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A : je dois avouer que j’étais content de voir que Juppé s’est fait sortir, même s’il semble compétent. Il a un air de dédain et de supériorité assez énervant…ils ont perdu le plus compétent !
B : euh…compétent ok, mais il y en a d’autres, des personnes compétentes tout de même, dans le gouvernement !
A : ah bon ? qui ?
B : eh bien, Bertrand, Fillon sont compétents, je trouve. Kouchner et Hirsch sont compétents, non ?
A : mouais…ils ne doivent pas être à l’aise Kouchner et Hirsch, avec leurs convictions. C’est incroyable, j’ai entendu Jouyet (secrétaire d’état aux affaires européennes, ex-proche de Hollande) à la radio, il était devenu plus à droite que les gens de l’UMP, comment on peut changer de convictions comme cela ?
B : tu crois que leurs convictions sont si éloignées que cela, au PS et à l’UMP ? il veulent la même chose, ce sont les moyens pour y arriver qui font débat !
A : non, tu ne peux pas dire ça ! ils ne veulent pas la même chose ! leurs programmes n’ont rien à voir ! Ce ne sont pas les mêmes programmes, tout de même ! Le coup des heures supp’ non rémunérées, la TVA sociale, ce sont bien des politiques de droite, et on sait bien ce que ça va faire !
B : ah bon ? qu’est ce que ça va faire ?
A : c’est un cadeau aux plus favorisés !
B : mais, moi, il me semble bien que j’ai lu des articles d’économistes qui pensaient que c’était une bonne chose l’augmentation de la TVA !
A : où tu l’as lu ? dans le Figaro ?
B : oui, mais …
A : c’est toujours pareil ! dans le Figaro, c’est toujours le même son de cloche ! C’est la voix de l’UMP !
B : pas d’accord. Les gens qui écrivent une tribune sont libres de leurs propos, tout de même…! que ce soit au Figaro, dans Libération ou dans le Monde, non ?
A : mais non ! ceux qui écrivent dans Libération sont de gauche, et ceux qui écrivent au Figaro sont de droite, c’est bien connu !
B : ah bon, ok. Tu as raison ! bravo. Et que fais tu des gens qui écrivent dans tous ces journaux alternativement ? ils sont à la fois soutien du PS et de l’UMP, alors ?
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B : revenons sur la TVA : à côté des économistes et politiciens qui vont essayer de convaincre dans un sens où dans l’autre, on a tout de même l’exemple de l’Allemagne qui montre que c’est possible !
A : mais ça n’a rien à voir ! L’Allemagne n’a rien à voir avec la France…! C’est toujours les mêmes arguments ! si tu augmentes la TVA, tu vas forcément diminuer la consommation, donc la croissance.
B : L’exemple Allemand montre l’inverse. L’Allemagne n’est peut être pas la France, mais les consommateurs allemands ne sont tout de même pas si différents des consommateurs français, et la structure de la société n’est pas non plus si différente…Quand même : la TVA sociale, son but c’est de faire basculer une partie de la fiscalité du travail et de l’investissement sur la consommation, en partant du principe qu’on ne peut pas faire fuire la consommation, tandis qu’on peut faire fuire l’investissement. Et les résultats sont là : ceux qui prédisaient une baisse de la consommation en Allemagne ont eu tort ! la consommation n’a pas chuté, et le résultat c’est qu’on a assisté à un renforcement de la croissance en Allemange, et donc à une hausse globale du niveau de vie, pour faire vite….
A : oui, alors ça, justement c’est pas sûr non plus, qu’une augmentation de croissance profite à tout le monde !
B : inégalement, c’est sûr, mais à tout le monde, c’est sûr aussi, non ?
A : enfin, ce qui est sûr c’est que ceux qui montrent du doigt le gouvernement pour la TVA sont des cons : c’était écrit dans le programme, ce n’est pas une surprise ! Il suffit de savoir lire entre les lignes !
B : on est bien d’accord ! et même pas entre les lignes…!
A : c’est pour ça que je n’ai pas voté pour Sarkozy, pour ce genre de cadeaux aux plus riches…!
B : on verra, non ? on ne peut pas juger des résultats d’une politique avant qu’elle ait été mise en oeuvre, si ?
A : mais si ! on sait ce que ça va faire, cette politique ! enfin !
B : tout n’est pas à court terme ! C’est dans 6 mois, 1 an, 2 ans qu’on verra les fruits de cette politique : c’est le jeu de la démocratie. Si au bout de 5 ans on n’est pas d’accord, ou pas satisfait avec les résultats, on sanctionnera par le vote !
