Catégorie : 💡 Innovation

  • Registres de discours

    Registres de discours

    Bibliographie

    Pour continuer Ă  avancer sur le « bot » d’analyse automatique des articles sur X, il est nĂ©cessaire de bien penser les catĂ©gories dans lesquelles on lui demande de ranger les phrases d’un texte. Lorsque j’ai demandĂ© Ă  Grok ce qui existait dĂ©jĂ  comme type de classifications, il m’a apportĂ© les rĂ©ponses suivantes (j’ai ajoutĂ© les liens vers les auteurs).

    Voici un aperçu des plus pertinents, basés sur la littérature académique et les principes de rhétorique :
    Rhétorique aristotélicienne
    Aristote distingue trois modes de persuasion :

    • Ethos : CrĂ©dibilitĂ© de l’orateur (par exemple, citer un expert).
    • Pathos : Appel aux Ă©motions (proche de nos “Émotions” ou “Jugements moraux”).
    • Logos : Arguments logiques (proche de nos “Arguments” et “Faits”).

    Pertinence : Ton approche couvre déjà ethos (via citations dans les faits), pathos (jugements moraux, récits), et logos (arguments, faits). Ajouter une catégorie “Ethos” pourrait être redondant.
    Analyse du discours (Van Dijk, Fairclough)
    Teun van Dijk (discours critique) distingue :

    • Faits objectifs.
    • Opinions (proche de rĂ©cits et jugements moraux).
    • Arguments idĂ©ologiques.
    • Émotions.

    Norman Fairclough : Met l’accent sur les idéologies implicites, qui pourraient correspondre à tes mots débattables ou récits.
    Pertinence : Ton approche est déjà proche de ces cadres, avec une granularité plus fine (questions, jugements moraux).
    Typologie des discours (narratologie, sémiotique)
    Gérard Genette ou Roland Barthes distinguent :

    • Narratif (rĂ©cits).
    • Descriptif (faits).
    • Argumentatif (arguments).
    • Expressif (Ă©motions, jugements moraux).

    Pertinence : Tes catégories recouvrent ces types, avec une spécificité pour les questions et mots débattables.
    Linguistique pragmatique (Austin, Searle)
    Actes de langage :

    • Expressifs (Ă©motions, jugements moraux).
    • Directifs (appels Ă  l’action).
    • Informatifs (faits).
    • Commissifs (promesses, engagements).

    Pertinence : Les actes directifs pourraient justifier une catégorie “Appels à l’action”, mais moins pertinente pour des articles journalistiques.
    Journalisme et analyse médiatique :
    Des outils comme Media Bias/Fact Check ou AllSides distinguent :

    • Faits objectifs.
    • Opinions/Ă©ditoriaux (rĂ©cits, jugements moraux).
    • Biais idĂ©ologiques (mots dĂ©battables).

    Pas de classification standard pour “questions” ou “arguments” explicites, ce qui rend ta méthode originale.

    Registres de discours v0

    J’ai ajoutĂ© depuis Ă  mes catĂ©gories une qui s’appelle « InterprĂ©tation », et j’ai incorporĂ© ce qui de l’ordre des Emotions dans « RĂ©cits ». La question reste ouverte de savoir s’il faut ajouter les « appels Ă  l’action ». Voici donc Ă  date la liste des catĂ©gories pour classer les phrases et distinguer les diffĂ©rents registres de discours (et les gestes mentaux qui vont avec) :

    • Descriptif (Faits) : Phrases vĂ©rifiables (chiffres, dates, noms), bleu, gras.
    • Narratif (RĂ©cits) : Phrases donnant sens/Ă©motions, non vĂ©rifiables, rouge, italique.
    • InterprĂ©tatif : Phrases hypothĂ©tiques/interprĂ©tations, jaune, soulignĂ© double.
    • Logique (Arguments) : Phrases avec prĂ©misses/conclusion (“donc”, “car”), violet, encadrĂ©.
    • Interrogatif (Questions) : Phrases et tournures interrogatives (“?”), vert, soulignĂ©.
    • Moral (Jugements moraux) : Phrases Ă©thiques (“juste”), marron, italique gras.
    • PolĂ©mique (Mots dĂ©battables) : Mots connotatifs/controversĂ©s (ex. “euthanasie”, « extrĂŞme-droite »), orange, soulignĂ©, annotĂ©s dans les phrases des autres catĂ©gories.

