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  • Hermès de vives voix

    Hermès de vives voix

    Luc Charbin signe ce beau livre, co-signe pourrait-on dire, car sa femme Alice Charbin l’a illustré, et à la manière des livres pour enfants, il n’y aucune page de texte sans illustration.
    Ce livre raconte, par le biais de très courts récits, une petite partie des histoires de l’entreprise Hermès : des anecdotes, des faits marquants ou sortant de l’ordinaire, quelques épopées rocambolesques, des bouts de parcours de vie tout entier dédiés à l’excellence et au savoir-faire d’un métier, des scènes drôles, des éclairages sur certains moments de l’histoire de la « maison ».
    J’ai trouvé ce livre très agréable à lire – je l’ai dévoré – et très fin : sous les brefs récits et les souvenirs, se dessinent en filigrane des vies marquées par le lien très puissant avec la maison Hermès, et par le goût de l’excellence. Une présentation légère, mais qui donne des accès à des histoires chargées en émotions, en souvenirs, en heures passées à la tâche. C’est une très élégante manière de raconter ces parcours.
    L’introduction, signée par la directrice du patrimoine d’Hermès (Menehould du Chatelle), apporte une information cruciale, et qui donne une profondeur et une perspective supplémentaire à ces jolis textes : ces récits ont été tirés du « trésor des archives orales d’Hermès » ! Hermès a en effet, depuis les années 1960, commencé une collecte des souvenirs de ses employés, constituant un patrimoine « d’archives orales » sans cesse enrichi. Je trouve cette idée si simple et belle, si puissante, si sensée, que je trouve tout à fait regrettable qu’elle ne soit pas plus répandue dans les autres entreprises. C’est en effet une remarquable manière de reconnaître le travail des femmes et des hommes, et de transmettre le fruit de travail. Ce livre en est la preuve.
    Merci au site Lolo le blog, où j’ai piqué l’image de la couverture.

  • La fin de la chrétienté

    La fin de la chrétienté

    Chantal Delsol a publié il y a quelques mois « La fin de la chrétienté ». Comment se constate la fin de la Chrétienté ? Quels en sont les ressorts moraux et philosophiques ? Quelles perspectives ? C’est à ces questions que Chantal Delsol répond dans ce court essai, stimulant, sobre mais érudit, qui force à prendre de la hauteur.

    Inversion normative

    Considérant les 16 siècles de la Chrétienté (du IVè siècle jusqu’à nos jours), l’auteur y soutient la thèse que nous sommes arrivé un moment d’inversion normative pour notre civilisation. Tout comme le christianisme a fait son essor en inversant certaines normes morales (passage du paganisme au christianisme), nous sommes en train de vivre une autre inversion morale. En partie parce que la religion chrétienne n’a plus l’envie de régner (c’est cela la fin de la Chrétienté : la fin de l’ère où les institutions politiques sont organisées autour, et appuyées sur, des valeurs morales chrétiennes et en lien avec les institutions religieuses), et en partie par le jeu de forces externes à la religion.
    Quelle est cette inversion normative que nous sommes en train de vivre et que Chantal Delsol voit comme le marqueur de la fin de la chrétienté ? Elle concerne les normes de conduites : les différentes « lois sociétales » montrent un univers moral où la liberté est devenue folle et considérant que tout ce que la technique peut, nous pouvons le faire au nom de libre détermination de chacun. Une sorte d’auto-nomie désincarnée, sans limites. Mais tout cela n’est que le fruit, et le signe, de « l’inversion ontologique » plus large et profonde que Delsol décrit : nous sortons du monothéisme pour aller vers une forme paganisme, polythéisme, ou cosmothéisme. Moïse avait fait passer son peuple du polythéisme au monothéisme, et nous vivons, depuis plus d’un siècle, une autre inversion qui nous fait sortir du monothéisme. On pourrait se demander s’il s’agit d’une « inversion », ou d’une « évolution » ? Comme le rappelait Larmore :

