Blog

  • Les nécessaires réformes, ou la réalité en face

    Dans un article paru dans Le Monde le 22/10/2006, Eric le Boucher écrivait un article très intéressant et très direct intitulé « Adaptation obligatoire » (texte intégral trouvé sur FulcanelliPolitik). Sa réflexion écarte d’emblée les extrêmes (gauche et droite), ce qui semble toujours un préalable utile.
    Cet article part du constat fait par un professeur d’Harvard (Philippe Aghion) dans le cadre d’un think tank belge (BRUEGEL) : en très gros résumé, la raison pour laquelle l’Europe voit son PIB progresser nettement moins vite que celui des Etats-unis — par exemple – est le fait que les pays de la zone EU (dont la France) n’ont pas intégré les réalités suivantes dans leur fonctionnement :

    1. L’innovation est le moteur de la croissance, il faut donc booster les dépenses de R&D et de recherche. Mais il faut également mettre l’accent sur les voies indirectes de l’innovation, c’est-à -dire créer les conditions micro et macro-économiques de la croissance (favoriser la création d’entreprise et la concurrence, l’éducation, l’efficacité du marché du travail, le développement financier et conduire des politiques fiscales cohérentes)
    2. Les politiques de R&D et de réformes structurelles doivent être mise en cohérence
    3. Des politiques d’accompagnement des réformes doivent être menées pour aider les secteurs qui participent moins à  la croissance par l’innovation, et aider les acteurs de ces secteurs à  se reconvertir
    4. Une priorisation des réformes est indispensable en évaluant le ratio (participation à  la croissance)/(coût social) de chaque réforme, afin de savoir quelles sont les priorités, et quelles sont les réformes à  mener conjointement

    La France ne s’est pas adaptée à  ces changements profonds de culture, et de mode de fonctionnement. Elle pratique l’imitation, au lieu d’innover pour de bon.
    Fort de ce constat, Eric Le Boucher liste les recommandations faites aux futurs candidats à  la présidentielle par trois hommes politiques de droite, du centre et de gauche (Baverez, Camdessus et Attali), en ne conservant que la partie des recommandations que l’on retrouve chez les trois auteurs. Il faut — selon ces trois auteurs, donc – que les hommes et femmes politiques :

    1. Fassent la pédagogie de cet ordre neuf.
    2. Décident d’un investissement d’ampleur nationale pour entrer  » hardiment » (Camdessus) dans la croissance par l’innovation. Il n’est que temps de mettre le paquet sur l’université et sur la recherche-développement publique et surtout privée. Un zéro de plus aux budgets doit être le slogan et l’efficacité mesurable, la règle
    3. Combattent les rentes (notamment celles accrochées à  l’Etat) pour favoriser la création. « Créer, attirer et retenir une classe créative », résume Jacques Attali. « Lever tous les obstacles au dynamisme entrepreneurial », écrit Camdessus. « Stopper l’hémorragie des talents », dit Baverez.
    4. Incitent à  travailler plus, ce qui est la seule solution pour rétablir une société équitable. « Un Français produit 35 % de moins qu’un Américain durant sa vie active », calcule Attali, voilà  la source première de l’appauvrissement relatif.

    Cela confirme bien, à  mon avis, le statut particulier de l’élection présidentielle à  venir : la question n’est pas tellement de savoir quels sont les programmes, ni qui va les défendre. La question est de savoir si celui — ou celle — qui sera élu(e) aura le courage politique de mettre en oeuvre les réformes objectivement nécessaires. Pour moi la réponse est assez évidente : Sarkozy est le seul capable de faire cela ; il parait en tout cas faire sienne – sans tabou – la devise suivante, si importante dans le travail comme dans la vie pour mener le changement à  bien :

    Faire ce qu’on dit, dire ce qu’on fait.

