Étiquette : France

  • Interview de Daniel Martin

    Daniel Martin tient un site extraordinaire qui est une mine d’informations, d’articles, et de livres, tous écrit par lui et qui permettent souvent de trouver des informations et des synthèses économiques et factuelles précises, détaillées et référencées pour réfléchir. Sa grande intelligence le fait passer des sujets économiques aux sujets de sociétés avec aisance, en passant par la physique et la philosophie. Amoureux de la raison, de la France, rigoureux, j’ai eu envie de l’interviewer.

    Parcours professionnel

    Lorsque j’ai demandé à  Daniel Martin de me résumer son parcours professionnel, il m’a renvoyé vers son CV(qui contient son profil, ses objectifs et ses règles de conduite), et vers un livre (intégralement en ligne) qu’il a écrit : « La France expliquée aux Etrangers ». Les pages 15 à  25 résument son arrivée en France en 1948 (Daniel Martin est né en 1939 en Roumanie), son amour de la France, son parcours scolaire. Je ne peux que vous recommander d’aller lire ce texte bien écrit, simple, vibrant d’un amour de la France inconditionnel. Le livre en entier est formidable. Daniel Martin a suivi un cursus de Grandes Ecoles, et a brillamment commencé sa carrière comme informaticien chez General Electrics, aux USA. Il est revenu vivre avec sa famille en France en 1971. Il a pris sa retraite en 2000.

    Positionnement sur l’échiquier politique ?

    A propos de son positionnement politique, sa réponse est courte et claire :
    libéralisme, économie de marché tempérée par des lois pour sauvegarder l’environnement et assurer la solidarité entre les personnes. Le politicien dont je suis le plus proche est Jean-Marie Bockel, « socialiste libéral ». Ce que je déplore dans la société française : voir mon ouvrage « Valeurs perdues, bonheur perdu : pourquoi notre société déprime ».

    Sur le Libéralisme

    Questionné sur le fait que la pensée libérale ne soit pas connue en France, au point qu’elle soit de droite, alors que dans tous les autres pays les libéraux sont à  gauche, Daniel Martin me répond :
    Si le libéralisme n’est pas connu, c’est 80% la faute des media et des politiciens, et 20 % celle des citoyens qui ne s’informent pas et votent sans savoir. Le libéralisme est de droite en France (et seulement en France !) parce que notre culture est dominée depuis les années 1970 par une croyance dans le tout-état providence (voir « Cours d’économie pour citoyens qui votent »).
    Et de me renvoyer vers l’extraordinaire sondage qui montre que les Chinois croient plus dans les vertus de l’économie de marché que les Français !

    Sur l’Islam :

    L’islam, au 21ème siècle, est devenu un mouvement politique autant que religieux. Comment penses tu que l’islam puisse évoluer ?
    L’islam n’est jamais devenu un mouvement politique, il l’a toujours été car pour un musulman et d’après le Coran, on ne peut séparer religion, politique, justice, enseignement et lutte armée. Je ne sais comment l’islam évoluera dans l’avenir. Aujourd’hui il évolue vers l’extrémisme. Même en Turquie, où les islamistes viennent de remporter les élections et la présidence. Il n’existe pas d’islamisme modéré, Voir « Le terrorisme islamiste : idéologie, exigences et attentats. L’islamisme d’aujourd’hui est dans l’état de sauvagerie où était le christianisme lors des croisades, de l’inquisition, des guerres de religion : nous n’avons que quelques siècles d’avance. La grande différence entre la mentalité et la culture des musulmans (dominées par l’hostilité et le rejet de la responsabilité sur « l’autre ») et notre propre culture est dans « La culture Arabe ennemie de la démocratie ».
    Il termine en m’expliquant que, selon lui, l’élection de Gà¼l en Turquie ne change pas la donne, ni son point de vue qui est que la Turquie ne doit pas entrer dans l’Europe Politique.

