invention du droit, de la propriété privée, de la « personne » et de l’humanisme par Rome
    3. la révolution éthique et eschatologique de la Bible : la charité dépassant la justice, la mise sous tension eschatologique d’un temps linéaire, le temps de l’Histoire
    4. la « Révolution papale » des XIe-XIIIe siècles, qui a choisi d’utiliser la raison de la science grecque et du droit romain pour l’inscrire dans l’histoire éthique et eschatologique bibliques, réalisant ainsi la première véritable synthèse entre « Athènes », « Rome » et « Jérusalem »
    5. la promotion de la démocratie libérale accomplie par ce qu’il est convenu d’appeler les grandes révolutions démocratiques (Hollande, Angleterre, Etats-Unis, France, puis, sous une forme ou une autre, tous les autres pays de l’Europe occidentale). Le pluralisme étant plus efficient que tout ordre naturel ou que tout ordre artificiel dans les trois domaines de la science, de la politique et de l’économie, ce dernier évènement a conféré à  l’Occident une puissance de développement sans précédent qui lui a permis d’engendrer la Modernité.

    Nemo explique que le propre de l’Occident serait d’avoir été modelé par tous ces cinq miracles, et par aucun autre. Philippe Nemo termine en posant la question centrale de l’universalité de l’Occident, puis en proposant une Union Occidentale. J’ai adoré la lecture de ce livre : simple, synthétique au possible (130 pages), magistral dans l’enchaînement des idées et des concepts. Les passages sur la construction du droit romain, ou sur la révolution Papale étaient particulièrement instructifs pour moi (car inconnus auparavant).

    Il conclut en expliquant que le meilleur moyen pour que les cultures, les civilisations différentes puissent se parler entre elles, et que ce dialogue puisse déboucher, et être mené en vérité, il faut que chacun y soit authentiquement lui-même. Son livre participe à  faire émerger, superbement et simplement, ce « soi-même » essentiel des occidentaux.

    Pour une recension plus détaillée, je vous invite à  lire cet article sur Actu Philosophia. 

  • Le choc des civilisations

    Le choc des civilisations

    Je viens de terminer le grand livre de Samuel Huntington, « Le choc des civilisations ». Le propos de ce livre est à  la fois simple (les civilisations sont des objets d’étude, incontournables pour celui qui veut comprendre l’histoire mondiale et les enjeux géostratégiques), et complexe (du coup, il faut étudier beaucoup pour comprendre ce que sont les civilisations, leurs modes d’interactions, la structure des conflits inter-civilisationnels, leurs modes de résolution). 

    J’ai trouvé ce livre passionnant, dérangeant, et très éclairant. Un exemple : la description de la structure des conflits civilisationnels, qui permet – exemple du conflit en ex-Yougoslavie à  l’appui) de comprendre de manière beaucoup plus large ce qui se passe dans le monde, et les relations diplomatiques souvent compliquées. Sous forme schématique, cela donne pour un conflit entre une civilisation A et une civilisation B : 

    Huntington

    Les bélligérants de premier niveau sont soutenus par des alliés de premier niveau de la même civilisation qui les financent, leur fournissent des armes, des capacités militaires, etc. Un deuxième niveau de soutien prend place (ce sont généralement les états-phares des civilisations concernées). Ces soutiens sont également actifs pour sortir du conflit : généralement moins impliqués dans le conflit direct, ils en perçoivent mieux tous les aspects, et ils peuvent mettre en place des négociations avec les nations de même niveau. Les alliés de premier et deuxième niveau sont donc à  la fois des soutiens au conflit, mais également des aides pour en sortir.

    Sur le fond, Samuel Huntington est clairement convaincu (et cela vient de la définition qu’il retient pour le mot « civilisation », la même que celle de Braudel) que les civilisations sont clairement « incompatibles ». Il soutient donc l’idée qu’il faut être capable de dialoguer entre civilisations, de contenir les risques d’embrasement et de conflit global, mais il se positionne avant tout en occidental, conscient de la perte d’influence et de puissance de l’Occident comparativement aux autres civilisations. Il décrit un monde multipolaire. 

    Ma réflexion est en suspens sur ce point : d’un côté, je comprends bien le fait que les civilisations soient constituées d’éléments pas forcément compatibles, mais de l’autre je suis aussi (par ethnocentrisme ?) convaincu que les humains, quelque soit leur culture / civilisation d’origine ont des droits naturels identiques. Cette forme d’universalité des droits de l’homme est une manière, non pas de nier l’existence de différentes civilisations, mais plutôt d’affirmer que certaines sont supérieures à  d’autres sous l’angle du respect des individus. Ce qui est une manière de juger des autres civilisations à  l’aune d’une valeur qui n’appartient qu’à  la mienne. Raisonnement circulaire, donc, et sans réel intérêt. D’ailleurs, Huntington explique bien que la croyance occidentale dans la vocation universelle de sa culture est fausse, immorale et dangereuse. Mais j’ai le sentiment qu’il y a tout de même une « nature » humaine, biologique, de l’espèce, qui transcende les cultures et les civilisations, et que les droits humains en découlent en partie

    Huntington conclut en expliquant que le devoir des occidentaux n’est donc pas de vouloir façonner les autres civilisations à  l’image de l’Occident, mais de préserver, protéger et revigorer les qualités uniques de la civilisation occidentale. 

    Qu’en pensez-vous ? 

  • Astro Teller à  propos d’innovation

    Astro Teller à  propos d’innovation

    Je vous invite à  regarder cette vidéo excellente (uniquement en anglais, désolé) d’Astro Teller, un gars de chez Google. Il revient sur un certain nombre de caractéristiques de l’innovation, et des impacts que cela doit avoir sur l’organisation d’une firme innovante. Passionnant !