  • Citation #3

    Il n’y a rien de plus pratique qu’une bonne théorie.
    Kurt Lewin

  • Partager ce qui n’existe pas : donner forme aux idées…

    Partager ce qui n’existe pas : donner forme aux idées…

    En tant que bon matérialiste de base, je ne crois pas à  l’existence des idées (ou des pensées) indépendamment de la matière (qui en est le support physique). Cela signifie qu’une idée n’est qu’une configuration particulière de flux entre neurones. Un flux, par essence, est un mouvement. Donc un idée est quelque chose de nécessairement dynamique. C’est l’expérience que l’on en a d’ailleurs : un idée est mouvante, et on ne la saisit qu’au moment où elle se déroule dans notre tête…

    Ce que les hommes cherchent à  personnifier dans le mot « pensée », c’est la matière en mouvement.

    Edgar Allan Poe

    Si une idée est une configuration neuronale, alors elle n’est réelle et n’existe qu’au moment où je la pense. Comment pourrait elle exister encore si on n’est plus en train de la penser ?

    Deux personnes ne peuvent pas penser la même chose exactement : il est impossible de quantifier ce qu’une idée peut provoquer de sentiments, d’émotions et de résonances personnelles, lorsqu’elle est pensée ; puisque ça implique un ressenti qui par définition est une boucle centrée sur celui qui pense (les sentiments sont la conscience d’une émotion + l’émotion consciente qui en résulte) !

    Comment partager les idées, alors ?
    Comment diminuer – un peu — notre isolement intellectuel ?
    Il y a deux manières de le faire, qui consistent toutes les deux à  lui donner forme : pas de partage d’idée sans la mettre hors de notre tête, c’est une évidence…

    La première, c’est de formuler les idées en mots. A l’oral ou à  l’écrit, peu importe. Formuler sa pensée, comme l’étymologie l’indique, c’est lui donner forme. Et cela aussi est conforme à  notre vécu (demi-boutade de source inconnue…) :

    Comment puis-je savoir ce que je pense, si je ne l’ai pas encore dit ?

    La deuxième manière de savoir si on a la même idée, et si on la partage, c’est d’envisager ensemble l’action qui peut en résulter, et de la mener à  bien. Cela permet de focaliser sur UNE application de l’idée, et de lui donner forme. C’est finalement le moyen le plus efficace pour partager des idées : les appliquer…!

    Le plus sûr moyen de rester en contact intellectuel avec quelqu’un, c’est bien de faire des projets ensemble, non ?

    La véritable forme du sentiment, ce n’est pas la conscience qu’on en a, mais l’action qu’on en tire.

    Ramon Fernandez

  • Vérité ou réalité : faut-il choisir ?

    Toute réflexion commence par la définition propre des concepts utilisés, non ?

    Réalité : ce qui existe indépendamment du sujet, ce qui n’est pas le produit de la pensée.

    Vérité :

    1. Scientifique : connaissance reconnue comme juste, comme conforme à  son objet et possédant à  ce titre une valeur absolue, ultime
    2. Philosophie : norme, principe de rectitude, de sagesse considéré(e) comme un idéal dans l’ordre de la pensée ou de l’action
    3. Logique : conformité de la pensée ou de son expression avec son objet

    La réalité contient la vérité, puisqu’elle englobe le monde entier, donc toutes les pensées que les humains peuvent avoir sur le monde.
    Constater la différence entre vérité et réalité, c’est le premier pas. On peut ensuite souligner ce qui différencie les deux, ou ce qui les rapproche. Ce qui différencie les deux, c’est le sujet qui pense ; c’est souligner le point de vue particulier — limité – sur l’universel. Souligner la différence, c’est donc souligner l’incomplétude de l’être humain, son manque d’aptitude à  dire le réel.
    Souligner ce qui les rapproche, c’est souligner la possibilité d’une description partagée du monde, indépendamment du sujet. La science aide à  ce rapprochement. Le dialogue aide à  ce rapprochement. Exprimer des points de vue différents, c’est déjà  partager plus que le silence, et les rapprocher par le partage.
    Vouloir systématiquement dissocier vérité et réalité est dangereux : c’est le jeu des relativistes. « Puisque chacun possède sa part de vérité, alors aucune n’est vraie ». C’est oublier un peu vite que chacun peut penser faux. Toutes les vérités individuelles ne sont pas forcément équivalentes.
    Il me semble que chacun doit faire l’effort de diminuer l’écart entre sa vérité (sa manière de penser le monde) et la réalité (le monde lui-même). On peut le faire de deux manières, et les deux sont nécessaires : adapter l’image que l’on se fait du monde, et changer le monde en suivant notre volonté. Il n’y a donc pas à  choisir entre vérité et réalité ; notre vérité, c’est notre volonté d’agir, de changer les choses, et la réalité c’est l’espace de travail, qu’il faut savoir accepter.
    Pour agir bien, il faut savoir accepter le seul terrain de jeu qui nous est donné.