    Dieu est si grand qu’il n’a pas besoin d’exister. Cela est l’essence du processus de sécularisation qui a si profondément influencé la société moderne. Le reniement des idoles, le respect pour la transcendance de Dieu sont ce qui a conduit à relever Dieu de la fonction d’expliquer l’ordre de la nature et le cours de l’histoire. Expliquer quelque chose par l’action divine ou la Providence revient toujours à mettre Dieu parmi les causes finies que nous avons déjà découvertes ou que nous pouvons imaginer. Dès lors que nous nous résolvons à laisser Dieu être Dieu, nous ne pouvons plus utiliser Dieu à nos fins cognitives.

    Rapport contemporain à la Vérité

    Chantal Delsol décrit comment le régime de vérité n’est plus le même. En quittant la chrétienté, et l’exclusivisme judéo-chrétien du rapport à la vérité, le rapport religieux à la transcendance, nous n’abandonnons pas la vérité, nous sommes simplement dans un autre régime de vérité. La vérité « révélée » n’a plus de sens, mais la vérité a toujours un sens, qui vient en partie du paradigme scientifique : est vrai ce qui est correspond au réel. Elle ajoute à juste titre que nous avons maintenant un rapport syncrétique à la vérité, pluraliste, agnostique et plus humble :

    Autrement dit : ce qui peut nous permettre de renouer le lien entre l’histoire et la vérité, ce n’est ni la dogmatique du vrai (théories du Progrès ou des Droits de l’homme rigidifiés), ni l’oubli du vrai (mythes postmodernes), mais plutôt la clandestinité du vrai, qui fait de sa recherche une quête humble et spirituelle, jamais définitive.

    Honnêteté et sagesse

    Elle se présente comme catholique traditionaliste, mais sait prendre le point de vue d’autres qu’elle. Elle décrit bien, par exemple, en quoi les humains rejettent les « autres » mondes des religions :

    Sous le cosmothéisme, l’homme se sent chez lui dans le monde, qui représente la seule réalité et qui contient à la fois le sacré et le profane. Sous le monothéisme, l’homme se sent étranger dans ce monde immanent et aspire à l’autre monde – c’est bien par exemple ce que Nietzsche reprochait aux chrétiens. Pour le monothéisme, ce monde n’est qu’un séjour. Pour le cosmothéiste, il est une demeure. L’esprit postmoderne est fatigué de vivre dans un séjour ! Il lui faut une demeure bien à lui, entière dans ses significations. Il redevient cosmothéiste parce qu’il veut réintégrer ce monde comme citoyen à part entière, et non plus comme cet « étranger domicilié », ce chrétien décrit par l’anonyme de la Lettre à Diognète. Il veut à présent se trouver à son aise dans le monde immanent dont il fait partie intégrante, sans avoir besoin de rêver ou de tisser ou d’espérer un autre monde, qui le laisse séparé de lui-même. Il veut vivre dans un monde autosuffisant qui contienne son sens en lui-même – autrement dit : un monde enchanté, dont l’enchantement se trouve à l’intérieur et non dans un au-delà angoissant et hypothétique.

    Le terme cosmothéisme n’est pas tout à fait juste, car l’esprit de cette « anthropologie moniste » n’est ni une négation de la transcendance, ni un refuge dans une ridicule divinisation de la nature. C’est, à nouveau, une approche, qui est la mienne, qui sait se contenter du chemin vers la vérité sans vouloir sauter des étapes et prétendre connaître ce qu’on ne connait pas. Le seul « monisme » là-dedans, c’est une affirmation qu’il n’existe qu’une réalité, et que l’on peut en avoir une approche pluraliste sans devenir superstitieux. La complexité du réel est suffisamment incroyable pour nous éviter d’avoir besoin de saupoudrer notre rapport au monde de croyances absurdes.
    Il me semble qu’elle met le doigt sur un élément essentiel aussi en montrant que nos contemporains rejettent également l’esprit de conquête.

