Étiquette : Réformes

  • Rassurant et confus

    J’ai regardé le début de l’intervention télévisée de Nicolas Sarkozy. Pour résumer, j’ai trouvé ça rassurant, et confus. Rassurant, parce que la volonté de réformer le pays semble toujours l’animer, avec les mêmes axes qu’au début de son mandat. Confus, parce qu’il est réaliste à  l’excès, et que l’idéologie n’est pas son fort. Ce pragmatisme dogmatique peut se défendre, mais j’ai toujours du mal à  m’y retrouver…

    Rassurant, donc, parce qu’on sent que la volonté de réforme de Sarkozy est intacte, et je trouve qu’il a plutôt bien défendu le bilan de la première année. Il garde le cap sur la réhabilitation du travail, et ça me parait essentiel et cohérent. Je ne suis pas d’accord avec tout ce qu’il fait, mais dans le contexte collectiviste qui est le nôtre, il est certainement le seul à  même de faire bouger les choses. Lui et son gouvernement ont déjà  fait bouger beaucoup de choses depuis un an. Et il est vrai qu’on ne peut pas juger d’un quinquennat au bout d’un an…
    Confus, donc, et c’est normal, parce que Sarkozy a clairement choisi l’option réaliste pour mener ses réformes. Les contradictions idéologiques ne semblent pas le perturber ; il a peut-être raison, mais cela me choque toujours. Un an de réformes menées tambour battant, avec finalement peu de conflits sociaux, cela mérite d’être salué. Ce manque de clarté idéologique peut irriter Nicolas, au point qu’il critique un président qui « saute sur sa chaise comme un cabri en disant : Réformes ! Réformes ! ». Yvan Rioufol, de même, met en avant le courage des positions de Sarkozy, et regrette son côté confus sur les sans-papier (pour un point de vue clair à  propos de l’immigration, je vous conseille l’excellent billet – libertarien – de Laure). Je sens chez Séb le même agacement tempéré que j’avais exprimé l’autre jour : une sorte d’impatience de ceux qui attendaient plus de libéralisme et de clarté. Même son de cloche, d’ailleurs, chez JM Apathie, qui trouve que le discours manque de cohérence.
    Bien sûr, à  gauche, les avis sont très nets : Sarkozy a raté son passage d’oral. Je ne suis pas sûr d’y trouver des arguments très convaincants, ni que cette réaction n’était pas éminemment prévisible.
    J’avais envie, encore une fois, d’exprimer le niveau relativement pitoyable des journalistes présents, mais ce n’est pas le point intéressant. D’ailleurs, Le Chafouin a déjà  dit cela, en rappelant qu’Yves Calvi est quand même au dessus du lot.
    Une petite citation du billet de Rioufol, pour finir, parce qu’elle décrit bien mon sentiment, et l’envie que j’aurais de voir Sarkozy aller plus vite et plus fort :
    C’est la rupture qu’attendent encore ceux qui ont voté pour elle. Elle ne sera pas entamée tant que l’État gardera ses vieux réflexes. Philippe Sassier et Dominique Lansoy rappellent (Ubu loi, Fayard) que « quarante textes par jour pleuvent sur la tête des Français ». Cette logorrhée fortifie la citadelle fonctionnarisée. Alors que plus de 80% de la politique agricole se décide à  Bruxelles et que les paysans disparaissent, le ministère de l’Agriculture compte toujours près de 40.000 fonctionnaires. À quand, ici, les coupes claires?
    Plusieurs réactions de blogueur sont également détaillées chez Criticus.
    Le Club de la Boussole a mis en ligne sur Le Figaro un document rappelant les promesses de campagnes, et ce qui a été mis en oeuvre pendant cette première année de mandat.

  • Lecture utile

    Je me suis abonné l’autre jour à  la revue de l’iFRAP, « Société Civile ». Dans un pays où 1 actif sur 4 est payé par l’Etat, il me semble que les voies de progrès ne viendront que d’une évaluation claire et objective de la fonction publique. Sans constat partagé et factuel, quelles réformes sont possibles ? C’est le travail que fait l’iFRAP, dont voici la fiche d’identité :

    L’iFRAP, Institut Français pour la Recherche sur les Administrations et les Politiques Publiques, est l’un des premiers think tank (laboratoire d’idées) privé français, par son ancienneté (1985) et son rayonnement.
    L’Institut publie dans son magazine mensuel, Société Civile, des enquêtes d’investigation sur l’Etat, les administrations et les dysfonctionnements des politiques publiques.
    Grâce à  ses dossiers étayés par des comparaisons internationales, l’iFRAP est en mesure de faire des propositions de réformes concrètes dans des domaines aussi variés que la création d’entreprises et d’emplois, la lutte contre le chômage, le contrôle de la dépense publique, l’avenir du système de santé et l’éducation.
    Nombre de propositions de l’iFRAP ont été reprises dans la législation (fin du monopole de l’ANPE, déduction d’ISF pour les investissements dans les PME, société à  transparence fiscale, recrutement des directeurs d’hôpitaux publics dans le privé…).
    Apolitique, l’institut a pour objectif de faire entendre au travers de notes, d’articles dans la presse et de colloques, des propositions issues de la société civile auprès des politiques et de participer ainsi à  la recherche de l’efficience des politiques publiques et à  la réforme de l’Etat.