A : mouais….mais ce sera peut-être trop tard ! On ne pourra peut-être plus faire machine arrière…
B : mais moi, je pense qu’ils vont faire du vrai boulot, et c’est maintenant que ça commence : les élections sont terminées, ils ont une vrai majorité, on va voir ce qu’ils font…Ayons l’ouverture d’esprit de juger d’après les résultats, et pas sur des procès d’intentions !
A : je doute…
B : enfin, quand même, on voit bien le changement par rapport à Chirac : on sent bien qu’il y un esprit, une volonté d’action, de résultats, qui n’ont rien à voir avec l’autre c……
A : il y a surtout une différence dans la communication, dans le marketing…
B : Allons ! dès à présent, on voit bien que, justement, ce n’est pas du marketing. Chirac n’aurait pas parlé de TVA sociale avant le second tour, il se serait touché le zizi en parlant de diversité, de fracture sociale et autres sujets éminements polémiques…peu importe, nous verrons ce qu’ils vont faire, et comment ils vont le faire : c’est pour ça qu’ils sont là !
A : oui, nous verrons.
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C’était la discussion d’hier midi (dans les grandes lignes) entre un collègue (A) et moi (B).
Catégorie : 💰 Economie
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Discussion de Café du Commerce
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Organisation du travail : communication et definition des roles
Organiser le travail d’un grand nombre de personnes implique d’optimiser deux aspects essentiels du travail en équipe : la communication et la définition des rôles ou missions de chacun. Des règles simples permettent de faire travailler efficacement les gens ensemble ; elles sont toutefois difficiles à mettre en oeuvre, parce que des freins culturels peuvent bloquer leur application. La franchise, l’acceptation de l’erreur, et la reconnaissance du mérite sont des aspects pas toujours suffisamment intégrés dans la culture française.
(suite…) -
Harmonies Economiques : Premier chapitre
Voici le deuxième article de la série consacrée au livre d’Harmonie Economique de Frédéric Bastiat. Après l’introduction qui présentait l’idée maîtresse du livre (« les intérêts légitimes sont harmoniques »), voilà donc les grandes idées du premier chapitre intitulé « Organisation naturelle, organisation artificielle ». C’est un appel à la vigilance face aux systèmes proposés par les penseurs et politiciens pour mieux organiser la société, un éloge de la liberté. L’idée principale est la suivante : « La vie en société est l’état de nature de l’être humain. L’organisation naturelle d’une société, notamment le jeu des échanges de biens et de services, qui mène a des associations progressives des hommes entre eux (tant que la liberté des actes est garantie), ne doit pas être remise en cause ou contrainte de manière artificielle sans avoir bien réfléchi aux conséquences des changements proposés ». Voyons un peu plus en détail…
Interactions multiples et échanges indirects
Bastiat commence par décrire deux exemples que j’aime beaucoup, parce que j’ai souvent pensé à ça : celui d’un ouvrier et d’un étudiant (peu importe leurs statuts, la réflexion peut se faire avec n’importe qui) qui vivent une journée. L’auteur décrit tout ce que le société – par le biais d’échanges indirects – leur apporte. Par exemple, l’étudiant lit un livre, lequel a été imprimé par d’autres, puis transporté. Ses études sont payées par ses parents, avec de l’argent qui est lui même le fruit d’un échange avec, par exemple, l’industrie chinoise. Et ainsi de suite…J’adore cette mise en abîme : l’avez-vous déjà faite ? Par exemple, je tape ce texte sur un clavier. Cela implique d’avoir un ordinateur, fabriqué en Chine sur une chaîne de montage, d’avoir de l’électricité produite dans une centrale nucléaire, d’avoir acquis les énormes connaissances techniques et scientifiques que cela implique, d’avoir accès à Internet pour lire en ligne le livre de Bastiat, que quelqu’un ait pris la peine de le mettre en ligne, etc, etc. Le nombre de personnes indirectement impliqué dans mon acte d’écriture est énorme ! C’est toute l’humanité, passée et présente, toute la société qui est indirectement impliqué dans cette action rendue possible !