    Mais surtout : loin de vouloir conquérir le monde, dorénavant, comme les juifs, nous allons nous préoccuper de vivre et survivre – et ce sera déjà bien assez. Fouillez partout, et vous ne trouverez plus nulle part de rêve de mission et de conquête – et même si parfois ils existent dans le secret de certains coeurs, ils n’osent pas se dire. Au fond, beaucoup de chrétiens sont soulagés de voir s’éteindre la Chrétienté avec tout ce qu’elle supposait de force et d’hypocrisie. Nous sommes tous, chrétiens ou non, les enfants de cette époque : préférant la douceur à la domination, l’imperfection assumée à la fanfaronnade.

    Chantal Delsol est d’une grande sagesse, car elle montre le réel, et ce qui arrive, sans le regarder ni avec crainte ni avec nostalgie, mais en souligant ce que cela rend possible, d’un point de vue spirituel. Elle pose dans ce magistral essai le début de la réflexion sur le christianisme sans la chrétienté.
    Vous pouvez aller l’écouter sur l’excellente chaîne TV libertés : Chantal Delsol interviewée.

  • Citation #155

    La plus constante marque de la sagesse, c’est une constante réjouissance.

    Michel Eyquem de Montaigne (1533-1592) philosophe français, humaniste et moraliste de la Renaissance

    Que ce soit dans le sens général (« Connaissance du vrai et du bien, fondée sur la raison et sur l’expérience. »), ou pour décrire le comportement associé (raisonnable, prudent, vertueux), il est clair que la sagesse est quelque chose de souhaitable.
    Montaigne ne nous dit pas, dans cette citation, comment l’atteindre, ou ce qu’elle est (il a écrit ses fameux Essais pour le dire) : il nous explique ce qui permet de la détecter chez quelqu’un, ce qui en marque la présence.
    Celui qui est capable de se réjouir, est probablement sage. C’est une pensée toute stoïcienne : la sagesse, selon Montaigne, qui s’appuie sur les penseurs grecs, est la capacité à faire avec le monde tel qu’il est, et à s’en réjouir. De quoi pourrions-nous donc nous réjouir, si ce n’est de ce qui est ? C’est une philosophie, et une éthique, où le réel est central, et qui fait la part belle à philia (l’amour de ce qu’on l’on a), et qui – probablement – sous-estime la part d’eros (l’amour de ce qu’on n’a pas).
    Car bien sûr, nous ne nous contentons pas, individuellement, collectivement, du monde tel qu’il est. Il y a trop d’injustices et de malheur pour cela. Notre éthique moderne est tendue par un devoir d’amélioration des choses. Mais notre effort pour améliorer le monde ne devrait pas nous empêcher de nous réjouir. Il n’existe qu’une réalité, alors autant s’en réjouir. Une deuxième, pour la route ?

    Le sage ne rencontre pas de difficultés. Car il vit dans la conscience des difficultés. Et donc n’en souffre pas.

    Lao Tseu (milieu VIe siècle avant J.C.) sage chinois, considéré a posteriori comme le père fondateur du taoïsme. Son existence n’est pas tout à  fait avérée…

  • Citation #154

    Les Hommes n’étant pas dotés des mêmes capacités, s’ils sont libres, ils ne seront pas égaux, s’ils sont égaux, c’est qu’ils ne sont pas libres.

    Alexandre Soljenitsyne (1918 – 2008) écrivain russe et dissident du régime soviétique

  • L’empire du moindre mal

    L’empire du moindre mal

    J’ai lu « L’empire du moindre mal » de Jean-Claude Michéa, parce que des amis à moi, tendance « catho-conservateurs », me l’avaient conseillé. Ils y ont trouvé une critique juste et pertinente du libéralisme. En tant que libéral, il me paraissait utile de prendre connaissance de cette pensée ; en tant qu’ami, il me paraissait indispensable de mieux comprendre les arguments avancés dans les discussions.

