Étiquette : Santé

  • Le chaud et le froid

    Le chaud et le froid

    La chaire de santé de sciences Po organise les « Tribunes de la santé« . Le Dr. Martin Winckler, médecin généraliste à  temps partiel au centre de planification de l’hôpital du Mans, et écrivain, a été l’invité de cette tribune pour y décrire les obstacles et les enjeux relatifs à  son métier (13 février 2008, « La crise de la médecine générale »). Bon nombre de ses constats de base trouvent un écho en odontologie : « les études de médecine sont trop élitistes, technicistes et autoritaires » ; ou encore : « les facultés de médecine françaises apprennent aux généralistes à  penser en spécialistes alors qu’elles devraient enseigner aux spécialistes à  penser en généralistes ».

    Attention chaud devant !

    Malheureusement notre confrère médecin se prend les pieds dans le tapis en affirmant : « L’idéal du médecin n’est pas de diagnostiquer les maladies mais de faire en sorte que la santé en général de la population soit la meilleure possible ». Quelle confusion ! N’est ce pas au politique de faire en sorte que la santé générale de la population soit la meilleure possible ? Et qui doit se charger de « diagnostiquer les maladies » si ce n’est pas au médecin ? Un tel dérapage ne fait-il pas froid dans le dos ? Martin Winckler n’est qu’un politique déguisé en médecin. Il n’y a pas de honte à  ce que tout citoyen donne son avis politique. Mais il ne faut pas le faire comme médecin ès qualité. A vouloir jouer à  contre sens (Sciences Po invite un médecin), on décrédibilise, et le médecin, et le politique. Si Winckler ne veut pas diagnostiquer les maladies, qu’il évite de parler au nom des professionnels de santé.
    Zorro

  • La religion, facteur de santé ?

    La religion, facteur de santé ?

    Retour sur les résultats d’une Enquête Santé Protection Sociale de l’IRDES, qui conclut qu’il vaut mieux être riche pour être en bonne santé. Aidé par deux études de Caldwell, Zorro montre qu’à  niveau de vie égaux, des pays peuvent avoir des espérances de vie, et des taux de mortalité très différents. La richesse n’est donc pas forcément le facteur déterminant pour expliquer la santé d’une population. Le statut des femmes, et la place de la religion dans la société, semblent tout aussi importants. La question mérite d’être posée, et des études nécessitant des statistiques ethnico-religieuses sont nécessaires pour y répondre. C’est le quatrième article de Zorro sur Expression Libre.
    (suite…)

  • Des souris et des hommes

    Des souris et des hommes

    Le livre « Eloge de la Fuite », d’Henri Laborit, avait été pour moi une grande source de réflexions, de doutes, de connaissances aussi. J’avais envie, suite à  une discussion concernant l’action, notamment avec Christophe, de présenter un des concepts importants importé par Laborit du domaine de la biologie vers les comportements humains : l’inhibition de l’action.

    Penseur radical

    Henri Laborit (1914-1995) a écrit de nombreux ouvrages (en plus de ses travaux purement scientifiques) où il vulgarise les connaissances de neuro-biologie, et s’applique à  construire un cadre de pensée général des comportements humains. J’avais été profondément intéressé par son livre « Eloge de la fuite » (ça fait déjà  13 ans que je l’ai lu…ça fait un choc!). Il faut absolument aller lire ce livre, jusqu’au-boutiste sur certains points, mais très éclairant, stimulant et riche. Henri Laborit était certainement un homme original, très doué. Je le perçois comme un être profondément gentil, déçu par les humains.
    Une expérience simple conduite sur des souris lui permet d’illustrer et de montrer ce qu’est l’inhibition de l’action.

    Confronté à  une épreuve, l’homme ne dispose que de trois choix : 1) combattre ; 2) ne rien faire ; 3) fuir.

    Henri Laborit

    L’expérience des 3 souris

    L’expérience peut être décrite comme suit (pour une description complète, aller voir ici):
    Une souris est enfermé dans une cage métallique, et soumise à  un stress électrique régulièrement (un flash lumineux prévient la souris de l’arrivée du choc électrique). Trois cas sont présentés :

    • Une porte de sortie permet à  la souris d’échapper au stress quand il se présente : dans cette situation, la souris apprend vite le lien entre signal lumineux et décharge électrique, et son organisme n’est pas affecté. Elle peut fuir le stress.
    • La porte de sortie est maintenant fermée : dans cette situation, la souris apprend rapidement que toute action est inutile pour éviter le stress électrique. Elle finit par le subir sans bouger, et son organisme en souffre énormément. C’est ce qu’on appelle l’inhibition de l’action. Elle finit par être gravement atteinte et / ou mourir.
    • Deux souris sont placés dans la cage (la porte de secours étant toujours fermée). Les souris, rapidement, se battent quand le stress électrique est déclenché. C’est une action inutile pour se soustraire au stress, mais c’est une action quand même. Dans cette situation, aucun impact sur la santé des souris n’est observé.

    L’essentiel est dit : en cas de stress, la fuite comme l’action permettent de se soustraire aux effets nocifs du stress, qui n’est nocif que dans le cas de l’inhibition de l’action. Laborit en tire tout un tas de conclusion sur les comportements humains, et Alain Resnais a illustré cela – avec Laborit – dans un superbe film « Mon oncle d’Amérique » en 1979. L’extrait ci-dessous montre l’expérience des souris, avec en commentaire la voix (off) de Laborit lui-même. Un film à  voir, très beau, très sombre et très humain.

  • Bonne année 2008 !

    Il parait que l’on peut envoyer ses voeux jusqu’à  fin janvier…alors voici les miens, avec un peu de retard sur le début de l’année.

