A la lecture, dans l’excellent magazine L’incorrect, de l’interview croisĂ©e de Marcel Gauchet et Pierre Manent, j’ai eu un sentiment contrastĂ©. Cet article pointe vers des liens Wikipedia : faites attention Ă la qualitĂ© des informations que vous pouvez y trouver, notamment celles ayant des rĂ©sonnances politiques.Bien sĂ»r, ces deux lĂ sont intelligents, lucides, et très habiles pour exprimer leur pensĂ©es. Mais j’ai eu aussi le sentiment d’un dĂ©calage entre leurs propos, et la manière dont je perçois la rĂ©alitĂ©. Comme si une sorte de voile politiquement correct couvrait leur discussion, dont ressort Ă mes yeux une forme d’euphĂ©misation de la situation, Ă force de la prĂ©senter de manière elliptique. J’ai donc eu envie, en rebond, de creuser la question du titre, car elle rĂ©sonne avec les dĂ©bats qui Ă©maillent la campagne prĂ©sidentielle aux US, oĂą – je trouve – les dĂ©bats sont d’un autre niveau, plus virulents, plus vrais (est-ce une consĂ©quence du 1er amendement ?). Elon Musk explique clairement en interview la fragilitĂ© de la dĂ©mocratie, et expose les mensonges Ă©hontĂ©s des mĂ©dias. JD Vance (interview extraordinaire), ou Vivek Ramaswami (celle-lĂ aussi), sont d’une grande clartĂ©, d’une grande prĂ©cision, mais Ă©galement d’une grande force dans leurs propos. Le monde politique français, en comparaison, parait bien terne, bien mou, et Ă vrai dire exaspĂ©rant de rĂ©pĂ©titions et de contorsions.
La voix du peuple ?
Chacun le sait, DĂ©mocratie signifie Ă©tymologiquement le « pouvoir du peuple », et notre constitution le redit autrement en prĂ©cisant le principe de la RĂ©publique : « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». RĂ©pondre Ă la question « Sommes nous encore ou toujours en dĂ©mocratie ? » consiste donc Ă se demander si notre organisation sociale, nos institutions, sont toujours rĂ©ellement au service du peuple, des citoyens, et si ce que pensent majoritairement les citoyens est reprĂ©sentĂ© dans ces institutions, si leur voix porte et influe sur les Ă©volutions politiques. Mon avis, que je vais argumenter ci-dessous, est que nous ne sommes plus vraiment en dĂ©mocratie : les apparences sont lĂ , une partie des institutions est encore lĂ , le jeu se joue, Ă la manière d’une pièce de théâtre, mais cela a tout de ce qu’on peut observer dans l’excellent film The Truman Show. Sous les apparences, la rĂ©alitĂ© est que le dĂ©mocratie est devenu un mot un peu creux, porteur d’idĂ©aux pour tous, mais incarnĂ© rĂ©ellement nulle part.
Etat et gouvernement
Dans un remarquable essai (disponible gratuitement en ligne), Milton Friedman avait expliquĂ© en 1993 pourquoi c’Ă©tait le Gouvernement et l’Etat bureaucrate les source du problème. En prenant des exemples concrets dans tous les secteurs d’activitĂ©, il dĂ©montrait qu’Ă peu près tout ce que prenait en main le gouvernement Ă©tait dĂ©sastreux. Trop de dĂ©penses, bureaucratisation, inefficacitĂ© endĂ©mique, perte du sens de l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral. Vous pouvez prendre n’importe quel champ d’action du gouvernement et de l’Etat, leur action est catastrophique et ne sert les intĂ©rĂŞts que de la caste au pouvoir. Les « serviteurs de l’Etat » sont bien nommĂ©s : ils ne servent plus l’intĂ©rĂŞt du peuple, mais bien celui de la bureaucratie, toujours plus occupĂ©e de tout, de tout règlementer, de taxer. Pour le dire plus crĂ»ment, et justement avec moins de pincettes que Gauchet et Manent : une clique de parasites se gave sur le dos du pays, en faisant mine de se prĂ©occuper du sort du peuple. Friedman expliquait que les actions du gouvernement devraient ĂŞtre limitĂ©es Ă 4 sujets : dĂ©fense nationale (protection contre les pays ennemis), sĂ©curitĂ© intĂ©rieure (protection des citoyens contre les atteintes des autres citoyens), lĂ©gislation (dĂ©finir les règles avec lesquelles on s’organise), judiciaire (arbitrer les disputes autour du respect des ces règles). Le reste n’a rien Ă faire dans les mains de l’Etat. Je suis d’accord avec cela. Et voilĂ ce que l’on peut dire de manière très factuelle, sur ces 4 points.
- Les gouvernements ont systĂ©matiquement diminuĂ©s l’argent injectĂ© dans l’armĂ©e. Il reste un corps probablement encore très digne de sa fonction, mais complètement dĂ©nuĂ© de moyens, et l’on a en plus consciencieusement laissