Catégorie : 💼 Entreprise

  • Management Lean

    Management Lean

    J’ai eu la chance d’assister Ă  une confĂ©rence de Michael BallĂ© (auteur avec Godefroy Beauvallet du livre « Management Lean ») dans le cadre de mon travail. Et Ă  la fin de la journĂ©e oĂą nous avions vu cette très intĂ©ressante confĂ©rence, nous nous sommes vu offrir l’ouvrage. Que j’ai lu, et qui est vraiment très intĂ©ressant : j’avais entendu souvent parler du « Lean » sans vraiment savoir prĂ©cisĂ©ment de quoi il retournait. Le quatrième de couverture le dit très bien :

    Loin des effets de mode, le management lean n’est ni une mĂ©thode ni une philosophie. C’est avant tout une pratique (…) Si Management Lean est une rĂ©fĂ©rence, c’est parce qu’il ne transige jamais sur les principes essentiels de la pratique lean : assurer le succès durable de l’entreprise, son alignement sur les besoins de ses clients – par le dĂ©veloppement personnel et professionnel de chaque collaborateur -, et plus largement, sa contribution aux objectifs globaux de prĂ©servation de l’environnement et du lien social.

    Loin de moi l’idĂ©e de rĂ©sumer cet ensemble de pratiques rĂ©alistes, basĂ© sur l’apprentissage, venu du Japon. Je vous en partage quelques traits marquants que j’ai relevĂ© au fil de la lecture.

    Venu du Japon


    Le Lean est indissociable du Japon (mĂŞme s’il a Ă©tĂ© formalisĂ© en tant que tel aux USA) : cette pratique, en effet, a Ă©tĂ© construite chez Toyota, et formalisĂ©e au sein du mystĂ©rieux TPS (Toyota Production System). L’auteur Michael BallĂ© est le fils d’un ingĂ©nieur (Freddy BallĂ©) qui a Ă©tĂ© parmi les premiers Ă  aller, pour ValĂ©o, Ă©tudier l’organisation de Toyota, sur place, pour en comprendre la logique et la philosophie. C’est une organisation du travail en usine qui est vraiment très diffĂ©rente du Taylorisme. Elle part de l’ouvrier, de l’opĂ©rateur, et des conditions de l’excellence de son travail, au service du client. Et le terme « lean » dĂ©crit très bien la dĂ©marche et la pratique : « sans gras », « dĂ©graissé », le terme dĂ©crit très bien un organisme sans surplus, rĂ©actif et rĂ©silient, fin et dynamique, optimisĂ© en tout point, comme un jaguar. C’est Ă  cette image que l’entreprise doit essayer de ressembler dans son fonctionnement pour rester tendue vers son seul objectif (satisfaire les clients), en s’appuyant sur ses seules forces (les humains qui y travaillent, et la manière dont ils travaillent).

    Une approche réaliste



    Ce qui marque Ă  la lecture de l’ouvrage, c’est le cĂ´tĂ© ultra-rĂ©aliste de cette pratique. Pas d’idĂ©ologie, pas d’idĂ©es prĂ©conçues, tout repose sur l’observation et la comprĂ©hension de la rĂ©alitĂ©. La rĂ©alitĂ© de la qualitĂ© des produits, de la qualitĂ© du travail, des conditions de productions, des optimisations possibles. On trouve naturellement au sein du lean le gemba (l’observation terrain), la formation permanente des ouvriers et en gĂ©nĂ©ral des employĂ©s, la recherche et l’analyse des causes des problèmes, la chasse aux gaspillages (ressources, temps, etc..). C’est la rĂ©alitĂ© qui prime ; les humains s’y adaptent.

    Centrée sur les produits et les clients


    Le but du Lean est de servir au mieux les clients avec les meilleurs produits. La manière de traiter les rĂ©clamations clients liĂ©s Ă  des problèmes qualitĂ© est Ă  ce titre très Ă©vocatrice de cette approche : qu’est-ce qui dans l’utilisation du produit a cassĂ© la magie du produit, et comment prendre cette rĂ©clamation comme une occasion prĂ©cieuse d’apprendre (qu’est-ce que le client essayait de faire avec le produit ? en quoi le produit ne lui a pas permis de le faire ? quelle situation concrète est Ă  l’origine de la difficultĂ© ? qu’est-ce que ça nous dit sur ce qui est important pour le client ? qu’est-ce que nous pouvons apprendre sur le fonctionnement de nos produits ? quel aspect de notre processus de fabrication ou de service a créé le problème ?). Vous l’avez compris, cette manière de voir les choses est intimement liĂ©e Ă  l’apprentissage et l’amĂ©lioration permanente.

