Étiquette : Raison

  • Eloge de l’acceptation

    Accepter : voilà  un mot qui est souvent accompagné d’une image négative, parce qu’on le confond avec la résignation, ou la tolérance. Les sens sont pourtant différents : tolérer, c’est laisser faire des choses que l’on a le pouvoir d’empêcher ; et se résigner, c’est considérer que l’on aucun moyen d’action. Accepter, au contraire, c’est simplement prendre le monde tel qu’il est. Quel autre choix avons-nous ? Refuser le monde tel qu’il est, c’est ouvrir la porte à  tous les délires, à  tous les idéaux plus ou moins foireux. Ceux qui ne raisonnent que sur le monde tel qu’il devrait être (à  leur yeux, forcément) prennent deux risques majeurs : oublier le point de départ de l’action (qui est le monde tel qu’il est), et se retrouver seul (le monde rêvé n’est pas unique).
    Accepter, ce n’est donc ni se résigner, ni tout tolérer. C’est juste considérer les choses telles qu’elles sont, et c’est le seul préalable connu à  l’action. La démarche scientifique en est la preuve. Quel action est possible, si ce n’est à  partir du réel ?
    Le monde est rempli de choses qui nous heurtent, nous choquent, et qui peuvent paraitre inacceptables. Il faut bien pourtant accepter l’exitence du mal, de la souffrance pour pouvoir se battre contre. Comment pourrait-on se battre contre quelque chose qui n’existe pas ? Ce n’est pas en niant la souffrance qu’on la diminue : c’est d’abord en l’acceptant (en acceptant son existence), puis en cherchant des moyens concrets de la diminuer. Ce n’est pas parce que quelque chose est difficile qu’il faut l’éviter. Au contraire.
    Il faut accepter le monde. Et le fait que beaucoup de choses soient dures à  accepter dit bien qu’il s’agit d’un effort, d’un travail. Je ne suis pas sûr qu’on puisse tout accepter ; mais nous devons faire autant que possible cet effort indispensable. C’est le seul chemin. Ceux qui le refusent prennent un autre chemin, dangereux, qui commence dans la conviction et finit dans le fanatisme, ou la maladie mentale. Le monde est notre seul lieu commun, il nous relie les uns aux autres parce que nous le partageons. Son équivalent abstrait n’est pas l’idéal, mais la raison.
    Accepter, c’est donc le début de la sagesse. Il n’existe qu’un monde, et c’est celui dans lequel nous vivons. C’est à  partir de cette réalité qu’il faut construire, et pas à  côté. J’aurais même tendance à  penser que prise dans ce sens, l’acceptation, c’est la sagesse même.

  • Premier tour des législatives : logique et rassurant !

    La projection de sièges après le 2nd tour

    Les résultats sont tombés hier soir : conformes aux prévisions. La ruine du PS se confirme, la perte de vitesse du FN également, et toute l’intelligence stratégique de Bayrou porte ses fruits : il a réussi à  couler le centre en quelques années. Visiblement, la majorité UMP à  l’assemblée se confirme, et Sarkozy/Fillon devraient pouvoir mener leur politique avec un fort soutien de l’assemblée, donc des français (n’oublions pas que l’assemblée des députés représente le peuple français).
    Un mot sur le pitoyable PS : ils n’ont toujours pas compris leur défaite, et toujours pas réussis à  se remettre en question. On imagine qu’ils le feront après le deuxième tour, pensant que continuer sans changer leur permettra de sauver les meubles ! Calcul presque touchant dans sa naïveté, s’il n’était inquiétant sur le fond. Ils ne cessent de répeter qu’il faut une opposition forte (ce qui est vrai dans le principe) sans se rendre compte que pour avoir une opposition forte, il faut que les français votent pour elle, et donc qu’elle ait réussi à  les convaincre, ce qui n’est manifestement pas le cas aujoud’hui.
    La logique est respectée : ceux qui veulent vraiment changer les choses de manière pragmatique obtiennent le pouvoir à  l’assemblée.

  • O๠est la dictature ?