    Questions en suspens

    Deux points me paraissent difficiles Ă  rĂ©soudre. Tout d’abord il convient, dans la catĂ©gorie « DESCRIPTIVE » (faits) d’aller vĂ©rifier les faits et Ă©ventuellement souligner les mensonges. Ensuite, et c’est le point le plus compliquĂ©, il convient de parvenir Ă  garder en tĂŞte qu’un article peut ĂŞtre tout Ă  fait Ă©quilibrĂ©, utiliser peu de manipulations Ă©motionnelles ou narratives, mais laisser volontairement de cĂ´tĂ© la moitiĂ© de la rĂ©alitĂ© qu’il est censĂ© dĂ©crire (mise sous le tapis). Cela impliquerait d’aller systĂ©matiquement chercher plusieurs articles et comparer l’angle de vue choisi, les faits laissĂ©s de cĂ´tĂ© par les uns et les autres, etc. C’est titanesque (en fait) et probablement pas tout Ă  fait possible (en droit) : il n’existe pas de manière objective de traiter un sujet ou de rapporter des faits. Toute description d’un ensemble de faits nĂ©cessite des choix, un arbitrage, et implique un point de vue Ă  la fois idĂ©ologique (chacun a ses propres schĂ©mas mentaux) et factuel (mĂŞme en supposant une neutralitĂ© axiologique, personne n’a une connaissance universelle et considère donc la rĂ©alitĂ© en Ă©tant dĂ©pendant de ses connaissances). Qu’en pensez-vous ?

  • Extraordinaire

    Extraordinaire

    Il y a quelques annĂ©es, j’avais imaginĂ© un petit jeu, genre Tetris, avec des blocs de couleurs. Comme je ne sais pas vraiment coder, j’avais abandonnĂ© l’idĂ©e. Mais depuis, les LLM sont arrivĂ©s. Comme je suis abonnĂ© payant Ă  X, je peux profiter de Grok (l’IA / LLM de X), qui vient de sortir sa version 3. C’est tout simplement Ă©poustouflant. Je vous partage ce que j’ai pu faire en Ă  peu près 2h.

    Définition des règles

    L’interface de chat avec Grok v3 est très efficace et simple : on discute avec l’iA. En quelques Ă©changes, je lui explique les règles du jeu, qu’il me reformule et synthĂ©tise. Au bout de quelques minutes on arrive Ă  cela :
    D’accord, on a maintenant une condition de fin ! Voici la liste mise Ă  jour :
    1. Le jeu s’appellera « Priks », et c’est un jeu de « Blox ».
    2. Le jeu dĂ©marre avec une grille vide de 8×8 cases.
    3. À chaque tour, le joueur (le jeu est en solo) récupère un bloc (« Blox ») qu’il doit envoyer dans la grille : il l’insère en bas de la grille, et le Blox se place dans la dernière case libre de la grille.
    4. Les Blox ont une couleur aléatoire parmi 6 couleurs possibles.
    5. Le but est d’arriver à placer les Blox à côté de Blox de la même couleur. En formant une chaîne de 5 Blox de même couleur (en ligne ou se touchant en diagonale, peu importe la forme), on les fait disparaître.
    6. Tous les 10 coups, une ligne complète de Blox aléatoires (1 par colonne, donc 8 Blox) arrive du bas et remplit la grille avec le même mécanisme que les Blox placés par le joueur. Cette ligne contient 1 Priks situé dans une colonne aléatoire.
    7. Le joueur démarre la partie avec une « bombe » qu’il peut lancer à tout moment à la place d’un Blox. Cette bombe, en arrivant dans la grille, fait disparaître tous les Blox adjacents (les 8 cases autour).
    8. À chaque fois que le joueur réussit à faire disparaître des Blox en créant des chaînes, cela incrémente un compteur : au bout de 5 (chaînes réussies), il obtient une bombe supplémentaire.
    9. Il existe un autre type de Blox, appelé « Priks » (d’où le nom du jeu), qui est « en pierre » (pas d’une couleur). Il ne peut être détruit que par une bombe (on ne peut pas l’inclure dans une chaîne). Il y a 1 chance sur 10 que le prochain Blox soit un Priks.
    10. Le jeu se termine quand le joueur ne peut plus placer un Blox, ou quand la ligne complète de Blox qui arrive tous les 10 coups rencontre une ou plusieurs colonnes déjà pleines.
    Tout est correct ? Pour la règle 10, je comprends que le jeu s’arrête soit si une colonne est pleine au moment où le joueur veut placer un Blox, soit si la ligne complète (tous les 10 coups) ne peut pas entrer à cause d’au moins une colonne pleine. As-tu d’autres règles à ajouter ou veux-tu qu’on passe à une autre étape (comme imaginer comment visualiser ça ou tester un exemple) ?

