CatĂ©gorie : đŸ§‘đŸ»â€đŸ€â€đŸ§‘đŸ» SociĂ©tĂ©

  • Ce que n’est pas l’identitĂ©

    Ce que n’est pas l’identitĂ©

    Sous ce titre formidable – Ce que n’est pas l’identitĂ©, Nathalie Heinich, sociologue au CNRS, signe un livre non moins formidable. Formidable par sa concision, sa clartĂ©, sa grande richesse (Nathalie Heinich a consacrĂ© sa vie de chercheuse Ă   ce thĂšme de l’identitĂ©), et sa structure implacable.

    ModĂšle de l’identitĂ©

    L’auteur commence par dĂ©tailler tout ce que n’est pas l’identitĂ©, pour nous faire avancer, peu Ă   peu, vers le modĂšle de l’identitĂ© qu’elle a proposĂ©. Elle termine par un chapitre oĂč elle donne une dĂ©finition de l’identitĂ©, et une post-face oĂč elle dĂ©crit, de maniĂšre transparente, sa propre relation Ă   ce thĂšme. 

    Son modĂšle est le suivant (voir schĂ©ma) : l’identitĂ© est Ă   la fois la perception que nous avons de nous-mĂȘme (autoperception), la maniĂšre que l’on a de se prĂ©senter aux autres (prĂ©sentation), et la maniĂšre dont nous sommes perçus par les autres (dĂ©signation). 

    Je trouve ce modĂšle extrĂȘmement utile pour penser la question de l’identitĂ©. Il permet d’aller plus loin que les modĂšles binaires, intĂ©ressants par ailleurs pour commencer Ă   comprendre la complexitĂ© du sujet, et parce qu’elle dĂ©crivent des clivages importants. Elle mentionne – entre-autres – deux modĂšles « binaires » :

    • celui de Paul Ricoeur, basĂ© sur la contradiction logique contenu dans le mot identitĂ©. Ipse (ce qui nous rend unique, ce qui nous diffĂ©rencie d’autrui), et idem (ce qui nous assimile avec un ou des groupes de rĂ©fĂ©rences)
    • celui de Robert K. Merton, basĂ© sur la distinction entre les caractĂ©ristiques ascribed (« prescrites », celle qui nous sont attachĂ©es par notre naissance, race, milieu social, sexe, etc..) et acquired (« acquises », celles qui sont l’objet de nos choix). 

    Ces modĂšles binaires, structurants et intĂ©ressants, tendent Ă   « reconduire une opposition individu/sociĂ©tĂ© qui charrie beaucoup d’impensĂ©s et d’illusions – au premier rang desquelles celle selon laquelle il pourrait exister des individus indĂ©pendants d’une sociĂ©tĂ©. »

    Quelques caractĂ©ristiques de l’identitĂ©

    Elle complexifie, et nuance, et enrichie l’utilisation de ce modĂšle en le faisant rĂ©sonner avec les trois plans « ontologiques » de Lacan : RĂ©el, Imaginaire, Symbolique, en redĂ©finissant et en clarifiant leur sens (cela me rappelle les travaux sur les imaginaires auxquels j’avais eu la chance de participer). Le plan du RĂ©el est celui de la situation dans laquelle on se trouve, le plan Imaginaire est celui du rĂŽle que l’on endosse, et le plan Symbolique est celui de la place qu’on occupe. 

    Nathalie Heinich insiste sur une propriĂ©tĂ© fondamentale de l’identitĂ© : « elle ne se manifeste que lorsqu’elle pose problĂšme. » En effet, dans les cas oĂč les 3 moments sont Ă   peu prĂšs cohĂ©rents, il n’y a pas Ă   proprement parler de question d’identitĂ©. C’est lorsque la dissociation/tension entre les 3 moments devient forte (penser Ă   de la discrimination, raciale ou sexuelle), que les problĂšmes d’identitĂ© surgissent. Parler d’identitĂ©, c’est dĂ©jĂ   assumer qu’il y ait une tension dans cette identitĂ©. 

    La cohĂ©rence identitaire est un Ă©lĂ©ment fondamental de la compĂ©tence Ă   la vie sociale et, au-delĂ  , du bonheur d’exister.

    Je pense que cet ouvrage devrait faire partie du programme du LycĂ©e : tout le monde y gagnerait, personnellement comme collectivement, pour comprendre une partie de ce qui se joue dans nos relations interpersonnelles. 

    Pour finir, je vous livre, Ă   la fin (comme Nathalie Heinich dans son livre), la dĂ©finition qu’elle propose pour l’identitĂ© :

    L’identitĂ©, c’est la rĂ©sultante de l’ensemble des opĂ©rations par lesquelles un prĂ©dicat est affectĂ© Ă   un sujet/objet

    Il faut absolument lire ce livre indispensable, solide, rigoureux. 