    J’aimerais que quelqu’un, avant les élections présidentielles, aie fait une photographie de tous les blogs, de tous les discours « anti-sarko » que l’on pouvait lire ou entendre (j’ai moi-même mis de côté un article de Marianne sur Sarkozy qui résume beaucoup de choses…). Et que nous puissions ressortir à  leurs auteurs – maintenant et/ou dans un an – le flot d’âneries que l’on a pu entendre, la montagne de paroles excessives, la somme de fantasmes déversés dans les médias. La désinformation – heureusement – n’a pas pris : les français ont compris que Sarkozy n’était pas l’espèce de dictateur en puissance que certains décrivaient, mais bien l’homme politique volontaire et pragmatique qu’il semblait être – et qu’il est. Alors, bien sûr, ses adversaires continuent de vouloir voir dans chacune de ses actions une menace, se coupant par là  du peu d’électeur qui leur restent…Le PS dénonçait hier la présidence « absolue » de N. Sarkozy, s’enfonçant encore un peu plus dans l’attitude stérile consistant à  critiquer l’adversaire plutôt qu’à  faire des propositions politiques alternatives et réalistes. Attitude stérile qui est un aveu plus qu’une posture, à  mon avis.
    Alors, bien sûr, nous jugerons de l’action de Sarkozy et de Fillon sur résultats ; mais on peut dès à  présent affirmer que les grands perdants de l’élection sont ceux qui pratiquent la caricature plus que la réflexion. Cette élection a été passionnée et raisonnable. C’est la force de la vérité que de pouvoir marier la passion des débats contradictoires à  l’émergence – fragile et indispensable – de la raison.

  • La vérité peut-elle se partager ?

    La vérité peut-elle se partager ?

    C’est une petite réflexion qui est venu suite à  certains commentaires sur un billet précédent. J’expliquais que je votais avec mon cerveau, pas avec une conviction ou des sentiments. Ce à  quoi Babas répondait ceci :

    Un dernier point, je ne vote pas avec mon cerveau mais avec mon impression. Je pars du principe que toutes les informations sont tronquées orientées manipulées par l’émetteur , le transmetteur et même le recepteur. A partir de là , je moyenne de façon totalement subjective.

    Nous avons rediscuté de ça entre frangins ce week-end, et Simon me disait qu’il pensait ça aussi. Personnellement je ne suis pas trop d’accord ; mais la discussion était intéressante. On en arrive assez rapidement à  la question du titre : « La vérité peut-elle se partager ? ». J’avais fait un petit article, il y a quelques temps, sur ma vision des rapports entre réalité et vérité. On y trouvait ces deux définitions :

    Réalité :
    ce qui existe indépendamment du sujet, ce qui n’est pas le produit de la pensée.

    Vérité :
    1. Scientifique : connaissance reconnue comme juste, comme conforme à  son objet et possédant à  ce titre une valeur absolue, ultime
    2. Philosophie : norme, principe de rectitude, de sagesse considéré(e) comme un idéal dans l’ordre de la pensée ou de l’action
    3. Logique : conformité de la pensée ou de son expression avec son objet

    Je concluais qu’il fallait essayer, autant que faire se peut, de rapprocher la réalité et notre vérité.
    Rappeler et souligner l’incapacité de l’être humain à  communiquer totalement, j’en suis bien d’accord : qui pourrait nier cela ?
    Mais dire que pour cette raison-là , on vote sur des impressions uniquement, je n’en suis pas d’accord. Bien sûr, la part de l’impression n’est pas nulle : tout le monde est influencé par la tête du candidat, sa manière de parler, et tout un tas de facteurs conscients ou inconscients liés au candidat, à  notre histoire personnelle, et à  la tonalité des médias qui transmettent ces informations. Mais on ne peut pas s’arrêter à  cette constation : ce n’est pas parce que quelque chose est important, que nous devons nous y arrêter et considérer que c’est le seul facteur. Les arguments rationnels, la réflexion que l’on peut mener sur le monde qui nous entoure, sur les rapports de force existants, sur le sens dans lequel les choses évoluent sont aussi une part importante du choix d’un bulletin de vote. II clair que nous sommes des animaux (qui pourrait le nier ?), avec notre part d’impulsion inconsciente, notre part d’impression (pour reprendre le mot de Babas). Mais nous sommes aussi doués de raison, et capables – dans une certaine mesure, peut-être très restreinte – d’intégrer des faits dans un raisonnement et nous extirper, ne serait-ce qu’un peu, des jugements a priori et du conditionnement médiatique, familial, sociétal. Non ?

