Étiquette : Progrès

  • Sur les ”superprofits » …

    Un petit billet juste pour signaler un article intéressant à  lire aujourd’hui dans le Figaro : Qui profite des superprofits? . Y. de Kerdrel et L. Mauduit continuent leurs intéressantes controverses. Cet article m’a fait penser à  un billet que j’avais écrit l’autre jour, concernant les « superprofits ».
    Une petite citation de l’article, pour la route :

    Je vous l’avoue : moi, cela me laisse pantois. Il s’agit certes d’un record historique. Mais ce mot de superprofit n’a aucun sens. Ou plutôt si. Dans la bouche de ceux qui l’utilisent, il suggère que le bénéfice de Total serait excessif. Ce qui revient à  dire qu’il y aurait une norme pour les profits : petits, ils seraient tolérables ; gros, ils seraient outranciers. Ceci procède d’une conception ringarde de l’entreprise qui me choque. C’est une conception de l’économie qui est profondément choquante et qui témoigne à  quel point le pays a été gangrené par soixante ans d’idéologie marxiste. Qu’on en revienne donc aux bases : une entreprise est faite pour gagner de l’argent. Et plus elle en gagne, mieux cela vaut. Mieux cela vaut pour tous, pour les salariés, pour les actionnaires, les clients et même pour l’État. La seule question qui vaille : vaut-il mieux les profits historiques de Total ou les 10 000 suppressions d’emplois d’Airbus ?

  • Ségolène Royal : interventionnisme, démagogie et quelques silences en forme d’aveux

    Hier soir, comme beaucoup de Français j’imagine, j’ai regardé la prestation de Ségolène Royal sur TF1. Si je devais résumer, je dirais qu’elle nous a servi un vaste foutoir de bons sentiments et de promesses sans réelle assise économique. Voyons plus en détail.

    Interventionnisme

    Ségolène Royal est bien dans la droite ligne des politiciens qui surtout ne veulent pas restreindre le rôle de l’Etat, et ses domaines d’intervention. En voilà  trois exemples abordés hier :

    • augmentation du SMIC et des autres salaires par intervention de l’état : les entreprises n’auront bientôt plus qu’à  suivre une grille des salaires fournie par le Ministère du Travail : vive la planification !
    • l’annonce de la réquisition des logements inoccupés par l’Etat est une atteinte à  la propriété : mais il vrai que nous devons tout mettre en commun pour le bien général : vive le communisme !
    • l’annonce d’empêcher les licenciements dans les entreprises qui font des profits ; les patrons peuvent être plus cool maintenant : l’Etat providence va gérer leur boîte à  leur place (il est vrai que l’Etat a depuis longtemps fait ses preuves en tant que gestionnaire et stratège !)

    La position du curseur qui définit le rôle que doit prendre l’Etat dans la force de ses interactions avec le marché a été clairement annoncée hier soir : interventionnisme forcené. Il est vrai que c’est ce que les Français voulaient entendre, tant ils sont habitués à  systématiquement se tourner vers l’Etat pour chaque problème de la vie.

    Démagogie

    Si la démagogie est l’art de flatter les gens en leur disant ce qu’ils veulent entendre, et la rouerie l’art d’utiliser l’habilité de la parole jusqu’au mensonge, alors Ségolène Royal est une sacrée démagogue, voire une menteuse. Dire tout et son contraire dans un intervalle de trois minutes, c’est ce qu’elle a fait à  plusieurs reprises hier :

    • augmenter le SMIC et diminuer le chômage (voir mon billet précédent)
    • il faut diminuer la dette de l’Etat Français, mais par contre, on ne touche pas aux fonctionnaires !
    • à  propos des OGM : il faut faire dela recherche sur les OGM, car ils peuvent apporter beaucoup, en terme de santé et d’environnement, mais José Bové a eu raison de faucher des champs d’OGM (contre ce que la justice vient pourtant de décider)
    • quant au progrès technique, il détruit des emplois, mais il crée des emplois (dans la même phrase!)