    Note de fin : J’ai dĂ©couvert en Ă©crivant cet article que Nathalie Heinich avait fait l’objet d’une sordide pĂ©tition/campagne de dĂ©nigrement lorsqu’elle avait obtenu le prix PĂ©trarque de l’essai. Sa rĂ©ponse et les messages de soutien qu’elle a reçus sont disponibles ici.  

  • Plaidoyer pour un libĂ©ral-conservatisme

    Plaidoyer pour un libéral-conservatisme

    J’avais proposĂ© cet article pour le numĂ©ro spĂ©cial de l’Incorrect consacrĂ© au libĂ©ralisme, mais il a Ă©tĂ© refusĂ©. Ce n’est pas grave, je le publie ici quand mĂȘme. Je vous invite à  lire leurs articles, je pense que j’y rĂ©agirai ici mĂȘme. Mon article tentait une synthĂšse entre libĂ©ralisme et conservatisme.

    Libéralisme

    Le libĂ©ralisme est une philosophie qui place, comme son nom l’indique, la libertĂ© comme une fin en soi. Pas n’importe quelle libertĂ© : la libertĂ© individuelle, avec des limites, et Ă©rigĂ©e en principe d’organisation de la sociĂ©tĂ©. Ce courant de pensĂ©e a Ă©mergĂ© aux XVIIĂšme et XVIIIĂšme siĂšcles en Occident, et a accompagnĂ© les « rĂ©volutions dĂ©mocratiques Â»..

    C’est une philosophie du droit naturel, c’est-à -dire reconnaissant à  tout ĂȘtre humain, par sa nature mĂȘme, des droits inaliĂ©nables : la libertĂ©, la propriĂ©tĂ© de soi et du fruit de son travail, le droit à  la vie, le droit de propriĂ©tĂ© et de jouir librement de ses biens, le droit d’échanger. Le droit naturel consiste en une universalitĂ© des droits (valables pour tout ĂȘtre humain), et une Ă©galitĂ© devant la Loi (pour ĂȘtre juste, la Loi doit traiter chaque individu identiquement). Ce sont les principes, non discutables, des sociĂ©tĂ©s ouvertes. La sociĂ©tĂ© ouverte suppose la stricte observation de rĂšgles abstraites de juste conduite (formelles, universelles, Ă©volutives) respectant ces droits naturels. Elle s’oppose à  la sociĂ©tĂ© tribale. La garantie de ces droits inaliĂ©nables a permis l’extraordinaire dĂ©veloppement du monde occidental : Ă©mergence d’institutions dĂ©mocratiques et pluralistes, explosion des capacitĂ©s d’échanges, de partage du savoir et de la technique.

    Le libĂ©ralisme n’est pas apparu soudainement : il est le fruit, le prolongement et la synthĂšse de l’histoire occidentale : à  la fois du passĂ© grĂ©co-romain, comme de la RĂ©volution papale des XIĂšme-XIIIĂšme siĂšcles, mettant la raison et le droit au service de l’éthique biblique. Le libĂ©ralisme est un humanisme chrĂ©tien.

    Contre le progressisme hors-sol

    Chacun des grands courants de pensĂ©e en politique – conservateurs, libĂ©raux, progressistes – porte des idĂ©aux et des travers. Le dialogue entre les trois courants est fĂ©cond s’il se base sur une Ă©thique commune du dĂ©bat critique et ouvert, placĂ© sous le signe de la raison.

    Les conservateurs, hĂ©ritiers de ce qu’il y a de noble dans notre civilisation et nos traditions, contre la barbarie, soumettent parfois leur raison à  des vĂ©ritĂ©s rĂ©vĂ©lĂ©es. Les libĂ©raux, protecteurs de la libertĂ© individuelle contre l’arbitraire et la coercition des pouvoirs, dĂ©veloppent parfois une pensĂ©e trop abstraite, niant la rĂ©alitĂ© et l’influence des enracinements. CensĂ©s ĂȘtre les promoteurs de la belle idĂ©e de progrĂšs, les progressistes nagent malheureusement depuis 30 ans en plein dĂ©lire socialiste. Et comme ils ont pris l’ascendant philosophique, politique, et culturel, cela nuit à  notre sociĂ©tĂ©. Trois dĂ©rives doivent ĂȘtre combattues, chacune portant atteinte au principe d’égalitĂ© devant la loi :