    Brillant et structuré

    Il faut préciser tout d’abord que cet ouvrage est brillant, dans son style – érudit, clair, documenté – et dans son ambition : s’attaquer au « libéralisme », c’est tout de même ambitieux, parce que le corpus philosophique associé est assez robuste, et ancré dans un certain nombre d’institutions, de règles, et même dans notre morale. Michéa, contrairement à d’autres détracteurs du libéralisme, présente par ailleurs, saluons son honnêteté sur ce point-là, des arguments des libéraux eux-mêmes (qu’il semble avoir lu) : Bastiat, Smith, et quelques autres.
    Et l’ouvrage est fort car il présente des arguments en cours chapitres, dont le détail de l’argumentation, des exemples, est renvoyé en annexe de chaque chapitre. Cela facilite la compréhension, et ménage deux niveaux de lecture. Le propos commence très bien avec une mise en perspective historique de l’essor du libéralisme comme un moyen de sortir des conflits et des guerres civiles en sortant d’une société « morale » (qui porte un contenu moral positif), et en entrant dans des sociétés libérales s’appuyant uniquement sur des mécanismes de régulation des actions humaines (en gros, le Droit et le Marché).

    oui, mais …

    Le problème, c’est que c’est le même argumentaire que celui de Comte-Sponville, réfuté par Pascal Salin (et par d’autres, par exemple le brillant Philippe Silberzahn) : le capitalisme n’est pas amoral, car il repose sur le respect d’un certain nombre de choses qui sont des affirmations morales fortes. Respect des droits individuels, respect de la parole donnée et des contrats, refus de l’arbitraire, etc. Il faut être très idéologue pour ne voir dans le libéralisme qu’une non-morale.
    De même, cette neutralité axiologique supposée des sociétés libérales est une simplification extrême de la réalité. Certes l’Occident a fait émerger les sociétés démocratiques et libérales sur la base d’une socle plus restreint de valeurs, mais ce socle n’est pas nul. Larmore y a consacré quelques très belles pages.

    C’est un acquis irrévocable du libéralisme politique que le sens de la vie est un sujet sur lequel on a une tendance naturelle et raisonnable, non pas à s’accorder, mais à différer et à s’opposer les unes aux autres. De là , l’effort libéral pour déterminer une morale universelle, mais forcément minimale, que l’on puisse partager aussi largement que possible en dépit de ses désaccords.

    Jean-Claude Michéa déplore l’absence de limites consubstantielle au libéralisme (position conservatrice que je partage) : comment peut-on caricaturer ainsi la pensée libérale ? On se demande s’il les a lu, au final. Il n’a visiblement lu ni Von Mises, ni Hayek qui sont les penseurs majeurs du libéralisme au XXème. C’est une critique justifiée du libéralisme, sous certaines de ses formes, mais le manque de nuance fait perdre de la force à son argument. Quand on commence par caricaturer, pour pouvoir mieux attaquer ensuite, c’est de la mauvaise rhétorique, du sophisme (l’Epouvantail pour être précis). C’est de bonne guerre mais peu rigoureux…
    Il me semble, enfin, que dans l’esprit de Michéa il y a une confusion entre progressisme et libéralisme : une simple considération du Modèle d’Arnold Kling11. Il s’agit d’un découpage en trois pôles : progressiste, conservateur et libéral. Chacun portant une part des idées et valeurs politiques suffit à le montrer. En fait, Michéa est un vrai conservateur, et il simplifie en mettant tous ses « adversaires » dans le même panier. Logique de conflit, pas de philosophie.

    Où sont les propositions ?

    Que met-il en avant ? Ses critiques de la société actuelles, même si je n’en partage pas les causes, sont justifiées. Mais quelles sont les pistes de solutions qu’il met en avant ? Aucune, au sens propre du terme. Et je pense que c’est en partie lié à son analyse incomplète des causes. Sa posture anarcho-conservatrice (oui ça existe) me semble un peu rigide, et j’aurais voulu qu’au moins il mette en avant les valeurs positives (païennes?) de son point de vue (pour reprendre la description de Berlin : « les valeurs essentielles [païennes ]sont le courage, l’énergie, la force d’âme devant l’adversité, la réussite dans les affaires publiques, l’ordre, la discipline, le bonheur, la force, la justice. ») et en tire les conséquences sociales. Un livre fort, donc, mais à mon sens, un peu trop à charge contre des adversaires pas tout à fait bien définis.