    Sarkozy et les réformes

    Pourquoi, d’après toi, Sarkozy a-t-il été l’objet d’une véritable campagne de « diabolisation » pendant la campagne présidentielle ?

    La diabolisation des adversaires est habituelle dans toutes les élections des pays démocratiques. Elle est pratiquée par les gens qui n’ont pas grand-chose à  proposer.

    Que penses-tu des réformes mises en oeuvre depuis la présidentielle ? Vois-tu dans les quelques reculades (université, taux de non-remplacement des fonctionnaires, service minimum) un échec, où une stratégie visant à  ne pas entrer en conflit frontal ?
    M. Sarkozy est, comme M. Chirac, effrayé par les syndicats, qui ne représentent que 8 % des 40 % de Français qui travaillent, c’est-à -dire une infime minorité. Son courage est donc limité – à  moins que ce soit son aptitude à  combattre vraiment. Il préfère reculer (universités, service minimum, nombre de fonctionnaires…) Mais il arrivera peut-être :

    • à  faire travailler les Français un peu plus ;
    • à  faire garder les enfants de 16 à  18h et à  faire donner des cours de soutien à  ceux qui en ont besoin.

    Réforme du PS

    Quelle est selon toi la ligne de scission entre la gauche et la droite ?
    La ligne de scission réelle entre la gauche et la droite est la répartition de la valeur ajoutée entre travailleurs, actionnaires et Etat. La ligne qu’on voit à  la télévision est une fiction, une posture, une tromperie ou une illusion qui varie avec le politicien et le journaliste considéré.
    Suis-tu les réformes du PS en cours ? Quelle te semble la voie à  suivre pour retrouver un PS fort dans les prochaines années ?
    Je suis les réformes du PS. Pour moi, ce n’est pas M. Hollande qui est le plus grand handicap de Mme Royal, c’est Mme Royal qui est le plus grand handicap des socialistes, car elle combine idées creuses et popularité.
    J’ai également demandé à  Daniel Martin de me donner les noms de trois personnes qu’il souhaiterait voir répondre aux mêmes questions, et il m’a cité :

    • André Comte-Sponville, philosophe
    • Luc Ferry, philosophe
    • Leclerc, patron des Centres Leclerc.

    Ce qui n’a fait que confirmer mon sentiment de proximité intellectuelle avec Daniel Martin (sur les valeurs, parce que sur le reste je ne me permettrais même pas de me comparer à  lui) : Compte-sponville et Luc Ferry sont des philosophes passionnants, que j’aime beaucoup lire, et Michel-Edouard Leclerc gagne certainement à  être connu.
    Un grand merci à  Daniel Martin d’avoir pris le temps de répondre à  mes questions, en me citant à  chaque fois ses ouvrages ou articles qui permettaient d’approfondir. Je ne peux que vous conseiller d’aller lire régulièrement des articles sur son site : c’est du grand art et ça apporte beaucoup de réponses !

  • Contre l'oubli

    11 septembre 2007 à  19 h

    RASSEMBLEMENT
    EN HOMMAGE À TOUTES LES VICTIMES D’ATTENTATS

    au Mur de la Paix
    (Champ de Mars, en face de l’École Militaire, Métro École Militaire)
    Clara et Marek Halter, le cinéaste suédois Bo Persson, les comédiens Nathalie Roussel et Eric Pierrot
    Diagne Chanel, Olivia Cattan, Dounia Bouzar
    Richard Rossin, Sihem Habphi, Bertrand Lebeau
    avec le concours artistique de la chanteuse
    Yasmine Modestine
    et le message du Dr Judea Pearl
    en présence de nombreuses personnalités
    et de représentants d’associations mobilisées contre le terrorisme, pour la défense des victimes,
    venus de divers pays frappés par le terrorisme.