Une chose encore digne de remarque, c’est que dans ce nombre, vraiment incalculable, de transactions qui ont abouti à faire vivre pendant un jour un étudiant, il n’y en a peut-être pas la millionième partie qui se soit faite directement. Les choses dont il a joui aujourd’hui, et qui sont innombrables, sont l’oeuvre d’hommes dont un grand nombre ont disparu depuis longtemps de la surface de la terre. Et pourtant ils ont été rémunérés comme ils l’entendaient, bien que celui qui profite aujourd’hui du produit de leur travail n’ait rien fait pour eux. Il ne les a pas connus, il ne les connaîtra jamais. Celui qui lit cette page, au moment même où il la lit, a la puissance, quoiqu’il n’en ait peut-être pas conscience, de mettre en mouvement des hommes de tous les pays, de toutes les races, et je dirai presque de tous les temps, des blancs, des noirs, des rouges, des jaunes; il fait concourir à ses satisfactions actuelles des générations éteintes, des générations qui ne sont pas nées; et cette puissance extraordinaire, il la doit à ce que son père a rendu autrefois des services à d’autres hommes qui, en apparence, n’ont rien de commun avec ceux dont le travail est mis en oeuvre aujourd’hui. Cependant il s’est opéré une telle balance, dans le temps et dans l’espace, que chacun a été rétribué et a reçu ce qu’il avait calculé devoir recevoir.
En vérité, tout cela a-t-il pu se faire, des phénomènes aussi extraordinaires ont-ils pu s’accomplir sans qu’il y eût, dans la société, une naturelle et savante organisation qui agit pour ainsi dire à notre insu ?
On parle beaucoup de nos jours d’inventer une nouvelle organisation. Est-il bien certain qu’aucun penseur, quelque génie qu’on lui suppose, quelque autorité qu’on lui donne, puisse imaginer et faire prévaloir une organisation supérieure à celle dont je viens d’esquisser quelques résultats ?Méthodes pour promouvoir une nouvelle organisation artificielle
Bastiat décrit ensuite les mécanismes et les méthodes utilisés par ceux qui veulent promouvoir une nouvelle organisation artificielle :
- Ils commencent par décrire les maux de la société en oubliant de rappeler ses aspects positifsAussi les publicistes auxquels je fais allusion, après avoir proclamé avec enthousiasme et peut-être exagéré la perfectibilité humaine, tombent dans l’étrange contradiction de dire que la société se détériore de plus en plus. À les entendre, les hommes sont mille fois plus malheureux qu’ils ne l’étaient dans les temps anciens, sous le régime féodal et sous le joug de l’esclavage; le monde est devenu un enfer. S’il était possible d’évoquer le Paris du dixième siècle, j’ose croire qu’une telle thèse serait insoutenable.
- Ils condamnent l’intérêt personnelEnsuite ils sont conduits à condamner le principe même d’action des hommes, je veux dire l’intérêt personnel, puisqu’il a amené un tel état de choses. Remarquons que l’homme est organisé de telle façon, qu’il recherche la satisfaction et évite la peine; c’est de là , j’en conviens, que naissent tous les maux sociaux, la guerre, l’esclavage, le monopole, le privilège; mais c’est de là aussi que viennent tous les biens, puisque la satisfaction des besoins et la répugnance pour la douleur sont les mobiles de l’homme. La question est donc de savoir si ce mobile qui, par son universalité, d’individuel devient social, n’est pas en lui-même un principe de progrès.
- Ils proposent de s’en débarrasser (pour cela, deux méthodes : la force ou l’assentiment universel, tous deux impossibles)Pour déterminer tous les hommes à la fois à rejeter comme un vêtement incommode l’ordre social actuel, dans lequel l’humanité a vécu et s’est développée depuis son origine jusqu’à nos jours, à adopter une organisation d’invention humaine et à devenir les pièces dociles d’un autre mécanisme, il n’y a, ce me semble, que deux moyens: la Force, ou l’Assentiment universel.
Il faut, ou bien que l’organisateur dispose d’une force capable de vaincre toutes les résistances, de manière à ce que l’humanité ne soit entre ses mains qu’une cire molle qui se laisse pétrir et façonner à sa fantaisie; ou obtenir, par la persuasion, un assentiment si complet, si exclusif, si aveugle même, qu’il rende inutile l’emploi de la force.
Je défie qu’on me cite un troisième moyen de faire triompher, de faire entrer dans la pratique humaine un phalanstère ou toute autre organisation sociale artificielle.
Or, s’il n’y a que ces deux moyens et si l’on démontre que l’un est aussi impraticable que l’autre, on prouve par cela même que les organisateurs perdent leur temps et leur peine.