    Une approche basĂ©e sur l’amĂ©lioration permanente


    Naturellement, avec cette approche l’amĂ©lioration graduelle et permanente (kaizen est au coeur des pratiques managĂ©riales, au service de la performance. L’effort de chaque salariĂ©, de chaque manager, est que chacun puisse faire son travail avec la plus grande qualitĂ© et dans les meilleures conditions. « Le principe « non coupable » est la clĂ© de l’amĂ©lioration, car il permet de mettre les problèmes en Ă©vidence et de se poser la question « pourquoi » plutĂ´t que la question « qui ». » On retrouve lĂ  les principes soulignĂ©s par C. Morel dans son magnifique ouvrage « Eviter les dĂ©cisions absurdes« . Cela a pris du temps, et est très bien symbolisĂ© par un exemple souvent citĂ© pour illustrer la manière dont le Lean s’incarne concrètement dans les espaces de travail. Les opĂ©rateurs chez Toyota ont une ficelle Ă  portĂ©e de main qu’ils peuvent tirer dès qu’ils rencontrent un problème impactant la qualitĂ© de la production : dans ce cas, la chaĂ®ne s’arrĂŞte, et les managers convergent vers ce point de la chaĂ®ne, non pour blâmer le coupable, mais pour l’aider Ă  trouver une solution. Mais pas en la trouvant pour lui. En vĂ©rifiant que l’opĂ©rateur a bien intĂ©grĂ© le standard de travail, en le (re)formant / ou en se mettant d’accord sur la distinction entre un bon composant ou mauvais composant, en clarifiant les critères, en se mettant d’accord sur la mĂ©thode de test. C’est une manière de toujours considĂ©rer que la qualitĂ© est avant-tout de l’auto-qualitĂ©. La formation est intĂ©grĂ©e au travail lui-mĂŞme.

    C’est un ouvrage très facile Ă  lire, très inspirant, et dont je vais partager quelques points avec mes collègues. Qu’est-ce que la pratique lean signifie si je l’applique Ă  mon propre travail ? en quoi conduit-elle Ă  amĂ©liorer certaines de mes pratiques professionnelles ?

  • Le Design

    Le Design

    En 2015, StĂ©phane Vial, philosophe et chercheur en design français (maintenant Ă©migrĂ© au Canada), a publiĂ© aux Editions PUF le Que Sais-je ? » « Le Design ». C’est un remarquable ouvrage, passionnant et d’une grande clartĂ©. Il donne un Ă©clairage Ă  la fois historique, philosophique et Ă©pistĂ©mologique sur le Design en tant que discipline.

    Méthodes de conception

    Si le Design est en gĂ©nĂ©ral associĂ© Ă  l’essor de l’industrie et aux arts dĂ©coratifs au XIXe siècle, StĂ©phane Vial montre que ses racines sont fondamentalement liĂ©es Ă  la naissance du projet architectural Ă  la Renaissance, et notamment dans les travaux de Brunelleschi. Ce dernier formalise la sĂ©paration entre conception et rĂ©alisation.

    VoilĂ  pourquoi l’invention du projet en architecture n’est rien d’autre que la naissance de la mĂ©thode dans le domaine de la conception. DĂ©sormais, la conception est une travail mĂ©th-odique, c’est-Ă -dire un cheminement (odos, « la route, la voie ») sĂ©quencĂ©, fractionnĂ©, dĂ©coupĂ© et encadrĂ© par la raison. StĂ©phane Vial

    Si l’histoire du Design montre bien que les batailles idĂ©ologiques et philosophiques sont nombreuses autour du sens mĂŞme de la discipline, l’auteur montre bien que cette racine perdure et constitue la colonne vertĂ©brale du Design. Par exemple, il cite plus loin Roger Tallon, grand designer français :

    Le design n’est ni un art, ni un mode d’expression, mais bien une dĂ©marche crĂ©ative mĂ©thodique qui peut ĂŞtre gĂ©nĂ©ralisĂ©e Ă  tous les problèmes de conception.