    • Un Ă©galitarisme forcenĂ© d’abord, qui confond Ă©galitĂ© devant la Loi, et Ă©galitĂ© de fait. La Loi n’est pas là  pour corriger les inĂ©galitĂ©s, mais pour garantir les droits de chacun. ”Il y a toute les diffĂ©rences du monde entre traiter les gens de maniĂšre Ă©gale et tenter de les rendre Ă©gaux. La premiĂšre est une condition pour une sociĂ©tĂ© libre alors que la seconde n’est qu’une nouvelle forme de servitude. » (Hayek)
    • Un Ă©tatisme inexorable, ensuite, qui est le rejet de l’ordre spontanĂ© libre. L’état de Droit implique un Etat fort, intransigeant, avec des missions restreintes à  la sĂ©curitĂ© (extĂ©rieure et intĂ©rieure), et à  l’application du Droit. L’État omniprĂ©sent provoque une inflation juridique, des rĂ©glementations et une fiscalitĂ© liberticides, une infantilisation des citoyens. L’omniprĂ©sence nĂ©cessite des moyens, trouvĂ©s par des prĂ©lĂšvements et un endettement massifs.
    • Enfin, une politique d’immigration inconsĂ©quente, aveugle à  la rĂ©alitĂ© des diffĂ©rences civilisationnelles, a conduit au communautarisme. Des zones entiĂšres du territoire ne sont plus, au sens propre, juridique, comme au sens symbolique, culturel, la France. Les civilisations non-occidentales ont vocation à  rester minoritaires en France : on ne peut bĂątir une sociĂ©tĂ©, et des rĂšgles justes, en faisant coexister des principes qui sont contradictoires. Tout citoyen français devrait vivre selon les coutumes et les Lois françaises, quelque soit sa condition, et son lieu d’habitation.

    Au-delà  de leurs diffĂ©rences, les conservateurs et les libĂ©raux doivent donc s’allier contre la « folie » des progressistes porteurs de ces travers Ă©galitaristes, Ă©tatistes et communautaristes.

    L’ñme de l’occident

    Le joyau qui pourrait ĂȘtre au coeur de cette alliance, c’est le fait de penser chaque ĂȘtre humain à  la fois comme une personne, et un individu :

    • Une personne, avec sa singularitĂ©, ses aspirations, ses enracinements, sa spiritualitĂ©, ses choix,
    • un individu ”gommĂ©Â Â»Â de ces particularitĂ©s, mais dotĂ© de droits inaliĂ©nables, assumant la responsabilitĂ© de ses actes, et traitĂ© comme les autres devant la Loi.

    Cette distinction est à  conserver à  tout prix, car elle est la condition pour pouvoir imaginer « une vie bonne, avec et pour autrui, dans des institutions justes Â» (Ricoeur).

    C’est l’esprit du libĂ©ralisme, et c’est l’ñme de l’Occident.

  • La grĂšve (Atlas Shrugged)

    La grĂšve (Atlas Shrugged)

    La GrĂšve, roman fleuve, unique, philosophique, est signĂ© Ayn Rand (de son vrai nom Alissa Zinovievna Rosenbaum), philosophe, scĂ©nariste et romanciĂšre amĂ©ricaine d’origine russe, nĂ©e en 1905 Ă   Saint-PĂ©tersbourg et morte en 1982 Ă   New York.

    La grĂšve : roman philosophique

    C’est un livre hors du commun : vĂ©ritable roman philosophique, Ă   thĂšse, il en a les inconvĂ©nients et les qualitĂ©s. Les inconvĂ©nients, tout d’abord : Ă   force de dĂ©montrer les choses, la narration perd en rythme, et certaines tirades des personnages sont franchement surrĂ©alistes (personne ne prend la parole en sociĂ©tĂ© pour faire un discours d’une heure). Mais ce serait oublier les qualitĂ©s, rĂ©elles, du roman. Il y a de trĂšs beaux passages, et c’est en partie liĂ© aussi Ă   cet aspect philosophique. Ayn Rand insuffle dans ses personnages quelque chose d’Ă©pique, d’hĂ©roĂŻque, qui par moment touche trĂšs juste. Certaines scĂšnes sont tout bonnement extraordinaires, par leur intensitĂ© dramatique mĂȘlĂ©e Ă   un sentiment de justesse morale et philosophique. Le discours de John Galt Ă   la radio incarne tout cela Ă   la fois.
    Le roman est assez simple dans sa structure : on assiste Ă   la lente destruction de la sociĂ©tĂ© industrielle, basĂ©e sur la raison, le respect de la justice, de la propriĂ©tĂ©, par d’obscurs intrigants politiques qui parviennent Ă   retourner les valeurs morales, et Ă   faire triompher le mensonge et la nĂ©gation de la rĂ©alitĂ©, sous couvert d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. L’intrigue tient au fait qu’un certain nombre de capitaines d’industrie, de capitalistes, disparaissent de la circulation : sont-ils « dĂ©serteurs », comme le proclame le gouvernement, ou ont-ils rejoints une sorte de « rĂ©sistance », comme les rumeurs semblent l’indiquer ? Je ne vous rĂ©vĂ©lerai bien sĂ»r pas la suite ici, mais elle ne déçoit pas du tout. Le scĂ©nario imaginĂ© autour de Dagny Taggart, personnage principal, est incroyable. Ms Taggart est une femme d’affaire, Ă   la tĂȘte d’une grande sociĂ©tĂ© de chemin de fer familiale. Personnage trĂšs attachant, proche d’Ayn Rand, courageuse, libre. PassionnĂ©ment Ă©prise de libertĂ©.