Critique fondamentale du Contrat Social de Rousseau
Bastiat se livre ensuite à une critique des fondements philosophiques de Rousseau et son Contrat social, que je ne reprends pas ici, mais qui est très forte (les prémisses de Rousseau sont que la société est un état contre-nature, ce à quoi Bastiat s’oppose) et aboutit à cette conclusion :
Que le lecteur veuille bien excuser cette longue digression, j’ai cru qu’elle n’était pas inutile. Depuis quelque temps, on nous représente Rousseau et ses disciples de la Convention comme les apôtres de la fraternité humaine. — Des hommes pour matériaux, un prince pour mécanicien, un père des nations pour inventeur, un philosophe par-dessus tout cela, l’imposture pour moyen, l’esclavage pour résultat; est-ce donc là la fraternité qu’on nous promet?
Il m’a semblé aussi que cette étude du Contrat social était propre à faire voir ce qui caractérise les organisations sociales artificielles. Partir de cette idée que la société est un état contre nature; chercher les combinaisons auxquelles on pourrait soumettre l’humanité; perdre de vue qu’elle a son mobile en elle-même; considérer les hommes comme de vils matériaux; aspirer à leur donner le mouvement et la volonté, le sentiment et la vie; se placer ainsi à une hauteur incommensurable au-dessus du genre humain: voilà les traits communs à tous les inventeurs d’organisations sociales. Les inventions diffèrent, les inventeurs se ressemblent.Association progressive et volontaire
Parmi les arrangements nouveaux auxquels les faibles humains sont conviés, il en est un qui se présente en termes qui le rendent digne d’attention. Sa formule est: Association progressive et volontaire.
Mais l’économie politique est précisément fondée sur cette donnée, que société n’est autre chose qu’association (ainsi que ces trois mots le disent), association fort imparfaite d’abord, parce que l’homme est imparfait, mais se perfectionnant avec lui, c’est-à -dire progressive. Veut-on parler d’une association plus étroite entre le travail, le capital et le talent, d’où doivent résulter pour les membres de la famille humaine plus de bien et un bien-être mieux réparti ? À la condition que ces associations soient volontaires; que la force et la contrainte n’interviennent pas; que les associés n’aient pas la prétention de faire supporter les frais de leur établissement par ceux qui refusent d’y entrer, en quoi répugnent-elles à l’économie politique ? Est-ce que l’économie politique, comme science, n’est pas tenue d’examiner les formes diverses par lesquelles il plaît aux hommes d’unir leurs forces et de se partager les occupations, en vue d’un bien-être plus grand et mieux réparti? Est-ce que le commerce ne nous donne pas fréquemment l’exemple de deux, trois, quatre personnes formant entre elles des associations ? Est-ce que le métayage n’est pas une sorte d’association informe, si l’on veut, du capital et du travail ? Est-ce que nous n’avons pas vu, dans ces derniers temps, se produire les compagnies par actions, qui donnent au plus petit capital le pouvoir de prendre part aux plus grandes entreprises ? Est-ce qu’il n’y a pas à la surface du pays quelques fabriques où l’on essaye d’associer tous les co-travailleurs aux résultats? Est-ce que l’économie politique condamne ces essais et les efforts que font les hommes pour tirer un meilleur parti de leurs forces ? Est-ce qu’elle a affirmé quelque part que l’humanité a dit son dernier mot ? C’est tout le contraire, et je crois qu’il n’est aucune science qui démontre plus clairement que la société est dans l’enfance.
Mais, quelques espérances que l’on conçoive pour l’avenir, quelques idées que l’on se fasse des formes que l’humanité pourra trouver pour le perfectionnement de ses relations et la diffusion du bien-être, des connaissances et de la moralité, il faut pourtant bien reconnaître que la société est une organisation qui a pour élément un agent intelligent, moral, doué de libre arbitre et perfectible. Si vous en ôtez la liberté, ce n’est plus qu’un triste et grossier mécanisme.La suite pour bientôt !
Désolé pour tous ces extraits un peu long, mais je trouve le style de Bastiat vraiment admirable, et je ne résiste pas au plaisir de partager avec vous ces morceaux de son texte. Je ne peux que vous conseiller d’aller lire cet excellent ouvrage !
J’essayerais de synthétiser régulièrement des chapitres de cet excellent livre, disponible en ligne et intégralement sur Bastiat.org. Le prochain s’intitule « Besoins, efforts, satisfactions ». Tout un programme ! -
Pourquoi il faut que Sarkozy l’emporte
A moins d’une semaine du premier tour, il semble que Bayrou chute un peu dans les intentions de vote, et que Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal confortent leur avance sur les autres candidats. On voit donc se profiler un second tour Royal-Sarkozy, avec avantage à Sarkozy. Ca c’est pour l’aspect « sondages ».