    Roger Tallon (1929 – 2011) designer français, considĂ©rĂ© comme le père du design industriel français

    Tension idéologique

    Il y a une tension intrinsèque dans le Design liĂ©e Ă  son essence, Ă  ses racines et Ă  son histoire : approche mĂ©thodique, qui a participĂ© Ă  l’essor industriel formidable de la fin du XIXe et du XXe, il s’est Ă©galement structurĂ© comme discours critique et esthĂ©tique en rĂ©action Ă  l’industrialisation massive, Ă  la standardisation et au consumĂ©risme. StĂ©phane Vial montre bien cela en l’illustrant avec des designers emblĂ©matiques de certains de ces courants, en prĂ©cisant avec une rare clartĂ© les « modèles philosophiques » (et visions du design) dont ils sont les porteurs : William Morris pour le Arts & Craft (1860), Henry Van de Velde pour l’Art nouveau (1900), Walter Gropius pour le Bauhaus (1919), Raymond Loewy pour l’Industrial design (1929) ou encore Jacques ViĂ©not pour l’EsthĂ©tique industrielle (1951).
    L’ouvrage est sur point tout Ă  fait passionnant : il parvient Ă  esquisser les grandes lignes de ce vastte tableau en restant très clair, et suffisamment dĂ©taillĂ©. Cette histoire est fascinante.

    Extension du domaine du Design

    StĂ©phane Vial montre ensuite comment le Design – et c’est bien naturel compte tenu de ses racines – a vu ses limites s’Ă©tendre dans un mouvement d’ »éclipse de l’objet » (Findeli & Bousbaci) :

    L’Ă©clipse ne signifie pas une disparition de l’objet, mais un changement de prioritĂ©, l’objet devenant secondaire au sein d’une expĂ©rience au service des acteurs.


    Source de l’image : Projekt
    L’auteur dĂ©crit de manière très claire diffĂ©rents modèles du projet en design (Conception-rĂ©ception, Double Diamant, modèle de projet selon D. Newman, Design Thiking). Je connais mieux cette partie, et j’ai Ă©tĂ© un peu surpris de voir que, si Armand Hatchuel et le CGS de l’Ecole des Mines Ă©tait citĂ© dans l’introduction, les travau du CGS n’Ă©taient pas mentionnĂ©s dans cette partie sur les thĂ©ories & mĂ©thodes en Design. Compte tenu de la qualitĂ© de l’ouvrage, j’en dĂ©duis qu’il existe des guerres de chapelles. Ce n’est qu’une hypothèse.

    Manifeste trop ambitieux ?

    Le livre termine sur un « Manifeste pour le renouveau social et critique du design« . Je trouve Ă  titre personnel qu’il est clair et bien construit et j’en partage les intentions, mĂŞme s’il oublie un peu, Ă  mon sens, de parler explicitement de mĂ©thode crĂ©ative, et de pragmatisme qui Ă  mon sens sont indissociables du Design. D’une manière gĂ©nĂ©rale, je pense que ce manifeste n’a pas complètement clarifiĂ© le sens du mot « social » : prĂ©tendant dĂ©passer le clivage créé par son usage, il en reconduit le caractère « tautologique ». Toute activitĂ© humaine est sociale. J’y vois la marque du constructivisme11. Par exemple, on peut s’appuyer sur le concept de catallaxie qui caractĂ©rise notre Ă©poque, injectant de la politique dans tout et dans toutes choses, et perpĂ©tuant l’illusion funeste que les humains « structurent » le monde, en oubliant que le monde, ses lois, son organisation, sont en grande partie hors de notre portĂ©e. Tout n’est pas « design-able ». Le design doit savoir, mĂŞme sur les aspects sociaux, connaĂ®tre ses limites.
    Ce ne sont que des remarques tout Ă  fait marginales : j’ai trouvĂ© cet ouvrage splendide, extrĂŞmement bien structurĂ© et clair, passionnant. A lire en prioritĂ© par tous ceux qui, de près ou de loin, ont des activitĂ©s de conception.