    La grĂšve : roman anti-communiste et rationnaliste

    Quand on sait qu’Ayn Rand a fuit plusieurs fois avec ses parents les rĂ©volutionnaires communistes, et qu’elle a du subir la propagande et la censure, pour finalement devoir quitter la Russie, on comprend mieux son combat pour la libertĂ©. Elle porte, dans La GrĂšve notamment, une charge fabuleuse contre l’altruisme, et la culpabilitĂ© judĂ©o-chrĂ©tienne (le pĂ©chĂ© originel), et prĂŽne un « égoĂŻsme rationnel ». Selon elle, aucune morale n’est possible en niant le droit pour chaque personne, de poursuivre son bonheur comme il l’entend, et de vivre avant tout pour se rĂ©aliser. Elle a mis en place une philosophie qui me parle : individualiste, rationaliste. Elle est connue sous le nom d’objectivisme. Il est bien clair que son discours est presque inaudible dans les moments que nous vivons : trop individualiste, trop anti-socialiste, pas assez misĂ©rabiliste, pas assez collectiviste, trop attachĂ© Ă  la raison et au mĂ©rite, Ă  l’Ă©change libre et au progrĂšs, et trop peu complaisant avec la moraline de salon, prĂŽnant le sacrifice et la nĂ©gation des valeurs. J’ai le sentiment, en lisant Rand, d’ĂȘtre nĂ© trop tard. Le monde moral d’Ayn Rand, vivant Ă  travers les personnages de la GrĂšve, me semble illustrer l’humanitĂ© dans ses aspirations les plus nobles et exigeantes.
    Certains risquent de ne pas trouver ce roman Ă   leur goĂ»t. Peut-ĂȘtre mĂȘme choquant. Je crois, pour ma part, que les amoureux de la libertĂ© y trouveront une incarnation originale et unique de l’humanisme libĂ©ral, et capitaliste.
    Si vous trouvez que la derniĂšre phrase comporte trop de gros mots, ne lisez surtout pas ce livre.

  • De la dĂ©mocratie en AmĂ©rique

    De la démocratie en Amérique

    J’ai eu la chance d’avoir un Kindle lors de mon dernier anniversaire. Du coup, je dĂ©couvre les joies de la lecture facile dans le mĂ©tro, ou au dodo. C’est lĂ©ger un Kindle, et on peut facilement annoter des choses en lisant. Le premier livre que j’ai lu, c’est le formidable livre d’Alexis-Henri-Charles ClĂ©rel, comte de Tocqueville, couramment connu sous le nom d’Alexis de Tocqueville (1805-1859). Personnage de roman, issu de la noblesse, homme politique, philosophe, sociologue avant l’heure, c’est surtout une plume incroyable de clartĂ© et de concision. Alexis de Tocqueville a fait un voyage pour aller observer le systĂšme carcĂ©ral aux USA naissants, mais il y a passĂ© plus de temps, et en a rapportĂ© un premier livre (1835) et un second (1940) qui dessinent une analyse sociale et politique des USA : « De la dĂ©mocratie en AmĂ©rique ».

    Livre de référence de philosophie politique

    C’est un livre formidable, fondamental, et qui consiste en une sorte d’analyse d’une Nation naissante, les USA, comparĂ©e avec ce que Tocqueville connait, c’est-à -dire la monarchie française post-rĂ©volutionnaire, et l’Ă©mergence de la mĂȘme sociĂ©tĂ© dĂ©mocratique en France.
    Le livre est formidable pour plusieurs raisons, outre les qualités stylistiques déjà  évoquées : un esprit synthÚse extraordinaire, un goût pour la précision factuelle, et la rigueur intellectuelle, une grande connaissance du sujet.

    Je ne sais si j’ai rĂ©ussi à  faire connaĂźtre ce que j’ai vu en AmĂ©rique, mais je suis assurĂ© d’en avoir eu sincĂšrement le dĂ©sir, et de n’avoir jamais cĂ©dĂ© qu’à  mon insu au besoin d’adapter les faits aux idĂ©es, au lieu de soumettre les idĂ©es aux faits.