    Mettre l’accent sur ce qui gêne la communication et la transmission d’idée, c’est oublier de le mettre sur ce qui permet la communication et la transmission d’idée : les faits, les arguments rationnels qui nous relient au travers de ce qu’on pourrait appeler la réalité. Il y autant de vérité que d’êtres humains, mais il n’y a qu’une réalité. Et c’est de cette réalité là  dont on parle, il me semble, lorsque l’on choisit un bulletin de vote pour le mettre dans l’urne. L’acte de voter est un acte réfléchi, et le contraire de la passion. La passion, en politique, ce sont les armes, les combats. La raison, en politique, c’est le vote et la réflexion ; l’acceptation de la raison des plus nombreux est un pas énorme vers moins de conflits et plus de débats rationnels. Qu’en pensez-vous ?

    La politique est le lieu de la pensée où l’on met en relation la réalité et des valeurs ; j’ai l’impression que, souvent, l’absence d’effort pour regarder la réalité « comme elle est » empêche de se rendre compte que sur les valeurs, nous sommes beaucoup plus proches les uns des autres que nous le pensons. C’est cela, ce que je voulais dire en expliquant que je votais avec ma raison : faisons ensemble un constat partagé sur la réalité des faits, et les différences de valeur ne seront, bien souvent, plus un problème mais une richesse.

    Il n’y a qu’une seule et même raison pour tous les hommes ; ils ne deviennent étrangers et impénétrables les uns aux autres que lorsqu’ils s’en écartent.
    Simone Weil

  • Alternative Libérale : des idées justes, mais mal défendues ?

    J’ai terminé la semaine dernière le Manifeste des Alter-libéraux. Il s’agit du programme pour les présidentielles et les législatives du parti Alternative Libérale. Les auteurs sont Edouard Fillias, Sabine Hérold , Aurélien Veron, Jean-Paul Oury et Ludovic Lassauce.
    Ce petit livre, facile à  lire, est une bouffée d’air frais pour la pensée sclérosée par l’uniformité du discours français gauchisant et adorateur de l’Etat providence. L’auteur principal (et malheureux candidat à  la candidature pour l’élection présidentielle) livre un discours cohérent, vif et jeune. Beaucoup de propositions de bon sens : j’ai trouvé cette lecture très agréable. L’originalité : le parti-pris est celui de la liberté individuelle à  tous les étages. Le livre est plus un éloge de la liberté dans tous les domaines, qu’un plaidoyer pour le libéralisme économique. Ce qui rend le discours plus recevable par l’opinion publique, et même temps lui enlève de sa portée politique. Ce qui se retrouve, à  mon avis, dans la prise de position pour soutenir Bayrou, alors même que les idées d’Alternative Libérale sont beaucoup plus proches de Nicolas Sarkozy. Ce choix restera à  mon avis une erreur politique historique pour ce mouvement.

    Le liberalisme doit devenir transversal

    Pour finir, je trouve que ce parti souffre du même défaut que les mouvements écologistes. Sa force est à  la fois sa faiblesse. L’écologie met la survie de la planète en priorité numéro un : c’est sa force (parce qu’effectivement tout dépend de cela : quelle société si la planète n’existe plus ?) et sa faiblesse (quelle politique pourrait se passer d’intégrer l’écologie dans ses actions : c’est le développement durable, et on voit que l’écologie est fondamentalement quelque chose de transversal). De même, le libéralisme met la défense des libertés individuelles en priorité numéro un : c’est sa force (quelle société peut être souhaitable si ses membres ne sont pas libres?) et sa faiblesse (la liberté doit être un fondement pour toute démocratie, et par là -même elle est aussi transversale et ne peut pas être la propriété d’un parti, mais doit être une sorte de préalable à  tout discours politique). La vraie démarche aurait consisté à  faire ce que Nicolas Hulot a fait pour l’écologie : faire signer un « pacte libéral » à  tous les candidats. Encore aurait-il fallu pour cela que les médias soient aussi réceptifs au discours du libéralisme qu’à  celui de l’écologie. Le chemin est encore long…
    A lire donc, pour redonner aux idées politiques cette composante indispensable sur le plan philosophique – la liberté individuelle – , bien que vouée, à  mon sens, à  être intégrée pleinement par tous les partis raisonnables et amoureux de la liberté.

  • Citation #18

    Il n’y a qu’une seule et même raison pour tous les hommes ; ils ne deviennent étrangers et impénétrables les uns aux autres que lorsqu’ils s’en écartent. Simone Weil