    N’oublions pas que la cohérence du discours, allant avec une utilisation saine de la raison, comporte le principe de non-contradiction : dois-je en conclure que Ségolène Royal, hier ne s’adressait pas à  la raison ?

    Quelques silences en forme d’aveux

    Certains sujets importants n’ont pas été abordés, et qu’ils aient donné lieu à  des questions ne change pas grand-chose :

    • la pérennité du système de retraite a fait l’objet de la première question et Ségolène Royal, au lieu de répondre sur le fond de la question (l’âge des départs à  la retraite) a préféré botter en touche et parler du montant des petites retraites
    • un intervenant, étudiant en chimie, a évoqué les émeutes de l’hiver 2005 : là  encore, silence sur ces évènements graves et sur leurs causes
    • en enfin le clou du spectacle : personne n’a abordé les 35 heures ! Ségolène Royal, selon moi, avait pourtant le devoir de clarifier sa position sur ce point précis…

    Ca fait franchement froid dans le dos !

    Profondeur des vues journalistiques

    Pour finir, il faut décerner la palme du ridicule à  PPDA, dont le rôle est pourtant bien passif dans ce type rendez-vous : les seules interventions qu’il a faite pour rappeler des questions posées, et que Mme Royal avait oublié portaient sur … les 35 heures ? les banlieues ? l’inégalité de traitement homme/femme au travail ? le coût de la main d’oeuvre ? NON ! PPDA est intervenu pour relancer sur deux points essentiels de la campagne présidentielle, et cruciaux pour l’avenir de la France :

    • le remaniement en cours de l’équipe de Ségolène Royal, mais sur les gens, hein ?
    • est-ce que M. Hollande aura un poste et si oui, lequel ?

    Merci pour ces interventions de journaliste « peopolitique », on s’en serait passé, et j’aurais pour ma part préféré qu’il relance Mme Royal sur les émeutes…
    Pour finir sur une note d’humour, le monsieur qui a posé la question concernant le futur poste de Hollande en cas de victoire de Royal, l’a tourné de la sorte — vous me direz que j’ai l’esprit mal tourné, et c’est peut être vrai! – :

    Quelle sera la position de M. Hollande?
    :mrgreen:

    Posée à  la femme de l’intéressé, c’est une question qui ne manque pas de piquant ; ça m’a bien fait marrer. Il n’y a que les propos de Ségolène qui auraient pu être aussi drôles, s’ils n’avaient pas été aussi pathétiques.

  • Raison et Croyance

    Raison et Croyance

    Comment éviter le pire ?

    La montée en puissance de l’islam, comme l’indolence résignée des nihilistes, ne présagent rien de bon pour l’avenir de l’humanité. Pour qui est attaché à  la raison et au doute, pour qui a peur de l’aveuglement des convictions et des croyances, et de la violence qui en résulte, cette situation est difficilement tenable. S’il n’y avait pas le danger, je pourrais me contenter du doute. Je vis assez bien avec. On peut facilement douter de tout, mais difficilement croire en n’importe quoi.
    Mais la force est du côté de ceux qui croient. La force est du côté de celui qui s’abîme dans l’absolu. Celui qui se perd et s’oublie, est capable de tout. Du pire bien souvent. Comment éviter le pire ?

    Doute et Foi

    Le doute est le point de départ de la philosophie : la réflexion commence avec la mise en question. La croyance est le point de départ de la foi : l’abandon dans quelque chose de plus grand que nous, la confiance absolue dans la vérité d’un objet inconnu. Comment marier le doute — indispensable pour qui aime la vérité — avec les croyances — indispensables pour qui veut espérer, aimer et vivre ? Comment croire sans abandonner la vérité, comment penser sans perdre espoir ? Comment, pour celui qui pratique le doute, prendre exemple sur ceux qui croient et prendre cette force ?