    Pour l’année 2008, je vous souhaite, au niveau personnel, le meilleur pour la santé. Le reste suivra, à  savoir suivre vos envies, avoir plein de joies, réaliser des projets. Plein d’amour, aussi. En donner et en recevoir.

    Au niveau collectif, je nous souhaite de vivre dans des société où les fous dangereux auront un peu moins de pouvoir, répandront un peu moins de peur et de haine, et où chaque être humain aura un peu plus la chance de pouvoir vivre pleinement sa liberté. En France, cela passe par une prise de conscience que l’organisation de la société de manière centralisée est certainement loin d’être optimale. Elle participe d’une illusion collective consistant à  croire que l’on peut, et que l’on sait, ce qui pourrait être bon pour des catégories de personnes. Et de laisser une minorité le décider pour les autres. Ce sont les fondements même du totalitarisme. Il n’existe que des individus, et la somme de leurs interactions constitue la société. Laissons les individus chercher leur bonheur, et leur intérêt où bon leur semble, dans le respect des droits de chacun. C’est à  cette condition qu’une société juste, pacifiée, pourra émerger.

    Arrêtons d’avoir la prétention de construire des « modèles » de société voués à  l’échec car trop généraux, et trop incapables de contenir la richesse et le potentiel de l’humanité. L’adaptation à  l’environnement, la créativité, sont des capacités humaines dont on ne peut prévoir les conséquences. Les risques font partie intégrante de la vie. Les choses formidables aussi. Gardons la tête froide pour continuer à  faire ce que l’humain sait faire : évaluer les gains potentiels, et les comparer aux risques associés. Ayons la sagesse de savoir douter, toujours, et surtout de la parole de ceux qui viennent nous asséner des grandes vérités, révélées ou non, censées nous expliquer le monde et la marche à  suivre. Surtout de ceux qui nous expliquent que les intérêts particuliers des être humains s’opposent et sont la source de tout les conflits. L’humanité est plus riche que cela, plus intelligente, et plus imprévisible.

    Bonne et heureuse année 2008 à  vous tous, chers lecteurs !

  • La santé, une question d'argent ?

    La santé, une question d'argent ?

    Deuxième article de Zorro dans la catégorie « Bas les masques ». Retour sur un article paru dans le Panorama du Médecin (5/11), intitulé « La santé, Une question d’argent ? ». Analyse de la conviction sous-jacente à  ce titre efficace mais manipulateur…
    (suite…)

  • L'argent fait-il maigrir ?

    L'argent fait-il maigrir ?

    C‘est assez rageant de constater que des intervenants dans des débats médiatisés, auréolés de leur statuts de spécialistes ou d’experts, viennent véhiculer des idées préconçues à  la radio ou à  la télé, sans recevoir de contradiction. J’ai entendu vendredi une émission portant sur l’obésité. Une sociologue était présente, et dont l’obésité est l’objet d’étude. Une explication qu’elle avançait souvent portait sur le fait que les comportements « déviants » par rapport à  la bouffe se retrouvaient plus souvent dans les milieux défavorisés que dans les milieux aisés. Et elle en déduisait, sans que personne ne vienne tempérer cet avis, que le niveau de vie était une facteur important de l’obésité. Or, deux choses peuvent varier ensembles, sans pour autant que l’un soit la cause de l’autre. Et à  aucun moment, les autres intervenants (qui étaient pourtant plus fins qu’elle), n’ont fait remarquer que le problème de l’obésité est un comportement face à  la nourriture dont la cause est bien plus le manque d’éducation que le manque d’argent. Et il se trouve (oh, surprise !) que globalement les milieux aisés financièrement sont aussi ceux où l’éducation prend une place plus importante. L’idéologie véhiculée par l’explication purement financière est donc la suivante : c’est le manque d’argent qui cause une expression par la nourriture, une affirmation sociale par la consommation excessive pour combler un manque (sous-entendu, manque d’argent). C’est présenter l’argent comme un but, et non comme un moyen. Et c’est vouloir à  tout prix éviter de dire que ceux qui laissent leurs enfants boire du coca devant la télé ou la console de jeux 5 heures par jour sont avant tout des « pauvres » éducationnels. Il est plus commode de les présenter comme des pauvres tout court : c’est de la faute du système, et de la société. Et ça évite d’aller regarder dans le détail, et d’insister sur la responsabilité parentale. Responsabilité, mot horrible !
    L’écologiste de service présente sur le plateau avait d’ailleurs une autre explication, tout aussi réductrice et simplificatrice : la pression doit être mise sur les groupes agroalimentaires pour qu’ils produisent des produits moins gras, moins sucrés, etc. Les méchants groupes industriels se faisant leur beurre sur le dos des pauvres, voilà  encore une belle explication. C’est-à -dire, au final, de la plus pure logique « diet » ou « light » : plutôt que d’apprendre à  manger de manière rationnelle (pas entre les repas, pas d’excès de graisse et de sucres), on va se fabriquer de la bouffe fadasse pour pouvoir s’empiffrer toute la journée sans dommages (soi-disant). Bel exemple d’écologie, et d’arguments insupportablement creux.
    Un argument simple suffit pourtant à  renverser cette « théorie » : on trouve des obèses chez les riches, et des gens sachant gérer leur rapport à  la bouffe chez les plus démunis. La richesse affective, l’éducation nutritionnelle expliquent – mieux que l’argent – le comportement sain vis-à -vis de la nourriture. Qu’une sociologue ne soit pas capable de mettre ces facteurs bien plus importants que l’aspect financier dans le coeur de son argumentation montre qu’elle souhaitait simplement faire passer un message idéologique, et non pas des résultats de recherche. L’argent, cause de tous les maux ? Je dirais plutôt l’absence d’éducation, quitte à  simplifier…