  • Hermès de vives voix

    Hermès de vives voix

    Luc Charbin signe ce beau livre, co-signe pourrait-on dire, car sa femme Alice Charbin l’a illustrĂ©, et Ă  la manière des livres pour enfants, il n’y aucune page de texte sans illustration.
    Ce livre raconte, par le biais de très courts rĂ©cits, une petite partie des histoires de l’entreprise Hermès : des anecdotes, des faits marquants ou sortant de l’ordinaire, quelques Ă©popĂ©es rocambolesques, des bouts de parcours de vie tout entier dĂ©diĂ©s Ă  l’excellence et au savoir-faire d’un mĂ©tier, des scènes drĂ´les, des Ă©clairages sur certains moments de l’histoire de la « maison ».
    J’ai trouvĂ© ce livre très agrĂ©able Ă  lire – je l’ai dĂ©vorĂ© – et très fin : sous les brefs rĂ©cits et les souvenirs, se dessinent en filigrane des vies marquĂ©es par le lien très puissant avec la maison Hermès, et par le goĂ»t de l’excellence. Une prĂ©sentation lĂ©gère, mais qui donne des accès Ă  des histoires chargĂ©es en Ă©motions, en souvenirs, en heures passĂ©es Ă  la tâche. C’est une très Ă©lĂ©gante manière de raconter ces parcours.
    L’introduction, signĂ©e par la directrice du patrimoine d’Hermès (Menehould du Chatelle), apporte une information cruciale, et qui donne une profondeur et une perspective supplĂ©mentaire Ă  ces jolis textes : ces rĂ©cits ont Ă©tĂ© tirĂ©s du « trĂ©sor des archives orales d’Hermès » ! Hermès a en effet, depuis les annĂ©es 1960, commencĂ© une collecte des souvenirs de ses employĂ©s, constituant un patrimoine « d’archives orales » sans cesse enrichi. Je trouve cette idĂ©e si simple et belle, si puissante, si sensĂ©e, que je trouve tout Ă  fait regrettable qu’elle ne soit pas plus rĂ©pandue dans les autres entreprises. C’est en effet une remarquable manière de reconnaĂ®tre le travail des femmes et des hommes, et de transmettre le fruit de travail. Ce livre en est la preuve.
    Merci au site Lolo le blog, oĂą j’ai piquĂ© l’image de la couverture.

  • Faut-il supprimer les subventions aux mĂ©dias ?

    Faut-il supprimer les subventions aux médias ?

    Notez bien que la question n’est pas : trouvez-vous indispensable qu’il y ait des mĂ©dias ? Personne, je crois, ne doute de l’utilitĂ© de pouvoir s’informer librement. Pas de mĂ©dias, pas de libertĂ© d’informer ou de s’informer, ça veut dire dictature. Et pour pouvoir s’informer librement, il faut disposer d’un grand choix et d’une diversitĂ© de sources. C’est ce qu’on appelle le pluralisme. Si tous les mĂ©dias racontent exactement la mĂŞme chose, alors c’est qu’ils ne parlent plus du rĂ©el, et on retourne sur la dictature (c’est le journal du parti). Le rĂ©el, et c’est ce sur quoi les gens veulent avoir des informations, s’apprĂ©hende au travers de filtres cognitifs, et avec des points de vue particuliers. Il n’y a pas d’information objective.
    Non : la question posĂ©e ici est de savoir s’il est une bonne ou une mauvaise chose, pour que les mĂ©dias fassent bien leur travail, de leur donner des subventions. J’ai listĂ© ici des arguments pour ou contre (listes non-exhaustives, que vous pouvez complĂ©ter et discuter en commentaire), et un petit test vous permettra de rĂ©pondre oui ou non à  cette question rĂ©currente.

    Pour les subventions

    • L’activitĂ© mĂ©diatique d’information, consistant à  informer, analyser, enquĂŞter, recouper est beaucoup moins rentable que la diffusion de films ou d’Ă©missions de jeux. Sans soutien, une partie de l’offre d’information disparaitrait et on perdrait en pluralisme
    • Face aux gĂ©ants des autres pays (amĂ©ricains notamment), il convient de soutenir de manière intelligente la production et les activitĂ©s mĂ©diatiques françaises, notamment théâtre et cinĂ©ma. C’est la fameuse exception culturelle. La « culture » n’est pas un bien comme un autre.
    • En ne subventionnant pas la presse et les mĂ©dias, ils seront à  la merci de grands groupes capitalistes, qui pourront faire pression en fonction de leurs intĂ©rĂŞts sur les « bonnes » et les « mauvaises » informations

    Contre les subventions

    • Les subventions maintiennent sous perfusion des mĂ©dias sans aucun lectorat, ou spectateurs. L’argent pris pour les soutenir est de l’argent qui n’est plus disponible pour d’autres activitĂ©s (y compris la crĂ©ation d’autres mĂ©dias, plus rentables). Un mĂ©dia qui rĂ©ussit, c’est un mĂ©dia qui sait trouver des clients, dans un milieu concurrentiel, et ĂŞtre rentable. Au nom de quoi serait-ce une entreprise pas comme les autres ? Par ailleurs, les subventions sont accordĂ©es de manière plus ou moins arbitraires aux diffĂ©rents mĂ©dias
    • Il y a plein de mĂ©tiers diffĂ©rents dans le monde des mĂ©dias (crĂ©ation, production, diffusion, etc.) : Aucun de ces secteurs d’activitĂ© ne fait parti des fonctions rĂ©galiennes de l’Etat.La culture, l’information, dans un pays libre, n’a rien à  faire dans le giron de l’Etat. C’est dans les dictatures, justement, que ces activitĂ©s sont liĂ©es à  l’Etat
    • S’il fallait soutenir un secteur avec des subventions parce qu’y rĂ©ussir est difficile, alors il faudrait soutenir l’ensemble des secteurs, ce qui implique des subventions dans toutes les activitĂ©s, avec une armĂ©e de fonctionnaires pour gĂ©rer tout cela au moins mal.