    C’est impressionnant comme la conversation est fluide et simple. Mais c’est le moins impressionnant.

    Proto dans le chat

    Spontanément quand je lui parle de faire un prototype du jeu, il me propose une manière simple et élégante pour visualiser le jeu en mode texte et tester les règles en condition réelle.

    Ca nous a permis de rapidement corriger des points qui n’avaient pas Ă©tĂ© bien exprimĂ©s/compris, et d’arriver Ă  une version propre du proto. Très très impressionnant. Mais le ce n’est pas encore le plus impressionnant.

    Génération de Code

    Une fois ce prototype « texte » mis au point, je lui demande de me gĂ©nĂ©rer du code en html pour que je puisse lancer le jeu en local dans un navigateur. Il cela ne lui pose aucun problème. GĂ©nĂ©ration du code ci-dessous (200 lignes de code en html), quasi-instantanĂ©e, sans aucune faute Ă  l’exĂ©cution.

    Les seules modifs que j’ai eu Ă  lui faire faire sont liĂ©es Ă  des mauvaises comprĂ©hension de certains dĂ©tails des règles non testĂ©es en mode texte. C’est vraiment lĂ  que j’ai trouvĂ© ça ultra impressionnant. Un non-codeur peut faire un prototype fonctionnel de son petit jeu en quelques heures. VoilĂ  ce qu’on appelle un vrai changement de paradigme, il me semble. Quel kif.
    Il ne me reste plus qu’Ă  amĂ©liorer un peu le jeu, ajouter un score, complexifier ceci ou cela, ajouter des images .png, etc. Mais le gros du boulot a Ă©tĂ© fait sans aucune compĂ©tence de codage. Qu’en pensez-vous ? ça vous donne des idĂ©es ?

    Jouez Ă  Priks V1.1 ici : Lancer le jeu

    MAJ :
    J’ai pu remettre en marche ma page de Citations (plugin WordPress pondu par Grok) : Citations
    Et j’ai créé l’outil graphique que je voulais faire depuis longtemps en 5 minutes : Plans perçés.

  • Le Design

    Le Design

    En 2015, StĂ©phane Vial, philosophe et chercheur en design français (maintenant Ă©migrĂ© au Canada), a publiĂ© aux Editions PUF le Que Sais-je ? » « Le Design ». C’est un remarquable ouvrage, passionnant et d’une grande clartĂ©. Il donne un Ă©clairage Ă  la fois historique, philosophique et Ă©pistĂ©mologique sur le Design en tant que discipline.

    Méthodes de conception

    Si le Design est en gĂ©nĂ©ral associĂ© Ă  l’essor de l’industrie et aux arts dĂ©coratifs au XIXe siècle, StĂ©phane Vial montre que ses racines sont fondamentalement liĂ©es Ă  la naissance du projet architectural Ă  la Renaissance, et notamment dans les travaux de Brunelleschi. Ce dernier formalise la sĂ©paration entre conception et rĂ©alisation.

    VoilĂ  pourquoi l’invention du projet en architecture n’est rien d’autre que la naissance de la mĂ©thode dans le domaine de la conception. DĂ©sormais, la conception est une travail mĂ©th-odique, c’est-Ă -dire un cheminement (odos, « la route, la voie ») sĂ©quencĂ©, fractionnĂ©, dĂ©coupĂ© et encadrĂ© par la raison. StĂ©phane Vial

    Si l’histoire du Design montre bien que les batailles idĂ©ologiques et philosophiques sont nombreuses autour du sens mĂŞme de la discipline, l’auteur montre bien que cette racine perdure et constitue la colonne vertĂ©brale du Design. Par exemple, il cite plus loin Roger Tallon, grand designer français :

    Le design n’est ni un art, ni un mode d’expression, mais bien une dĂ©marche crĂ©ative mĂ©thodique qui peut ĂŞtre gĂ©nĂ©ralisĂ©e Ă  tous les problèmes de conception.