    Ils viennent de mettre en ligne une nouvelle version de leur site internet, avec pas mal de dossiers et de publications en ligne.
    Je vous recommande également l’article du fondateur, Bernard Zimmern, intitulé « Arrêtons de diviser la France entre public et privé« , dont voici un petit extrait :

    Il ne faut plus qu’il y ait deux France : le service public ne présente pas de difficultés si importantes qu’il ne puisse recruter sur titres et sur contrats comme le font les entreprises privées, grandes ou petites. On nous donne toujours comme modèle les réformes du Canada ou des USA. Mais, dans ces pays, le personnel public n’a pas de statut, pas d’emploi à  vie.

  • La grande déception

    La grande déception

    Finalement, personne n’est content de Sarkozy. Ceux qui criaient à  la dictature sont déçus, car ils voient bien que Sarkozy n’est pas l’autocrate qu’ils craignaient de voir arriver au pouvoir. Et ceux (dont je suis) qui voyaient en lui un vrai politique capable de réformes courageuses sont pour le moins déçus après l’amoncellement de mesurettes dont l’année passée nous a gratifiés. Est-ce le signe d’un manque de courage politique, ou d’un manque de cohérence idéologique ? Peut-être un peu des deux…
    (suite…)

  • Interview d’Alain Boyer : onzieme et derniere partie !

    Suite et fin de l’interview d’Alain Boyer, professeur de philosophie politique à  la Sorbonne. Après les deux précédentes parties consacrées à  Karl Popper, la dernière partie est consacrée aux réformes entreprises dans le domaine de l’enseignement supérieur. Aux blocages, et aux voies de progrès…évoqués en septembre 2007, ça a déjà  changé depuis. Vous pouvez retrouver toutes les parties de l’interview dans le sommaire ! …Bonne lecture !

    J’avais essayé d’orienter quelques questions sur l’enseignement, pour finir, j’aimerais bien revenir sur ce qui se passe, concrètement en France, sur ce que le gouvernement est en train d’essayer de mettre en place. Puisque tu fait partie de l’Université, on a parlé d’autonomie des universités, de sélection à  l’entrée (ce n’est plus d’actualité) qu’en penses tu ?

    Moi je suis évidemment favorable à  ce qui a été décidé. à‡a faisait longtemps que les universitaires demandaient ce genre de réformes. Plus d’autonomie, plus de liberté de choix des programmes, que tout ne remonte pas nécessairement au ministère, que les universités puisse nouer des contrats sans forcément demander l’autorisation à  Papa l’Etat, des contrats régionaux, avec les entreprises,que les présidents d’université aient plus de pouvoir pour être plus efficaces. Alors le problème, c’est la sélection et puis les droits d’inscription.

    C’est les deux qui ont été laissés plus ou moins en stand-by cet été…
    Oui. Je pense qu’il serait bon d’augmenter les droits d’inscription pour financer les universités, à  condition évidemment de fournir un système de prêts et de bourses. Pour conserver une égalité. Mais qu’un fils d’avocat international qui gagne des millions d’euros, suive ses études pour 100 euros par an, c’est absurde !
    Surtout quand sait le manque de moyens à  l’université…

    Oui c’est terrible ! Je n’ai pas de bureau par exemple à  la Sorbonne. J’ai évidemment pas de secretaire pour moi, alors que dans de nombreux pays, un professeur d’université a un assistant payé, qui travaille pour et avec lui, qui fait des recherches, etc…

    Donc là  ça va plutôt dans le bon sens ?

    à‡a va plutôt dans le bon sens, le problème c’est que depuis l’affaire Devaquet en 1986 c’est presque intouchable, l’idée de droits d’inscription et de sélection. Alors, la sélection à  l’entrée, je la trouverais normale parce que les jeunes de 18 ans sont souvent mal conseillés, souvent mal orientés (sinon désorientés) — il y a par ailleurs en France un préjugé contre les études de technicien, qui sont pourtant tout aussi « nobles » que des études de fonctionnaires ou de prof – donc beaucoup de gens se retrouvent dans des fillières sans débouchés, en plus ils ne sont pas assez bons, alors il ratent leurs examens. On a quand même 5 fois plus d’étudiants en psychologie en France que la moyenne européenne. On n’a pas des millions de psychologues à  former!

    Oui des défauts d’orientation..

    C’est délicat, parce que je ne peux pas scier la branche sur laquelle je suis assis, en disant que la philo par exemple — où il n’y a pas beaucoup de débouchés – ….

    Il peut peut-être y avoir un peu moins d’étudiants…?