    Petit sondage

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  • Innovation pour les nuls #6 – Business model ?

    Innovation pour les nuls #6 – Business model ?

    Dans le monde de l’innovation, il est courant d’entendre parler de Business Models, ou de modèles d’affaires. C’est un outil très utile pour concevoir, décrire et clarifier les activités au sein des entreprises. Ce court article vous propose de découvrir ce qu’est un Business Model, quelques outils et canevas utiles pour les représenter, et une classification des grands types de modèles d’affaires.

    Qui dit modèle, dit … modèle

    Un modèle, c’est toujours une simplification de la rĂ©alitĂ©. Le modèle d’affaire simplifie les activitĂ©s des entreprises en les dĂ©crivant comme l’articulation entre 4 types d’élĂ©ments (dĂ©crits ci-après et illustrĂ© par le diagramme). J’ai pris cette dĂ©finition dans l’excellent livre de Clayton Christensen (« The Innovator’s prescription ») qui donne une bonne vision des disruptions en cours et à  venir dans le monde de la santĂ©. C’est un outil indispensable pour rĂ©flĂ©chir à  l’innovation.

    • Proposition de valeur (value proposition) : tout commence par une proposition de valeur, c’est-à -dire un service ou un produit qui aide le client à  faire mieux, plus facilement, plus Ă©conomiquement ce qu’il cherche à  faire (le job-to-done)
    • Ressources : tout ce qu’il va ĂŞtre nĂ©cessaire de mobiliser — personnes, technologies, produits, marques, etc.. – pour rendre effective et dĂ©livrer la proposition de valeur.
    • Processus : toutes les bonnes manières de travailler ensemble, qui incorporent les apprentissages
    • Profit formula : l’équation Ă©conomique du business ; actifs, coĂ»ts de structures, et les marges opĂ©rationnelles. Sans marges, la proposition de valeur ne peut ĂŞtre durablement dĂ©livrĂ©e.

    Représentations & canevas

    Il existe plusieurs façons de représenter un modèle d’affaire (ou Business model). Les plus connues sont certainement :

    • le Business model canevas (celui d’Osterwalder), qui dĂ©taille autour de la proposition de valeur d’une part les activitĂ©s, ressources et partenaires nĂ©cessaires pour la dĂ©livrer, et d’autre part les canaux de distribution et les diffĂ©rents segments de clients à  qui l’on souhaite apporter ce service/cette valeur. Vous pouvez le trouver ici.
    • le Lean canvas, qui est plus orientĂ© sur les projets dĂ©butants, et qui sert à  bien formuler le problème que l’on veut rĂ©soudre (avant de rĂ©flĂ©chir à  la solution). Il est très utile, et la lecture des bouquins de son inventeur aussi (Ash Maurya). L’approche dĂ©veloppĂ©e par l’auteur est très orientĂ©e « fact based » : le canvas sert à  poser ses hypothèses, et à  aller tester les plus risquĂ©es d’abord. Lean Canvas

    Typologie de modèle d’affaires

    Pour finir, des chercheurs — cités par Christensen dans son livre —, Oystein Fjeldstad et Charles Stabell, ont proposé une typologie de BM très différents. Les grands types de Business Models, en quelque sorte. Ils en distinguent 3 sortes, qui se trouvent dans le tableau ci-dessous. Je laisse les noms en anglais pour ne pas risquer de contre-sens.

    Bien sûr, il n’est pas rare que des institutions ou des organisations mélangent plusieurs de ces modèles archétypaux. Et vous ? Quel est votre modèle d’affaire ? Est-il pur ? Est-il hybride ?