    Toute vérité est une route tracée à  travers la réalité.[Henri Bergson]

  • Equilibrer la tolérance : une nécessité !

    Commençons – comme d’habitude – par une définition :

    Tolérance :

    1. Fait de tolérer quelque chose, d’admettre avec une certaine passivité, avec condescendance parfois, ce que l’on aurait le pouvoir d’interdire, le droit d’empêcher.
    2. État d’esprit de quelqu’un ouvert à  autrui et admettant des manières de penser et d’agir différentes des siennes.

    et par une citation :

    Tolérer, c’est accepter ce qu’on pourrait condamner, c’est laisser faire ce qu’on pourrait empêcher ou combattre. C’est donc renoncer à  une part de son pouvoir, de sa force, de sa colère. […] La tolérance ne vaut que contre soi, et pour autrui. Il n’y a pas de tolérance quand on n’a rien à  perdre. […] Tolérer, c’est prendre sur soi. […]
    André Comte-sponville (1952 – ) Philosophe français

    La tolérance n’est pas une valeur positive en soi ; c’est — comme pour beaucoup de choses — une valeur pour laquelle le juste équilibre est à  chercher. Trop et trop peu sont synonymes d’aspects négatifs.
    Pas assez de tolérance, c’est ce qu’on appelle le sectarisme ou l’intégrisme.

    Tolérance. C’est arriver à  penser : « Bien que je croie avoir raison, et que la vérité existe, je ne ferai rien pour vous l’imposer »

    Albert Memmi (1920 – 2020), écrivain et essayiste tunisien, Extrait d’ Exercice du bonheur

    Les excès des religions de tous poils illustrent bien l’intolérance.
    Mais, Trop de tolérance, c’est ce qu’on appelle le laxisme, ou la complaisance :

    Sous prétexte de tolérance, on devient complaisant.

    Marie-France Hirigoyen (1949 – ) psychiatre et psychothérapeute familiale française.

    Il est important dans nos sociétés ouvertes, qui ont fait l’effort pendant longtemps, et c’est un grand bienfait, de conquérir la tolérance pour pouvoir vivre en paix, de ne pas s’enfoncer dans l’excès qui est l’inverse de l’intolérance, à  savoir la complaisance.

    Toute tolérance devient à  la longue un droit acquis.

    Georges Clémenceau (1841 – 1929) homme d’Etat français, extrait d’Au soir de la pensée

    Tout ce qui vient empêcher l’ouverture, tout ce qui veut voir disparaître la tolérance, on doit le combattre, et ne pas le tolérer. Il est important de tolérer ce qui est tolérable, et d’être intolérant avec ce qui ne l’est pas. Qu’est ce qui ne l’est pas ? la violence physique et psychologique faite à  l’enfance n’est pas tolérable. La violation flagrante de liberté individuelle n’est pas tolérable. Le racisme n’est pas tolérable. D’une manière générale, et sans tomber dans le légalisme, toutes les entorses faites aux règles de vie communes (le Droit) sont intolérables.Soyons assez intelligent pour reconnaître l’intolérable, afin de continuer à  vivre dans une société tolérante !
    Pour finir, une petite citation sur les rapports entre religion et tolérance, qui fait tout de même penser à  l’Islam :

    Une religion qui peut tolérer les autres ne songe guère à  sa propagation.

    Montesquieu (1689 – 1755) penseur politique, précurseur de la sociologie, philosophe et écrivain français des Lumières

  • Citation #2

    Tout ce qui existe dans l’Univers est le fruit du hasard et de la nécessité.

    Démocrite (vers 460-370 avant J.C.),
    philosophe grec.