    Roger Tallon (1929 – 2011) designer français, considĂ©rĂ© comme le père du design industriel français

    Tension idéologique

    Il y a une tension intrinsèque dans le Design liĂ©e Ă  son essence, Ă  ses racines et Ă  son histoire : approche mĂ©thodique, qui a participĂ© Ă  l’essor industriel formidable de la fin du XIXe et du XXe, il s’est Ă©galement structurĂ© comme discours critique et esthĂ©tique en rĂ©action Ă  l’industrialisation massive, Ă  la standardisation et au consumĂ©risme. StĂ©phane Vial montre bien cela en l’illustrant avec des designers emblĂ©matiques de certains de ces courants, en prĂ©cisant avec une rare clartĂ© les « modèles philosophiques » (et visions du design) dont ils sont les porteurs : William Morris pour le Arts & Craft (1860), Henry Van de Velde pour l’Art nouveau (1900), Walter Gropius pour le Bauhaus (1919), Raymond Loewy pour l’Industrial design (1929) ou encore Jacques ViĂ©not pour l’EsthĂ©tique industrielle (1951).
    L’ouvrage est sur point tout Ă  fait passionnant : il parvient Ă  esquisser les grandes lignes de ce vastte tableau en restant très clair, et suffisamment dĂ©taillĂ©. Cette histoire est fascinante.

    Extension du domaine du Design

    StĂ©phane Vial montre ensuite comment le Design – et c’est bien naturel compte tenu de ses racines – a vu ses limites s’Ă©tendre dans un mouvement d’ »éclipse de l’objet » (Findeli & Bousbaci) :

    L’Ă©clipse ne signifie pas une disparition de l’objet, mais un changement de prioritĂ©, l’objet devenant secondaire au sein d’une expĂ©rience au service des acteurs.


    Source de l’image : Projekt
    L’auteur dĂ©crit de manière très claire diffĂ©rents modèles du projet en design (Conception-rĂ©ception, Double Diamant, modèle de projet selon D. Newman, Design Thiking). Je connais mieux cette partie, et j’ai Ă©tĂ© un peu surpris de voir que, si Armand Hatchuel et le CGS de l’Ecole des Mines Ă©tait citĂ© dans l’introduction, les travau du CGS n’Ă©taient pas mentionnĂ©s dans cette partie sur les thĂ©ories & mĂ©thodes en Design. Compte tenu de la qualitĂ© de l’ouvrage, j’en dĂ©duis qu’il existe des guerres de chapelles. Ce n’est qu’une hypothèse.

    Manifeste trop ambitieux ?

    Le livre termine sur un « Manifeste pour le renouveau social et critique du design« . Je trouve Ă  titre personnel qu’il est clair et bien construit et j’en partage les intentions, mĂŞme s’il oublie un peu, Ă  mon sens, de parler explicitement de mĂ©thode crĂ©ative, et de pragmatisme qui Ă  mon sens sont indissociables du Design. D’une manière gĂ©nĂ©rale, je pense que ce manifeste n’a pas complètement clarifiĂ© le sens du mot « social » : prĂ©tendant dĂ©passer le clivage créé par son usage, il en reconduit le caractère « tautologique ». Toute activitĂ© humaine est sociale. J’y vois la marque du constructivisme11. Par exemple, on peut s’appuyer sur le concept de catallaxie qui caractĂ©rise notre Ă©poque, injectant de la politique dans tout et dans toutes choses, et perpĂ©tuant l’illusion funeste que les humains « structurent » le monde, en oubliant que le monde, ses lois, son organisation, sont en grande partie hors de notre portĂ©e. Tout n’est pas « design-able ». Le design doit savoir, mĂŞme sur les aspects sociaux, connaĂ®tre ses limites.
    Ce ne sont que des remarques tout Ă  fait marginales : j’ai trouvĂ© cet ouvrage splendide, extrĂŞmement bien structurĂ© et clair, passionnant. A lire en prioritĂ© par tous ceux qui, de près ou de loin, ont des activitĂ©s de conception.

  • ChatGPT, ressource pour la conception innovante ?

    ChatGPT, ressource pour la conception innovante ?

    A moins d’avoir vĂ©cu sur une autre planète, vous avez forcĂ©ment entendu parler de ChatGPT. Peut-ĂŞtre n’en avez-vous rien Ă  faire, ce qui est votre droit le plus strict. Mais il faut reconnaĂ®tre que l’outil est d’une puissance terriblement intĂ©ressante, et suscite plein d’usages nouveaux. Dans cet article, je reviens brièvement sur ChatGPT, la thĂ©orie C-K, et un usage intĂ©ressant de chatGPT comme ressource de conception.