    Pour aller plus loin (plus sûrement et plus lentement) :

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  • La grève (Atlas Shrugged)

    La grève (Atlas Shrugged)

    La Grève, roman fleuve, unique, philosophique, est signĂ© Ayn Rand (de son vrai nom Alissa Zinovievna Rosenbaum), philosophe, scĂ©nariste et romancière amĂ©ricaine d’origine russe, nĂ©e en 1905 Ă   Saint-PĂ©tersbourg et morte en 1982 Ă   New York.

    La grève : roman philosophique

    C’est un livre hors du commun : vĂ©ritable roman philosophique, Ă   thèse, il en a les inconvĂ©nients et les qualitĂ©s. Les inconvĂ©nients, tout d’abord : Ă   force de dĂ©montrer les choses, la narration perd en rythme, et certaines tirades des personnages sont franchement surrĂ©alistes (personne ne prend la parole en sociĂ©tĂ© pour faire un discours d’une heure). Mais ce serait oublier les qualitĂ©s, rĂ©elles, du roman. Il y a de très beaux passages, et c’est en partie liĂ© aussi Ă   cet aspect philosophique. Ayn Rand insuffle dans ses personnages quelque chose d’Ă©pique, d’hĂ©roĂŻque, qui par moment touche très juste. Certaines scènes sont tout bonnement extraordinaires, par leur intensitĂ© dramatique mĂŞlĂ©e Ă   un sentiment de justesse morale et philosophique. Le discours de John Galt Ă   la radio incarne tout cela Ă   la fois.
    Le roman est assez simple dans sa structure : on assiste Ă   la lente destruction de la sociĂ©tĂ© industrielle, basĂ©e sur la raison, le respect de la justice, de la propriĂ©tĂ©, par d’obscurs intrigants politiques qui parviennent Ă   retourner les valeurs morales, et Ă   faire triompher le mensonge et la nĂ©gation de la rĂ©alitĂ©, sous couvert d’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral. L’intrigue tient au fait qu’un certain nombre de capitaines d’industrie, de capitalistes, disparaissent de la circulation : sont-ils « dĂ©serteurs », comme le proclame le gouvernement, ou ont-ils rejoints une sorte de « rĂ©sistance », comme les rumeurs semblent l’indiquer ? Je ne vous rĂ©vĂ©lerai bien sĂ»r pas la suite ici, mais elle ne déçoit pas du tout. Le scĂ©nario imaginĂ© autour de Dagny Taggart, personnage principal, est incroyable. Ms Taggart est une femme d’affaire, Ă   la tĂŞte d’une grande sociĂ©tĂ© de chemin de fer familiale. Personnage très attachant, proche d’Ayn Rand, courageuse, libre. PassionnĂ©ment Ă©prise de libertĂ©.

    La grève : roman anti-communiste et rationnaliste

    Quand on sait qu’Ayn Rand a fuit plusieurs fois avec ses parents les rĂ©volutionnaires communistes, et qu’elle a du subir la propagande et la censure, pour finalement devoir quitter la Russie, on comprend mieux son combat pour la libertĂ©. Elle porte, dans La Grève notamment, une charge fabuleuse contre l’altruisme, et la culpabilitĂ© judĂ©o-chrĂ©tienne (le pĂ©chĂ© originel), et prĂ´ne un « égoĂŻsme rationnel ». Selon elle, aucune morale n’est possible en niant le droit pour chaque personne, de poursuivre son bonheur comme il l’entend, et de vivre avant tout pour se rĂ©aliser. Elle a mis en place une philosophie qui me parle : individualiste, rationaliste. Elle est connue sous le nom d’objectivisme. Il est bien clair que son discours est presque inaudible dans les moments que nous vivons : trop individualiste, trop anti-socialiste, pas assez misĂ©rabiliste, pas assez collectiviste, trop attachĂ© Ă  la raison et au mĂ©rite, Ă  l’Ă©change libre et au progrès, et trop peu complaisant avec la moraline de salon, prĂ´nant le sacrifice et la nĂ©gation des valeurs. J’ai le sentiment, en lisant Rand, d’ĂŞtre nĂ© trop tard. Le monde moral d’Ayn Rand, vivant Ă  travers les personnages de la Grève, me semble illustrer l’humanitĂ© dans ses aspirations les plus nobles et exigeantes.
    Certains risquent de ne pas trouver ce roman Ă   leur goĂ»t. Peut-ĂŞtre mĂŞme choquant. Je crois, pour ma part, que les amoureux de la libertĂ© y trouveront une incarnation originale et unique de l’humanisme libĂ©ral, et capitaliste.
    Si vous trouvez que la dernière phrase comporte trop de gros mots, ne lisez surtout pas ce livre.