Un autre aspect des sondages concerne les préoccupations des français, avec en tête, le chômage, donc le travail. Cela me semble tout à fait normal, dans la mesure où avec un taux de 10% de la population active (soit à peu près 20% de la population active soumise à une possibilité de chômage), la France continue de subir le choix politique qui a été fait (pas forcément explicitement) de moins travailler, et d’augmenter le coût du travail. Le chômage est une plaie sociale, individuelle et économique. Le faire chuter radicalement doit être une priorité — en tout cas pour qui souhaite traiter le problème n°1 des français. Le chômage est le symptôme, aussi, d’un manque de compétitivité, de confiance, de solidarité.
La France a fait le choix du chômage, et il faut maintenant faire le choix inverse : celui du travail. Cela implique un courage politique pour dire la vérité. Dire qu’il faut arrêter d’augmenter le SMIC mécaniquement plus vite que les autres salaires ; dire qu’il faut supprimer — ou modifier fortement les 35h ; dire que la travail crée du travail, et qu’il ne se divise pas ; dire que pour partager un gâteau, il faut encore le produire.
Il n’y a que Sarkozy qui mette la revalorisation du travail comme priorité dans son programme ; c’est utile et important, tant au niveau économique que philosophique. Le travail aliénant, décrié par les intellos en mal de grand soir ayant mal digéré leur « Capital », n’est qu’un aspect de la réalité. Le travail, c’est aussi et surtout l’émancipation, le progrès, l’entraide mutuelle.Le travail éloigne de nous trois grands maux : le besoin, le vice, l’ennui.
VoltaireDans la guerre, le plus fort accable le plus faible.
Dans le travail, le plus fort communique de la force au plus faible.
Bastiat -
Pour une plus juste répartition des richesses : solidarité ou charité ?
Comment répartir mieux les richesses ?
Face à l’injustice des ressources très inégalement réparties entre les hommes, on ne peut que souhaiter une plus juste répartition. Pour quelle raison certains devraient être pauvres, simplement à cause du fait qu’ils ne sont pas nés au bon endroit ? La redistribution des richesses est une nécessité impérieuse, pour qui a un tant soit peu le sens de la justice. L’ampleur et le mode d’organisation de cette intervention des hommes sur la répartition des richesses sont les vrais problèmes…Et ces deux aspects de la question sont plus liés qu’il n’y parait de prime abord : selon le mode d’intervention choisi, l’ampleur ne sera pas forcément la même.
Don et redistribution, charité et solidarité : quelques définitions
Deux grands styles de re-répartition des richesses existent : le redistribution et le don.
Redistribution
Ensemble des opérations par l’intermédiaire desquelles une partie des revenus est prélevée sur certains agents économiques ou catégories sociales pour être reversée au bénéfice d’autresDonAction de donner, de céder gratuitement et volontairement la propriété d’une chose
La différence est claire : dans un cas (la redistribution) il s’agit de quelque chose d’organisé collectivement, et dans l’autre (le don) il s’agit d’un acte individuel.
C’est pour ça qu’on peut relier ces deux modes à deux motivation, ou deux conceptions un peu différentes ; la redistribution va avec l’idée de solidarité :Solidarité :
- Dépendance mutuelle entre les êtres humains, existant à l’état naturel et due au besoin qu’ils ont les uns des autres. Responsabilité mutuelle qui s’établit entre les membres d’un groupe social.
- Devoir moral, résultant de la prise de conscience de l’interdépendance sociale étroite existant entre les hommes ou dans des groupes humains, et qui incite les hommes à s’unir, à se porter entraide et assistance réciproque et à coopérer entre eux, en tant que membres d’un même corps social.
et le don va avec l’idée de charité :
Charité :
- Principe de lien spirituel, moral qui pousse à aimer de manière désintéressée.
- Amour mutuel des hommes, considérés comme des semblables; humanité, philanthropie
- Établissements, fondations, congrégations ayant ces actes pour but.
Il n’y a pas lieu, à mon avis, de discuter du bien-fondé moral de l’une ou l’autre de ces conceptions (charité ou solidarité) : l’une et l’autre sont intéressantes, et ce qui compte c’est plus l’efficacité des modes de redistribution qui vont avec, que leur valeur intrinsèque. Soyons pragmatiques. Ces deux approches sont nécessaires : il faut être solidaire, et il faut être capable de charité. Il faut du social, et de l’amour.