    On sent que Tocqueville s’est rĂ©ellement plongĂ© dans le pays amĂ©ricain, dans sa culture, dans son histoire. Ce qui en ressort, si je devais rĂ©sumer à  l’extrĂȘme :

    • la vague de fond de l’Ă©galitĂ© qui est en train de transformer le monde. Ce que Tocqueville voit dans l’AmĂ©rique, c’est l’avenir des nations europĂ©ennes. Il souligne à  la fois l’inĂ©luctabilitĂ© du phĂ©nomĂšne, son extrĂȘme proximitĂ© avec l’idĂ©e de libertĂ©, et en mĂȘme temps en dĂ©crit trĂšs bien les aspects potentiellement excessifs (tome 2 notamment avec le concept de tyrannie de la majoritĂ©).
    • la construction de la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine qui s’est faite sur une base locale, communale, c’est-à -dire dans une logique de subsidiaritĂ© ascendante. Les institutions de chaque Etat ne sont lĂ©gitimes que pour remplir les fonctions que l’Ă©chelon infĂ©rieur, communal, ne peut assurer/gĂ©rer seul. La constitution de l’Union est dans le mĂȘme esprit : le niveau national ne peut prendre la main que sur des sujets dĂ©lĂ©guĂ©s des diffĂ©rents Etats vers le gouvernement national. Tocqueville y voit un puissant levier pour limiter le pouvoir, par son morcellement. J’y vois aussi un moyen simple pour Ă©viter une centralisation excessive. Tocqueville insiste Ă©galement sur le rĂŽle que les citoyens jouent dans l’administration et la politique locale, bien plus qu’en France.
    • A titre personnel, Tocqueville voit dans tous ces changements, qu’il sent bien arriver aussi en France, à  la fois un progrĂšs pour la libertĂ© en gĂ©nĂ©ral, mais aussi une rĂ©gression pour la libertĂ© de penser et d’expression : la fameuse tyrannie de la majoritĂ© rend presque infrĂ©quentable celui qui ne pense pas comme la majoritĂ©. Une fois une idĂ©e adoptĂ©e par la majoritĂ©, elle n’est plus discutable. Cela ne vous rappelle rien ?
    • Enfin, on peut lire dans « De la dĂ©mocratie en AmĂ©rique » un plaidoyer pour une libĂ©ralisme subsidiaire assez large dans la sociĂ©tĂ©, sauf pour les aspects de politique extĂ©rieures. Par ailleurs, et sur de nombreux aspects, il me semble ĂȘtre un vrai libĂ©ral humaniste, et un vrai critique de l’utilitarisme, position dont je ne saurais ĂȘtre plus proche.Je reviendrai là -dessus dans un billet à  venir.
    • Tocqueville pensait que les bienfaits de la dĂ©mocratie amĂ©ricaine rĂ©sidait dans la tranquille et pacifique coexistence des individus, et la prospĂ©ritĂ©. Il voyait dans cet Ă©tat de choses un monde d’oĂč l’esprit de grandeur, et d’entreprendre de grands projets, aurait disparu. Je pense qu’il avait en partie raison, et en partie tort sur ce point : il avait une grille de lecture militaire, aristocratique, de ce qui est grand ou non. Les dĂ©mocraties ont montrĂ© par la suite, grĂące aux progrĂšs de la libertĂ© et de la technique, qu’elles pouvaient aussi secrĂ©ter de grands projets, et de grandes entreprises.

    Grand auteur

    Au-delà  de ces quelques points, trĂšs subjectifs et rĂ©ducteurs, je vous recommande trĂšs vivement la lecture de cet ouvrage majeur. Beaucoup de passages sont extraordinaires de luciditĂ©, de rigueur morale et intellectuelle, et c’est un plaisir de chaque instant que de suivre cette analyse, et cette langue française magnifique. Personne ne peut comprendre ce qu’est la dĂ©mocratie, sans avoir lu Tocqueville. Le mot de la fin à  l’auteur (une citation parmi des dizaines et des dizaines notĂ©es sur mon kindle) :

    Il existe une loi gĂ©nĂ©rale qui a Ă©tĂ© faite ou du moins adoptĂ©e, non pas seulement par la majoritĂ© de tel ou tel peuple, mais par la majoritĂ© de tous les hommes. Cette loi, c’est la justice.

  • Gilets jaunes : insaisissable peuple ?

    Gilets jaunes : insaisissable peuple ?

    Comme tout le monde en France, je me suis interrogĂ© sur la signification du mouvement des gilets jaunes. Je m’efforce d’Ă©crire ce billet pour me forcer Ă   rĂ©sumer ce que j’en pense. Je ne prĂ©tends pas apporter un regard nouveau ou original sur le sujet.

    En prĂ©ambule : je prĂ©cise que je ne parle que des Gilets Jaunes. Pas des insupportables racailles de banlieues qui viennent systĂ©matiquement utiliser les rassemblements pour piller et agresser la population. Ni des Black-blocks, que je mets dans le mĂȘme panier. La place de tous ces haineux est en prison.

    Qui sont ces Gilets jaunes ?