    Ce rassemblement à  lieu à  l’appel des associations :
    AIME (d’Ailleurs ou d’Ici Mais Ensemble), AlgériEnsemble, Amitié Judéo-Noire, Bnai Brith de France, Cap 21, Comité Soudan, Congrès Mondial Amazigh, LICRA (Ligue Internationale contre le racisme et l’antisémitisme), Mouvement de la Paix, MPCT (Mouvement Pour la Paix et Contre le Terrorisme), Ni Putes Ni Soumises, Paroles de Femmes, PEREC (Pour une École Républicaine et Citoyenne), Primo Europe, Regards de Femmes, UEJF (Union des Etudiants Juifs de France), UFAL (Union des Familles Laïques), Urgences Afrique.

  • Contre la déraison anti-américaine

    Drapeau américainCe petit article juste pour signaler une excellente interview de Nicolas Lecaussin (Président de l’IFRAP) sur le site de la cellule Jeune de l’Association France Etats-Unis. Elle date un peu, mais le propos est toujours complètement actuel. Si les tirades anti-Bush vous fatiguent, si vous savez que Guantanamo n’est pas un camp de concentration, alors cette interview est pour vous !
    (suite…)

  • La politique des 5 prochaines années

    Vous voulez vous faire une idée par vous-même ? Vous avez envie de voir ce qui va être l’ossature politique des 5 prochaines années ? Alors il faut aller voir ou lire le discours de politique générale qu’a prononcé F. Fillon devant l’assemblée hier. C’était un très beau discours, sincère, vrai, pédagogique, très bien structuré. Tous les sujets sont balayés en allant à  l’essentiel des réformes que Fillon veut mettre en oeuvre.
    Il confirme le cap proposé aux français pendant la campagne présidentielle. Je l’ai lu hier soir, et j’ai été rassuré sur la volonté de changement, et sur l’intelligence de notre premier ministre. Les vrais réformes ne sont possibles qu’en regardant la réalité en face, et en disant la vérité. Et dire la vérité nécessite toujours du courage. Visiblement, F. Fillon n’en manque pas !
    J.-M. Thibault (Secrétaire Générale de la CGT) croit faire une critique redoutable à  Fillon en dénonçant une politique du fait accompli ; en fait, on ne peut pas lui faire de plus beau compliment ! C’est exactement pour cela que les français ont élu Sarkozy : pour accomplir le travail, et suivre rigoureusement la ligne indispensable pour réconcilier les français avec la politique : « Faire ce qu’on dit, dire ce qu’on fait. »

  • Pauvres Americains et riches Francais

    Lorsque l’on discute au Café du Commerce, la discussion finit souvent sur une comparaison des USA (ou du Royaume-Uni) et de la France. Et lorsque l’on avance l’argument consistant à  dire que les USA sont plus riches que nous, on se voit rétorquer quasi-invariablement l’argument massue : « ils sont plus riches globalement, mais ce sont les riches qui en profitent ! les inégalités là -bas sont énormes ! Ils ont plus de pauvres au final que nous. Quel super système qu’un système qui produit plein de richesses et plein de pauvres ! ». A cela il n’y a qu’une réponse : aller regarder les chiffres et la réalité…
    Une première mise en garde consiste à  rappeler qu’inégalité n’est pas synonyme de pauvreté. Une deuxième étape dans la réflexion consiste à  préciser que si les inégalités peuvent être choquantes, elles ne sont pas vécues, pensées et compensées de la même manière dans toutes les sociétés.
    Pour ne pas tout confondre, il est également utile d’aller regarder les comparaisons chiffrées, et d’en retenir les conclusions.
    Une étude très complète se trouve sur le site de Daniel Martin : j’en rappelle ici les principales conclusions :

    En définitive, à  niveau de vie comparable, les taux de pauvreté américain, 12.5 %, et français, 11.7 %, sont très voisins. Dans ce domaine aussi, la vérité des chiffres dément les allégations de nos concitoyens antiaméricains qui essaient de nous faire croire que les Américains sont bien plus malheureux que nous. Rappelons-nous que :

    • Le taux de chômage français fin 2006 est de 8.8 %, alors qu’il est de 4.4 % aux Etats-Unis selon le Department of Labor (ministère du travail des Etats-Unis), statistique téléchargée le 30/11/2006 de la page d’accueil http://www.bls.gov/
    • Le niveau de vie moyen est 50 % plus élevé aux Etats-Unis qu’en France.
    • La France reprend l’avantage en matière d’inégalités de revenu disponible, avec un indice de Gini de 0.268 contre environ 0.466 aux Etats-Unis (où les impôts ne changent pas beaucoup cet indice).