Différences de cultures : trop de solidarité tue la charité !
Aux Etats-unis, la charité est beaucoup plus développée qu’en France, où la redistribution organisée est forte. Les oeuvres charitatives, philanthropiques, et le mécenat privé sont beaucoup plus développés aux USA qu’en France. La question est de savoir ce qui est le plus efficace pour lutter contre l’inégale répartition des richesses. Un exemple tel que celui des restos du Coeur avait montré en son temps que l’initiative individuelle ou associative est plus réactive et plus efficace que la redistribution lourde organisée par l’Etat. C’était le message de Coluche : « les politiques en ont parlé, moi je l’ai fait! ». Notre système de solidarité, et de redistribution, en France, est tellement complexe qu’il en devient inefficace : pourquoi ne pas le simplifier, et en limiter le poids, pour redonner de l’air à la charité et aux initiatives du type « Bill Gates » ?
Je laisse le mot de la fin à J.F. Revel, plaidant pour une plus grande souplesse et une plus grande liberté individuelle dans le choix du mode de redistribution :Pourquoi les français qui en ont les moyens seraient-ils généreux, alors que la société les condamne précisément pour avoir acquis ces moyens ? La générosité n’est-elle pas à double tranchant dans un pays où l’argent doit se cacher et où, par conséquent, l’évergétisme est voué à l’exécration, sauf dans quelques rares cas, comme dans l’entretien d’une équipe de ballon rond ? Comment espérer s’attirer la reconnaissance de ses compatriotes en tant que bienfaiteur public, si le don a pour premier effet de signaler le donateur comme un être immoral, puisque possesseur d’une grande fortune ? La haine « chrétienne et révolutionnaire » de l’argent engendre ainsi une société non moins inégalitaire que d’autres, mais notablement plus avare, plus égoïste, plus hypocrite.
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La Loi, la démocratie et ses limites…
Le malaise des sociétés démocratiques vient de ce que les mots ont perdu leur sens. A l’origine, en démocratie, les pouvoirs de l’État, contrairement à ce qui se passe en monarchie, étaient limités par la Constitution et par la coutume. Mais nous avons glissé progressivement dans la démocratie illimitée : un gouvernement peut désormais tout faire sous prétexte qu’il est majoritaire. La majorité a remplacé la Loi. La Loi elle-même a perdu son sens: principe universel au départ, elle n’est plus aujourd’hui qu’une règle changeante destinée à servir des intérêts particuliers.
La démocratie s’est pervertie parce que nous avons confondu idéal démocratique et tyrannie de la majorité. Parce que nous croyons dans les idéaux de base de la démocratie: le suffrage universel et la suprématie du droit, nous nous sentons obligés de défendre des institutions particulières qui passent, à tort, pour leur seule traduction concrète.
Seul le système capitaliste permet la démocratie. Lorsque le régime est dominé par une doctrine collectiviste, la démocratie finit inévitablement par se détruire elle-même. Le planisme mène à la dictature parce que la dictature est l’instrument le plus efficace de coercition et de réalisation forcée d’un idéal et qu’à ce titre elle est indispensable à une société planifiée. Le conflit entre planisme et démocratie surgit simplement du fait que cette dernière est un obstacle à la suppression de la liberté requise par la direction de l’activité économique. Mais dans la mesure où la démocratie cesse d’être une garantie de la liberté individuelle, il se peut qu’elle persiste sous une forme quelconque sous un régime totalitaire. Une véritable « dictature du prolétariat », même démocratique de forme, au jour où elle entreprendrait la direction centralisée de l’économie, détruirait probablement la liberté individuelle aussi complètement que le ferait n’importe quelle autocratie.
La règle de loi limite la compétence de la législation: elle la réduit, d’une part, aux règles générales des lois formelles, et s’oppose, d’autre part, à toute législation orientée d’après les intérêts d’une certaine catégorie de gens. La règle de loi implique la condition de n’employer le pouvoir coercitif de l’État que dans des circonstances définies d’avance par la loi; et exactement de la façon prévue. Tout amendement particulier enfreint la règle de loi. Quiconque conteste ce fait admet la légitimité des pouvoirs que les dictateurs ont obtenus par des moyens constitutionnels en Allemagne, Italie et en Russie.Friedrich VON HAYEK