    Acte de croyance et objets de croyances

    Le seul moyen de ne pas abandonner la vérité, c’est de conserver le doute sur ce qui est incertain, et d’admettre ce qui est sûr. En se laissant la marge de manoeuvre pour en douter, au besoin. Le doute aura toujours la raison pour lui.
    Croire en quelque chose. Il y a là  un acte (croire), et un objet (quelque chose). La force du croyant, c’est dans l’acte de croire qu’il la puise, pas dans l’objet de la croyance, ni dans la véracité de cet objet. Il faut donc garder ce qui donne la force (l’acte), et forger des objets de croyances moins excessifs que ceux qui ne croient en rien, ou en Dieu.

    Nihilistes et Religieux

    Ceux qui pensent ne croire en rien se mentent à  eux-mêmes et affichent seulement un manque de lucidité sur leur fonctionnement. C’est un « non » lancé à  la cantonade, de même que la Foi est un « oui » lancé au monde. Quoi qu’il en soit, « Rien » (pour les nihilistes) ou « Tout/Dieu » (pour les religieux) sont des objets de croyances hors de la portée de la raison. Proposons donc cet exercice à  la raison : identifier ses croyances, les expliciter pour les forger et les partager, et garder l’acte de croire pour celles que la raison aura validées. Nous pourrons alors — avec un risque moindre — nous abandonner raisonnablement dans une croyance, non nocive. Les grands thèmes de la philosophie sont d’ailleurs résumés à  cela : les concepts pour lesquels l’éclairage de la science n’a pas suffit à  tout résoudre, et qui impliquent toujours, pour avancer, un mariage de raison et de croyance.

    Mes croyances

    Je propose ici quatre croyances que j’ai, et dans lesquels je peux puiser une certaine force, quand le doute se calme. Ce n’est pas exhaustif, c’est valable maintenant et pour moi, et discutable, bien sûr (doute oblige).
    Deux croyances individuelles, et deux croyances collectives.

    Amour et Liberté

    Au niveau individuel, je crois à  l’existence de l’amour et de la liberté. Ce sont deux choses dont l’existence même peut être mise en doute, mais dans lesquelles je crois, et qui me sont indispensables. Je pense que l’amour vécu et partagé peut apporter du bonheur. L’acte d’aimer est la quintessence de la croyance. Dieu est amour, parait-il. L’amour c’est le don et la confiance, aussi.
    Je pense que la liberté individuelle, vécue et assumée, peut apporter du bonheur. Toujours accorder à  l’autre une part de liberté n’est pas si facile, mais tellement profitable pour tout le monde quand on le pratique. Tellement indispensable, que ce soit en pensée ou en acte. C’est garder à  chaque être humain sa dignité. Il est important de savoir ce que l’on aime, qui l’on aime, et où notre liberté nous porte.

    Progrès et Vérité

    Au niveau collectif, je crois à  l’existence du progrès et de la vérité. Ce sont deux choses dont l’existence même peut être mise en doute, mais dans lesquelles je crois, et qui me sont indispensables. La vérité est le lieu d’échange de l’intellect (comme les sens sont les lieux d’échanges des corps), et le progrès est ce but commun regroupant tous les humains de bonne volonté. La croyance dans le progrès est la croyance dans la possibilité d’un progrès : non pas que tout ira forcément mieux demain qu’aujourd’hui, mais qu’avec beaucoup d’efforts, de chance et de bonne volonté, les choses peuvent aller mieux demain qu’aujourd’hui, que le pire n’est jamais sûr. Toujours identifier ce qui fait régresser ou progresser l’humanité, et choisir le progrès à  long terme est souvent une bonne politique. En tout cas, refuser ce qui fait clairement régresser.

    Suite …

    Bien d’autres croyances existent, dans ma tête comme dans la vôtre. Je disais plus haut que tout cela était discutable, et heureusement : on en discute ?