  • La désobéissance civile

    La désobéissance civile

    Henry David Thoreau (1817-1862) a écrit ce court et magistral essai, « La désobéissance civile », suite à son emprisonnement : il avait volontairement arrêté de payer son impôt pour protester contre les actions du gouvernement américain (esclavagisme et guerre avec le Mexique). Il faut aller lire sa biographie, car l’homme est original ; poète, naturaliste, paisible amoureux de la nature et prisant de hautes valeurs morales, son passage en prison n’est que la mise en pratique simple, lumineuse, de ce qu’il pense. Le gouvernement agit mal, contre la morale, il n’y a donc aucune raison de lui prêter allégeance. C’est simple comme bonjour, et, dans les faits, très courageux. A la lecture, on ne peut s’empêcher de penser au Discours de la servitude volontaire d’Etienne de la Boétie (qu’il va falloir que je relise, car le souvenir de cette lecture s’est effacé avec le temps).

    La résistance pacifique

    J’ai trouvé ce livre absolument fascinant, et facile à lire : Thoreau décrit simplement les raisons qui l’ont conduit à résister, et la manière dont il décrit tout cela, et sa vie, montrent que c’est une personnalité très paisible, calme, n’aspirant qu’à vivre dans son coin11. Il est connu pour son livre majeur Walden ou la vie dans les bois, décrivant sa vie dans une cabane isolé dans la nature, en bonne intelligence avec ses semblables, et en faisant le Bien. C’est tout le contraire du profil de rebelle ; c’est simplement quelqu’un de cohérent et solide, qui met en pratique sa pensée. Il est difficile également à la lecture, de ne pas faire le rapprochement avec les récentes péripéties liées à la gestion du Covid. Je me rappelle très bien que la question de la désobéissance s’était posée, de manière très concrète, au moment de la « vaccination » presque forcée. Je laisse le mot de la fin à l’auteur, pour vous donner envie de lire22. Le texte intégral est disponible sur Wikisource : La désobéissance civile cet incontournable de la pensée politique.

    Mais pour parler en homme pratique et en citoyen, au contraire de ceux qui se disent anarchistes, je ne demande pas d’emblée « point de gouvernement », mais d’emblée un meilleur gouvernement. Que chacun fasse connaître le genre de gouvernement qui commande son respect et ce sera le premier pas pour l’obtenir. Après tout, la raison pratique pour laquelle, le pouvoir une fois aux mains du peuple, on permet à une majorité de régner continûment sur une longue période ne tient pas tant aux chances qu’elle a d’être dans le vrai, ni à l’apparence de justice offerte à la minorité, qu’à la prééminence de sa force physique. Or un gouvernement, où la majorité règne dans tous les cas, ne peut être fondé sur la justice, même telle que les hommes l’entendent. Ne peut-il exister de gouvernement où ce ne seraient pas les majorités qui trancheraient du bien ou du mal, mais la conscience ? Où les majorités ne trancheraient que des questions justiciables de la règle d’opportunité ? Le citoyen doit-il jamais un instant abdiquer sa conscience au législateur ? À quoi bon la conscience individuelle alors ? Je crois que nous devrions être hommes d’abord et sujets ensuite. Il n’est pas souhaitable de cultiver le même respect pour la loi et pour le bien. La seule obligation qui m’incombe est de faire bien. On a dit assez justement qu’un groupement d’hommes n’a pas de conscience, mais un groupement d’hommes consciencieux devient un groupement doué de conscience. La loi n’a jamais rendu les hommes un brin plus justes, et par l’effet du respect qu’ils lui témoignent les gens les mieux intentionnés se font chaque jour les commis de l’injustice.