    Pour bien comprendre pourquoi, malgré ces chiffres éloquents, on entend souvent parler d’une proportion inquiétante de pauvres aux USA, il est bon d’aller lire l’excellent article de Christophe Vincent, « Le seuil de pauvreté, un indicateur qui n’indique rien. » Il faut vraiment lire cet article court, simple à  comprendre et direct. Il y redéfinit deux notions importantes : le salaire médian, et le seuil de pauvreté.

    • Le revenu médian : c’est le revenu qui coupe en deux la population (la moitié gagne moins, la moitié gagne plus). A ne pas confondre avec le revenu moyen.
    • Le seuil de pauvreté : il correspond à  la moitié du revenu médian

    Christophe Vincent montre ensuite, à  l’aide d’un exemple limpide, comment le seuil de pauvreté ne permet ni de refléter la réalité de la pauvreté, ni de comparer deux pays. L’exemple est très simple : on considère deux populations, avec deux répartitions de revenus. Extrait :

    Supposons qu’aux États-Unis, 30% des habitants aient un revenu compris entre 200 et 300 KF, que 20% aient un revenu compris entre 300 et 600 KF, et que les 50% restants aient un revenu encore supérieur. Le revenu médian pour la population des États-Unis serait alors de 600 KF ( 50% gagnent plus, 50% gagnent moins ). Le « seuil de pauvreté » serait donc de 300 KF (la moitié du revenu médian). Trente pour cent des habitants des États-Unis vivraient en dessous du « seuil de pauvreté »! Mais avec un revenu compris entre 200 et 300 KF, pourrait-on vraiment dire que les États-Unis comptent 30% de pauvres?
    Supposons maintenant qu’en France, 50% des habitants aient un revenu compris entre 50 et 100 KF, les autres 50% ayant un revenu supérieur. Le revenu médian français serait donc de 100 KF. Le « seuil de pauvreté » serait de 50 KF. Personne en France ne vivrait donc en dessous de ce fameux « seuil de pauvreté »! Pourrait-on dire pour autant que la France ne comporte que des gens riches?
    Avec ces deux exemples, on voit déjà  bien que ce prétendu seuil de pauvreté ne reflète absolument pas la réalité de la pauvreté.
    Mais en plus, il ne permet absolument aucune comparaison entre les différents pays, le « seuil de pauvreté » de chacun n’étant pas le même. Dans notre exemple, pourrait-on sérieusement soutenir que la situation des Français est plus enviable que celle des Américains?
    Ce seuil de pauvreté est donc un très mauvais indicateur. On ne peut en tirer aucune conclusion valable. C’est un indicateur… qui n’indique rien du tout. Il ne permet pas de dire si les 19% d’Américains considérés comme pauvres sont réellement pauvres. Il ne permet pas de dire s’il y a trois fois plus de pauvres aux États-Unis qu’en France (ce dont je doute).
    Ce « seuil de pauvreté » n’a en fait qu’un seul intérêt: c’est un bon épouvantail. Les adversaires du libéralisme de mauvaise foi n’ont donc sans doute pas fini de l’agiter.

    Que dire de plus ? Maintenant, si au détour d’une conversation quelqu’un dénonce le système américain à  cause de son injustice (rendez-vous compte : 19% de pauvres, ma bonne dame!), vous pourrez lui dire que ce n’est pas si simple, ou mieux, l’envoyer ici pour lire cet article ! ;)