    ChatGPT

    ChatGPT, c’est une interface en langage naturel avec une intelligence artificielle qui sait aller chercher, structurer et regrouper, et formaliser Ă  peu près tout et n’importe quoi : vous lui demandez un truc, et elle vous rĂ©pond. Les rĂ©ponses sont en gĂ©nĂ©ral de très bonne qualitĂ©, et en apprenant Ă  poser les bonnes questions, on est vraiment bluffĂ©… Essayez, vous verrez. :)
    Le nombre d’article consacrĂ©s Ă  Chatgpt dans les dernières semaines dĂ©passe largement ce que j’aurai le temps de lire dans une annĂ©e entière. Je vous recommande simplement la lecture de Philippe Silberzahn qui a bien soulignĂ© en quoi c’Ă©tait innovant, « disruptif », et pourquoi les GAFAM n’ont pas pris le sujet Ă  la lĂ©gère.
    Comme toutes les IA et les plateformes soumises au droit positif et aux lubies parfois Ă©tranges des humains, certaines barrières ont Ă©tĂ© mises en place pour garder chatgpt dans le cadre du politiquement correct ; c’est une erreur Ă  mon sens – cela induit de gros biais -, mais c’est une autre discussion. Pour savoir quels sont les risques Ă  utiliser ChatGPT, un petit organigramme a Ă©tĂ© créé par Aleksandr Tiulkanov. Vraiment c’est un outil magnifique. Les usages sont presque infinis, comme moyens d’interagir avec les donnĂ©es, comme outil de gĂ©nĂ©ration de contenus, comme outil de multiplication des usages possibles du NLP, etc, etc.

    Créativité et Théorie C-K

    J’utilise et j’enseigne quelques Ă©lĂ©ments de crĂ©ativitĂ© et de conception innovante, notamment en m’appuyant sur la thĂ©orie C-K. Je vous renvoie Ă  mon article sur la crĂ©ativitĂ©, mais redonnons deux exemples concrets d’objets mentaux (connaissances et concepts, Knowledges et Concepts), et deux modes de raisonnement, que l’on manipule en partant d’un cas prĂ©cis, une voiture (si vous remplacez voiture par n’importe quoi d’autre ça fonctionne toujours) :

    • ComplĂ©tez la phrase suivante, sans rĂ©flĂ©chir outre mesure. Un exemple de voiture est :… Si vous ĂŞtes normalement constituĂ©, vous avez dĂ» penser Ă  des voitures (des modèles, des marques) : une renault 4L, une Mercedès classe A, une Mehari, etc. Ce sont des connaissances : vous ĂŞtes allĂ©s puiser dans vos connaissances. Cette liste est finie (vous aurez un moment Ă©puisĂ© vos connaissances, ou vous aurez approfondi en listant toutes les voitures existantes), et il est possible de se tromper (si je prolonge la phrase avec « abri-bus », c’est faux).
    • ComplĂ©tez Ă  prĂ©sent la phrase suivante. Une voiture est un exemple de :… si vous avez rĂ©pondu vite, vous avez probablement dit « moyen de transport », ou « vĂ©hicule », ou « objet Ă  4 roues ». Vous avez produit des concepts. Cette liste est presque infinie (on peut toujours imaginer de nouveaux liens entre l’objet voiture et des concepts), et il n’est pas vraiment possible d’avoir faux (les concepts n’ont pas de statut logique). Une voiture est un exemple d’objet oĂą je peux dormir, qui m’abrite du vent et de la pluie, qui est fait de plastique et de mĂ©tal, etc. etc.

    L’apport gĂ©nial d’Armand Hatchuel et Benoit Weil, puis de Pascal Le masson, a Ă©tĂ© de thĂ©oriser de manière gĂ©nĂ©rale les raisonnements de conception en montrant qu’ils s’appuient sur la manipulation sĂ©parĂ©e, mais conjointe, d’objets de ces deux espaces (concepts et connaissances). Des opĂ©rateurs propres Ă  chaque espace, et permettant les passages de l’un Ă  l’autre existent. Passionnant ! Je vous renvoie aux travaux du CGS de l’Ecole des Mines, Ă  mon article sur la conception innovante et C-K, et au très bon site Theory C-K pour en savoir plus.

