J’ai eu la chance d’assister Ă une confĂ©rence de Michael BallĂ© (auteur avec Godefroy Beauvallet du livre « Management Lean ») dans le cadre de mon travail. Et Ă la fin de la journĂ©e oĂą nous avions vu cette très intĂ©ressante confĂ©rence, nous nous sommes vu offrir l’ouvrage. Que j’ai lu, et qui est vraiment très intĂ©ressant : j’avais entendu souvent parler du « Lean » sans vraiment savoir prĂ©cisĂ©ment de quoi il retournait. Le quatrième de couverture le dit très bien :
Loin des effets de mode, le management lean n’est ni une mĂ©thode ni une philosophie. C’est avant tout une pratique (…) Si Management Lean est une rĂ©fĂ©rence, c’est parce qu’il ne transige jamais sur les principes essentiels de la pratique lean : assurer le succès durable de l’entreprise, son alignement sur les besoins de ses clients – par le dĂ©veloppement personnel et professionnel de chaque collaborateur -, et plus largement, sa contribution aux objectifs globaux de prĂ©servation de l’environnement et du lien social.
Loin de moi l’idĂ©e de rĂ©sumer cet ensemble de pratiques rĂ©alistes, basĂ© sur l’apprentissage, venu du Japon. Je vous en partage quelques traits marquants que j’ai relevĂ© au fil de la lecture.
Venu du Japon
Le Lean est indissociable du Japon (mĂŞme s’il a Ă©tĂ© formalisĂ© en tant que tel aux USA) : cette pratique, en effet, a Ă©tĂ© construite chez Toyota, et formalisĂ©e au sein du mystĂ©rieux TPS (Toyota Production System). L’auteur Michael BallĂ© est le fils d’un ingĂ©nieur (Freddy BallĂ©) qui a Ă©tĂ© parmi les premiers Ă aller, pour ValĂ©o, Ă©tudier l’organisation de Toyota, sur place, pour en comprendre la logique et la philosophie. C’est une organisation du travail en usine qui est vraiment très diffĂ©rente du Taylorisme. Elle part de l’ouvrier, de l’opĂ©rateur, et des conditions de l’excellence de son travail, au service du client. Et le terme « lean » dĂ©crit très bien la dĂ©marche et la pratique : « sans gras », « dĂ©graissé », le terme dĂ©crit très bien un organisme sans surplus, rĂ©actif et rĂ©silient, fin et dynamique, optimisĂ© en tout point, comme un jaguar. C’est Ă cette image que l’entreprise doit essayer de ressembler dans son fonctionnement pour rester tendue vers son seul objectif (satisfaire les clients), en s’appuyant sur ses seules forces (les humains qui y travaillent, et la manière dont ils travaillent).
Une approche réaliste
Ce qui marque Ă la lecture de l’ouvrage, c’est le cĂ´tĂ© ultra-rĂ©aliste de cette pratique. Pas d’idĂ©ologie, pas d’idĂ©es prĂ©conçues, tout repose sur l’observation et la comprĂ©hension de la rĂ©alitĂ©. La rĂ©alitĂ© de la qualitĂ© des produits, de la qualitĂ© du travail, des conditions de productions, des optimisations possibles. On trouve naturellement au sein du lean le gemba (l’observation terrain), la formation permanente des ouvriers et en gĂ©nĂ©ral des employĂ©s, la recherche et l’analyse des causes des problèmes, la chasse aux gaspillages (ressources, temps, etc..). C’est la rĂ©alitĂ© qui prime ; les humains s’y adaptent.
Centrée sur les produits et les clients
Le but du Lean est de servir au mieux les clients avec les meilleurs produits. La manière de traiter les rĂ©clamations clients liĂ©s Ă des problèmes qualitĂ© est Ă ce titre très Ă©vocatrice de cette approche : qu’est-ce qui dans l’utilisation du produit a cassĂ© la magie du produit, et comment prendre cette rĂ©clamation comme une occasion prĂ©cieuse d’apprendre (qu’est-ce que le client essayait de faire avec le produit ? en quoi le produit ne lui a pas permis de le faire ? quelle situation concrète est Ă l’origine de la difficultĂ© ? qu’est-ce que ça nous dit sur ce qui est important pour le client ? qu’est-ce que nous pouvons apprendre sur le fonctionnement de nos produits ? quel aspect de notre processus de fabrication ou de service a créé le problème ?). Vous l’avez compris, cette manière de voir les choses est intimement liĂ©e Ă l’apprentissage et l’amĂ©lioration permanente.
Une approche basĂ©e sur l’amĂ©lioration permanente
Naturellement, avec cette approche l’amĂ©lioration graduelle et permanente (kaizen est au coeur des pratiques managĂ©riales, au service de la performance. L’effort de chaque salariĂ©, de chaque manager, est que chacun puisse faire son travail avec la plus grande qualitĂ© et dans les meilleures conditions. « Le principe « non coupable » est la clĂ© de l’amĂ©lioration, car il permet de mettre les problèmes en Ă©vidence et de se poser la question « pourquoi » plutĂ´t que la question « qui ». » On retrouve lĂ les principes soulignĂ©s par C. Morel dans son magnifique ouvrage « Eviter les dĂ©cisions absurdes« . Cela a pris du temps, et est très bien symbolisĂ© par un exemple souvent citĂ© pour illustrer la manière dont le Lean s’incarne concrètement dans les espaces de travail. Les opĂ©rateurs chez Toyota ont une ficelle Ă portĂ©e de main qu’ils peuvent tirer dès qu’ils rencontrent un problème impactant la qualitĂ© de la production : dans ce cas, la chaĂ®ne s’arrĂŞte, et les managers convergent vers ce point de la chaĂ®ne, non pour blâmer le coupable, mais pour l’aider Ă trouver une solution. Mais pas en la trouvant pour lui. En vĂ©rifiant que l’opĂ©rateur a bien intĂ©grĂ© le standard de travail, en le (re)formant / ou en se mettant d’accord sur la distinction entre un bon composant ou mauvais composant, en clarifiant les critères, en se mettant d’accord sur la mĂ©thode de test. C’est une manière de toujours considĂ©rer que la qualitĂ© est avant-tout de l’auto-qualitĂ©. La formation est intĂ©grĂ©e au travail lui-mĂŞme.
C’est un ouvrage très facile Ă lire, très inspirant, et dont je vais partager quelques points avec mes collègues. Qu’est-ce que la pratique lean signifie si je l’applique Ă mon propre travail ? en quoi conduit-elle Ă amĂ©liorer certaines de mes pratiques professionnelles ?