    Oui un peu moins et qui pariticipent au financement, sauf les plus pauvres, évidemment ! …

    Et alors est-ce que tu es optimiste ? Parce que le sentiment que j’ai eu — je suis impatient, et j’avais le sentiment que c’était le moment pour que beaucoup de choses changent — le sentiment que des sujets importants étaient laissés de côté pour ne pas justement faire un « Devaquet ». Est-ce que tu es quand même optimiste ?

    Je pense qu’il y a quelque chose, psychologiquement qui s’est débloqué. Il y a un verrou qui a sauté. Et j’espère que les organisations étudiantes seront raisonnables, et je pense d’ailleurs, L’UNEF en particulier, et ne vont pas faire comme c’est vraiment la tradition française, dès que le gouvernement fait un réforme on va dans la ue. C’est aberrant ! On ne peut plus rien faire…d’ailleurs, Sarkozy et Pécresse sont arrivés avec quelques milliards. Il y a quand même de l’argent là  pour la recherche. Pour terminer, je dirais que je suis quand même un peu inquiet parce que je pense que les effets positifs des débloquages psychologiques dont je parlais tout à  l’heure, n’auront peut-être lieu que dans 4 ou 5 ans. Pour la croissance en particulier. Or on n’a pas beaucoup de marges de manoeuvres, question budget. On est dans le rouge ! Alors c’est très bien si la recherche a plus d’argent, si la police et la justice ont plus d’argent, si les prisons sont enfin réformées, parce que c’est un enfer, c’est même bien si on diminue les impôts des riches entrepreneurs parce qu’ils vont revenir. Je ne suis pas pro-riche, loin de là , mais enfin si on les taxe trop, ils partent. On ne va pas mettre un mur de Berlin pour les empêcher. Il faut les faire revenir, les inciter. Mais tout ça, ça fait des dépenses. Les recettes, ça va être un tout petit peu la baisse du nombre de fonctionnaires…un tout petit peu !

    Oui, qui a déjà  été revu à  la baisse…

    Donc bon, on va voir si le talent du Président va pouvoir résister à  ce problème de trouver de l’argent, un problème tout bête de gestion. Sans augmenter la pression fiscale.

    C’est effectivement le point critique

    Ce qui me semble très bien c’est de diminuer les taxes sur les heures supplémentaires, et les taxes sur les emprunts. à‡a ça incite effectivement à  innover et à  embaucher. à‡a peut enclencher un dynamique positive. Mais bon je garde une petite inquiétude. Je reste prudent.

    C’est un conclusion qui me semble aller assez bien avec ta manière de penser : on jugera sur pièce, de manière objective et pas dogmatique. On verra ce qui se passe.

    Oui. simplement je voudrais dire qu’il a été élu démocratiquement. La démocratie, ça repose sur le fait que pendant la période (5 ans) où un gouvernement a été élu, et sauf s’il dépasse des limites morales inacceptables, il faut le laisser faire son boulot. Il faut le critiquer au Parlement, il faut éventuellement le critiquer par des manifs, etc., mais il ne faut pas le bloquer. à‡a, c’est la société bloquée, pas la société ouverte.

    Merci beaucoup à  toi.

    Merci à  toi !

    Voilà . La publication de cette interview est terminée. Je voudrais à  nouveau remercier Alain Boyer d’avoir accepté de me recevoir, et de répondre patiemment à  mes questions. C’est un peu étrange de terminer cette publication, j’aimais bien me replonger, au rythme de parution des articles, dans le souvenir de cette rencontre passionnante. J’espère que vous avez pris du plaisir à  la lire, et j’espère pouvoir vous en proposer de nouvelles au cours de cette année…
    Vous pouvez retrouver toutes les parties de l’interview dans le sommaire !

  • Le nombre de fonctionnaires : indicateur de la volonté de réforme ?

    On a appris ce matin, par la voix du rapporteur général du budget à  l’Assemblée Nationale, que l’objectif de ne pas remplacer un départ à  la retraite sur deux dans la fonction publique ne serait pas tenu en 2008. On pourrait s’en affliger, si cet objectif n’apparaissait pas – au vu de ce qui s’est fait dans les autres grands pays occidentaux – comme déjà  particulièrement peu ambitieux. Si cet objectif était tenu (et il ne le sera pas!), on arriverait sur une diminution de l’ordre de 4% du nombre de fonctionnaires, là  où les autres pays ont réduits de l’ordre de 20% leurs effectifs.
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  • Vive la rigueur !

    Vive la rigueur !

    Retour sur la définition de rigueur, puisque ce mot est à  la mode ces jours-ci. La rigueur ne doit pas être perçue négativement, sauf par ceux qui vivent directement des subsides de l’Etat. Et l’idée selon laquelle, plan de rigueur signifierait immanquablement arrêt des réformes doit être combattue. La réforme, ce n’est pas dépenser plus, et prélever plus. Bien au contraire. Il est plus que temps que le gouvernement fasse la pédagogie de sa politique, vante la rigueur, et prenne enfin le tournant politique que Sarkozy avait promis. C’est maintenant ou jamais.
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