    ChatGPT, créativité et C-K

    En prĂ©parant une petite prĂ©sentation sur crĂ©ativitĂ© et C-K Ă  destination de mes collègues, nous avons eu l’idĂ©e avec un collègue (MaĂ«l pour ne pas le nommer), de tester ces phrases (sur les voitures) sur ChatGPT. Et puis dans une sĂ©ance de C-K, je me suis dit que l’on pourrait systĂ©matiser cet usage et faire de ChatGPT un adjoint du travail de conception innovante, permettant de complĂ©ter les connaissances, et gĂ©nĂ©rer de nouveaux concepts et ainsi de rendre plus systĂ©matique et crĂ©ative l’exploration en C-K. Creusons un peu le sujet.

    Connaissances et concepts

    J’avais commencĂ© Ă  par demander Ă  ChatGPT de complĂ©ter la phrase : « un exemple de voiture est… ». Voici la rĂ©ponse apportĂ©e.

    Et ensuite, la phrase pour forcer les concepts, réponse en image.

    Je pensais que j’avais un peu coincĂ© l’IA, et qu’elle avait du mal Ă  dĂ©fixer du concept de vĂ©hicule. Mais pas du tout, j’avais simplement mal posĂ© la question. VoilĂ  ce qu’il produit avec une question mieux posĂ©e – merci MaĂ«l! -, et l’incitant Ă  s’autoriser un peu de crĂ©ativitĂ© (dĂ©calage du regard sur l’objet, ou « casser » des caractĂ©ristiques considĂ©rĂ©es comme majeures pour l’identitĂ© de l’objet) :

    C’est dĂ©jĂ  beaucoup plus riche, et beaucoup plus intĂ©ressant ! Il est donc relativement simple de forcer ChatGPT Ă  produire des concepts. A creuser pour optimiser (notamment le forcer Ă  ne pas mĂ©langer les concepts diffĂ©rents en une seule phrase), mais la possibilitĂ© est lĂ .

    Exploration C-K

    Nous avons ensuite sur un cas concret d’exercice C-K (C0= »la montre qui prend soin de moi »), jouĂ© avec ChatGPT. C’Ă©tait très intĂ©ressant car c’est Ă  la fois un super pourvoyeur de connaissances, mais donc aussi un très bon producteur de concepts. A minima, cela permet de tester la robustesse de l’arborescence de concepts, d’en identifier de nouveaux. Mais cela permet aussi, sur certains concepts projecteurs, de lui faire gĂ©nĂ©rer des caractĂ©ristiques supplĂ©mentaires très rapidement, et donc de provoquer des expansions rapides et relativement rigoureuses de certains endroits de l’arbre. Je vais maintenant tester sa capacitĂ© Ă  faire des liens entre deux « idĂ©es », ou « concepts », ou « connaissances », car cela peut-ĂŞtre aussi très utile.

    Super opportunité

    J’invite tous les concepteurs Ă  tester les usages rendus possibles par ChatGPT dans leurs activitĂ©s, car il me semble que c’est un très beau terrain de jeu et d’exploration. Si j’Ă©tais capable de programmer, je programmerais un algo utilisant ChatGPT pour construire automatiquement une arborescence de concepts et une cartographie de connaissances Ă  partir d’un C0. En l’autorisant Ă  remonter en concept sur le C0, au besoin, mais Ă  la recherche d’Ă©lĂ©ments prĂ©sentant de la valeur. Il faudrait programmer aussi une « fonction d’Ă©valuation de la valeur », une « fonction d’Ă©valuation de la gĂ©nĂ©rativité », pour que le programme comprenne Ă  quel endroit il peut ĂŞtre intĂ©ressant de creuser. On pourrait ainsi gĂ©nĂ©rer presqu’automatiquement des concepts projecteurs, des idĂ©es crĂ©atives, en partant d’un brief.
    Update : petite discussion oĂą je demande Ă  chatgpt de faire un CK pour moi. Impressionnant:
    do you know CK

    Et vous ? Avez-vous testé chatGPT ? Voyez-vous des usages pertinents dans votre secteur ?