    Cela Ă©tant posĂ©, il est vrai que le mouvement est difficile en partie Ă   saisir : protĂ©iforme, multi-revendications, trĂšs suivis donc en train de subir des tentatives de rĂ©cupĂ©rations de tous les cĂŽtĂ©s de l’Ă©chiquier politique. C’est intĂ©ressant, car le soutien de nombreuses personnalitĂ©s politiques et intellectuelles au mouvement permet de se rendre compte de certaines caractĂ©ristiques intrinsĂšques. Ce mouvement a dĂ©marrĂ© par une exaspĂ©ration liĂ©e Ă   la hausse des taxes sur le carburant. C’est un mouvement populaire, spontanĂ©. Le Manifeste des gilets jaunes pour la France, qui circule sur Facebook me semble en saisir assez bien l’essence (« Marre du mĂ©pris »): rejet des Ă©lites (politiques et mĂ©diatiques), affirmation d’un peuple et de son identitĂ©, des terroirs, rejet de l’immigration massive et subie, rejet de la finance mondialisĂ©e. J’y retrouve assez bien le peuple que l’on ne voit pas dans les Ă©ternelles discussion entre « centre ville » et « banlieues ». Le peuple des moyennes et petites villes, le peuple de la campagne. Le peuple qui parle de quelque part, ancrĂ©.

    Bien sĂ»r, il y a de multiples modĂšles mentaux, et perspectives, pour analyser et comprendre ce qui se joue. Bien sĂ»r, chacune est en partie rĂ©ductrice. Mais, voilĂ  , j’ai Ă   vous proposer une analyse toute bĂȘte qui simplifie la question. A vous de me dire en commentaires si elle est simpliste ou non, et sur quels points…

    La colÚre est légitime

    Ma thĂ©orie est simple : la colĂšre qui s’exprime dans le mouvement des gilets jaunes est une colĂšre lĂ©gitime, et qui parle du rĂ©el. Elle est en opposition avec des « élites » qui, avec tout un enrobage rhĂ©torique, sont dans une forme d’idĂ©ologie permanente, d’utopie. Les gilets jaunes expriment une colĂšre qui n’est pas neuve : elle couve depuis des dizaines d’annĂ©es. Et j’ai la faiblesse de croire que deux Ă©lĂ©ments de la rĂ©alitĂ© rattrapent simplement le monde politique, via la colĂšre des gilets jaunes, et le bon sens populaire. Je soutiens sans rĂ©serve les gilets jaunes, au titre de ces deux Ă©lĂ©ments, qui sont deux sujets connus de tous, mais qu’il est de bon ton de ne pas trop Ă©voquer en sociĂ©tĂ© : c’est grossier de dire la vĂ©ritĂ©. Je vais donc l’Ă©crire de maniĂšre trĂšs basique, trĂšs simple. Tout cela est connu, il y a des tonnes de livres et d’articles qui dĂ©crivent ce rĂ©el depuis longtemps. Ensuite, il y a ceux qui veulent voir, et ceux qui ne veulent pas voir.

    Identité vs multiculturalisme

    Le peuple a compris que le multiculturalisme est une impasse. On ne peut pas construire de force une culture abstraite, qui nie l’histoire, les traditions, les coutumes, des peuples. Se cristallisant par moment – et pour cause ! – sur l’islam politique, ce dĂ©bat est plus vaste, et concerne simplement notre identitĂ© française. Nous sommes un pays occidental, judĂ©o-greco-romano-chrĂ©tien. Nous sommes libĂ©raux et universalistes. Dans notre pays, on est tolĂ©rants, libres de croire ou de ne pas croire, et les citoyens sont Ă©gaux devant la Loi. C’est simple, mais ça nous a pris plus de 2500 ans pour en arriver lĂ  . Ceux qui n’aiment pas ce qu’est la France sont libres d’aller vivre ailleurs. Il est temps de lire Levi-strauss, Braudel et Huntington.

    Liberté vs constructivisme

    Le peuple sait bien que l’Etat occupe une place beaucoup trop importante, dĂ©lirante, dans la vie des citoyens. RĂ©glementations Ă©touffantes, fiscalitĂ© confiscatoire et incohĂ©rente, dĂ©penses publiques mal Ă©valuĂ©es, endettement honteux, nombres de fonctionnaires dĂ©lirant. Cela nuit Ă   la libertĂ© d’action, au niveau de vie du pays, cela créé du chĂŽmage, cela empĂȘche la prospĂ©ritĂ©. La sociĂ©tĂ© ouverte et libre, c’est une sociĂ©tĂ© de coopĂ©ration gĂ©nĂ©ralisĂ©e, via la division du travail et le partage du savoir. Il est grand temps que les idĂ©ologues/parasites qui veulent imposer un ordre social aux autres, d’en haut, disparaissent du jeu politique. Il est grand temps de comprendre que Von Mises et Hayek sont des penseurs mille fois plus justes que Marx.

    Fin du coup de gueule.