  • Innovation pour les nuls

    Innovation pour les nuls

    Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’innovation, la crĂ©ativitĂ©, et leur place dans les entreprises. Il manquait un index à  cette sĂ©rie d’articles consacrĂ©es à  l’innovation, et je publie donc ce post pour regrouper les diffĂ©rents articles « Innovation pour les nuls ». En voici la liste :

    Bien entendu, je ne me prĂ©sente pas comme un expert : n’hĂ©sitez pas à  challenger, questionner, discuter, tous ces contenus ! Je les publies ici pour garder une trace, mĂŞme peu construite, des rĂ©flexions qui sont les miennes, ou des connaissances qui me paraissent utiles. Vous pouvez Ă©galement commenter pour demander un article sur tel ou tel sujet (en lien avec innovation et crĂ©ativitĂ© bien sĂ»r) : si je le maĂ®trise suffisamment je le produirai avec plaisir. C’est ça aussi, l’innovation pour les nuls ! Bonne lecture !

  • Innovation pour les nuls #6 – Business model ?

    Innovation pour les nuls #6 – Business model ?

    Dans le monde de l’innovation, il est courant d’entendre parler de Business Models, ou de modèles d’affaires. C’est un outil très utile pour concevoir, décrire et clarifier les activités au sein des entreprises. Ce court article vous propose de découvrir ce qu’est un Business Model, quelques outils et canevas utiles pour les représenter, et une classification des grands types de modèles d’affaires.

    Qui dit modèle, dit … modèle

    Un modèle, c’est toujours une simplification de la rĂ©alitĂ©. Le modèle d’affaire simplifie les activitĂ©s des entreprises en les dĂ©crivant comme l’articulation entre 4 types d’élĂ©ments (dĂ©crits ci-après et illustrĂ© par le diagramme). J’ai pris cette dĂ©finition dans l’excellent livre de Clayton Christensen (« The Innovator’s prescription ») qui donne une bonne vision des disruptions en cours et à  venir dans le monde de la santĂ©. C’est un outil indispensable pour rĂ©flĂ©chir à  l’innovation.

    • Proposition de valeur (value proposition) : tout commence par une proposition de valeur, c’est-à -dire un service ou un produit qui aide le client à  faire mieux, plus facilement, plus Ă©conomiquement ce qu’il cherche à  faire (le job-to-done)
    • Ressources : tout ce qu’il va ĂŞtre nĂ©cessaire de mobiliser — personnes, technologies, produits, marques, etc.. – pour rendre effective et dĂ©livrer la proposition de valeur.
    • Processus : toutes les bonnes manières de travailler ensemble, qui incorporent les apprentissages
    • Profit formula : l’équation Ă©conomique du business ; actifs, coĂ»ts de structures, et les marges opĂ©rationnelles. Sans marges, la proposition de valeur ne peut ĂŞtre durablement dĂ©livrĂ©e.

    Représentations & canevas

    Il existe plusieurs façons de représenter un modèle d’affaire (ou Business model). Les plus connues sont certainement :

    • le Business model canevas (celui d’Osterwalder), qui dĂ©taille autour de la proposition de valeur d’une part les activitĂ©s, ressources et partenaires nĂ©cessaires pour la dĂ©livrer, et d’autre part les canaux de distribution et les diffĂ©rents segments de clients à  qui l’on souhaite apporter ce service/cette valeur. Vous pouvez le trouver ici.
    • le Lean canvas, qui est plus orientĂ© sur les projets dĂ©butants, et qui sert à  bien formuler le problème que l’on veut rĂ©soudre (avant de rĂ©flĂ©chir à  la solution). Il est très utile, et la lecture des bouquins de son inventeur aussi (Ash Maurya). L’approche dĂ©veloppĂ©e par l’auteur est très orientĂ©e « fact based » : le canvas sert à  poser ses hypothèses, et à  aller tester les plus risquĂ©es d’abord. Lean Canvas

    Typologie de modèle d’affaires

    Pour finir, des chercheurs — cités par Christensen dans son livre —, Oystein Fjeldstad et Charles Stabell, ont proposé une typologie de BM très différents. Les grands types de Business Models, en quelque sorte. Ils en distinguent 3 sortes, qui se trouvent dans le tableau ci-dessous. Je laisse les noms en anglais pour ne pas risquer de contre-sens.

    Bien sûr, il n’est pas rare que des institutions ou des organisations mélangent plusieurs de ces modèles archétypaux. Et vous ? Quel est votre modèle d’affaire ? Est-il pur ? Est-il hybride ?

    Pour aller plus loin (plus sûrement et plus lentement) :

    >> Lire les autres articles de la série <<