    Le peuple n’est insaisissable que l’on si l’on ne veut plus le regarder en face, ainsi que la rĂ©alitĂ© dans laquelle il est plongĂ©. J’espĂšre sincĂšrement pour Macron, et son gouvernement, que son allocution de ce soir sera pertinente, et parlera de ces deux Ă©lĂ©ments de la rĂ©alitĂ©, frontalement, sans faire du bla-bla de politicien. Je n’en suis pas sĂ»r du tout.

  • Poisons et antidotes

    Poisons et antidotes

    J’ai eu l’occasion de faire une prĂ©sentation lors de la derniĂšre journĂ©e plĂ©niĂšre de la CommunautĂ© d’innovation Renault, dont le thĂšme Ă©tait « Poisons et antidotes de l’innovation ». Les Ă©changes ont Ă©tĂ© super intĂ©ressants, et je voulais partager ici les Ă©lĂ©ments que j’avais apportĂ© à  la discussion, via une prĂ©sentation intitulĂ©e « Du poison ? Avec modĂ©ration ! ».

    Toxicologie

    Une plongĂ©e dans l’univers des poisons et antidotes permet de dĂ©gager quelques vĂ©ritĂ©s importantes :

      • Pas de vie sans poisons : il y a des poisons partout dans l’environnement (champignons et plantes toxiques, animaux venimeux, etc..), et il y aussi dans le corps humain de la sĂ©crĂ©tion de poisons, et des organes de rĂ©gulation permettant de les stocker, Ă©vacuer, dĂ©truire. Tout organisme vivant est soumis à  des poisons et antidotes, externes et internes en permanence. Loin de notre imaginaire du poison issue des contes de fĂ©e, oĂč le poison est concoctĂ© par un(e) mĂ©chant(e) empoisonneur(euse). Le foie dit plus sur notre rapport au poison que la sorciĂšre de Blanche-neige.

    • C’est la dose qui fait le poison: attribuĂ© à  Paracelse, mais certainement connue des humains depuis bien plus longtemps, cette vĂ©ritĂ© toute simple est trĂšs importante. Poison ou antidote, ce n’est pas une question de nature, mais une question de quantitĂ©. Toute substance toxique l’est en raison bien sĂ»r de sa composition (qui créé des interactions plus ou moins importantes avec l’organisme qui l’ingĂšre ou est mis en contact), mais aussi et surtout par sa quantitĂ©. Tout produit toxique, ingĂ©rĂ© en quantitĂ© infĂ©rieur à  certains seuils, n’est pas toxique. Une grande quantitĂ© de produits, dosĂ©s correctement, sont des antidotes, et peuvent devenir en quantitĂ© plus importantes, de vĂ©ritables poisons. Il suffit de penser aux mĂ©dicaments pour s’en convaincre. Jean de KervasdouĂ©, dans son livre « Les prĂȘcheurs de l’Apocalypse » avait trĂšs bien expliquĂ© cela. Ce point est trĂšs impactant, prenez le temps d’y rĂ©flĂ©chir. Quelque chose qui est associĂ© dans notre esprit à  une qualitĂ©, et qui se trouve ĂȘtre principalement une question de quantitĂ©, cela force à  un peu de gymnastique mentale.
    • Un point apportĂ© à  notre connaissance par le philosophe Dominique Christian et qui rejoint cela : le mot grec pharmakos, dĂ©signait à  l’origine la victime expiatoire d’un rite sacrificiel, mais aussi… le poison… et l’antidote !

    Vertus

    Compte-tenu des quelques vĂ©ritĂ©s sur les poisons et antidotes, j’ai trouvĂ© utile d’aller chercher deux Ă©lĂ©ments chez les grecs :

    • puisqu’il est question de dosage et de mesure, cela permet de faire appel trĂšs directement à  deux des quatre vertus cardinales : la prudence et la tempĂ©rance. Je vous en donne ici la dĂ©finition, et l’on peut voir à  quel point l’histoire du bon dosage des poisons et antidotes peut ĂȘtre facilitĂ©e par ces vertus.

      La prudence est la sagesse qui dispose la raison pratique à  discerner, en toutes circonstances, le vĂ©ritable bien et à  choisir les justes moyens de l’accomplir.

      La tempĂ©rance assure la maĂźtrise de la volontĂ© sur les instincts et maintient les dĂ©sirs dans les limites de l’honnĂȘtetĂ©, procurant ainsi l’Ă©quilibre dans l’usage des biens.

    • Puisque l’organisme contient lui-mĂȘme des sources de poisons, et d’antidotes, la question devient assez proche, dans l’idĂ©e, du traitement du mal dans le rĂ©cit mythologique du combat entre Typhon et Zeus (dĂ©jà  Ă©voquĂ© ici). Le mythe de la crĂ©ation du cosmos, fascinant, se conclut par un formidable combat entre Zeus (qui veut installer l’ordre, et la justice) et Typhon (qui est le symbole du dĂ©sordre, du chaos et de la violence, mais aussi du temps, de la gĂ©nĂ©ration). La fin est magnifique : Zeus triomphe de l’horrible Typhon, mais Gaia — la premiĂšre dĂ©esse, et mĂšre de ce dernier — insiste pour que Typhon ne soit pas tuĂ©, mais enfermĂ© sous Terre. Parce que si l’harmonie triomphait, le cosmos sans le temps, le chaos, le dĂ©sĂ©quilibre ne serait rapidement plus rien d’autre qu’un univers immobile, figĂ©, sans mouvement. Il en est de mĂȘme pour des organisations qui voudraient se dĂ©barrasser complĂštement des poisons. Il s’agit bien plutĂŽt de prĂ©voir les bons organes de rĂ©gulations.

    Poisons et antidotes

    Voici pour finir une liste – non exhaustive, c’est Ă©vident – de quelques poisons & antidotes. J’essaye de les dĂ©crire en restant dans ce que nous a apportĂ© la toxicologie, c’est-à -dire en prenant en compte le fait qu’il est plus question de bon dosage, que d’une opposition entre des choses qui seraient des poisons par nature, et d’autres des antidotes.

    Culte du héros & storytelling

    Le mythe du hĂ©ros salvateur est certainement un poison. Il fait oublier un peu vite que le nombre de projets innovants ayant rĂ©ussis portĂ©s par une seule personne est probablement … nul ! Un projet, une innovation, c’est toujours des collaborations, des Ă©changes, des compĂ©tences variĂ©es. Alors, question de mesure : Steve Jobs ou Musk sont rĂ©ellement des gens admirables, mais il n’y a aucune raison pour les idĂ©aliser. Il est plus utile de les comprendre, et de voir de quelle maniĂšre ils servent leurs projets en les incarnant et en les personnifiant. Il faut bien raconter des histoires pour embarquer les autres. Steve Jobs Ă©tait un formidable raconteur.

    Idéologie & utopie

    L’idĂ©ologie et l’utopie sont utiles pour modĂ©liser les choses, mais elles peuvent ĂȘtre de vĂ©ritables poisons si elle empĂȘchent de voir, et de se confronter au rĂ©el. Je suis parfois sidĂ©rĂ© par le nombre de gens qui baignent en plein idĂ©ologie, et sont capables de penser complĂštement hors du rĂ©el, quitte à  nier certaines rĂ©alitĂ©. Voir le rĂ©el, premier antidote à  la connerie idĂ©ologique.

    Soumission au politique

    C’est presque la suite logique du point prĂ©cĂ©dent, tant le monde politique nage en pleine idĂ©ologie. Il convient, pour toute personne qui tient l’activitĂ© humaine collective pour quelque chose de noble, de se mĂ©fier de l’agenda et des prioritĂ©s des politiciens. Un exemple, celui de l’image : la main-mise du monde politique sur l’Ă©mission de monnaie, et sur la dette de nos sociĂ©tĂ©s, sont de vĂ©ritables scandales. Il y a probablement une vĂ©ritable bulle de projets qui ont trouvĂ© un financement uniquement par l’afflux massif de liquiditĂ©s. L’antidote consiste à  continuer à  se concentrer sur des projets avec des vrais clients.

    Sinistrose & apocalypse

    J’aime beaucoup la science-fiction, mais il faut reconnaĂźtre qu’elle est la plupart du temps trĂšs dystopique. Et elle alimente de ce fait un imaginaire trĂšs sinistre, pessimiste, de fin du monde. D’apocalypse. L’antidote consiste, envers et contre tous, à  regarder le rĂ©el, et à  assumer que celui-ci envoie aussi des messages qui permettent d’espĂ©rer que le progrĂšs reste possible. Attention : ce type d’attitude est mal vu, tant il est aisĂ© et bien vu d’ĂȘtre un prĂȘcheur d’apocalypse.

    Ennui & désengagement

    A force de naviguer en pleine idĂ©ologie, et en alimentant tout cela avec de la dystopie, il est logique que le poison de l’ennui et du dĂ©sengagement finisse par s’imposer. Je ne connais que deux antidotes radicaux à  cela : la science et la philosophie. L’une et l’autre parlent du rĂ©el, utilisent le doute, et favorisent un Ă©tonnement salvateur. L’image que j’ai choisi illustre un des derniers sujets que je suis allĂ© dĂ©couvrir en physique : la dĂ©couverte du Boson de Higgs grĂące au LHC (accĂ©lĂ©rateur gĂ©ant de particules). C’est une si formidable aventure humaine, de dĂ©couverte, d’expĂ©riences et de thĂ©ories, qu’il me parait impossible de prendre connaissance de cela sans en sortir convaincu de deux choses : les humains sont capables de choses formidables, et la nature est incroyable de complexitĂ© et de mystĂšre. Sources d’Ă©merveillement.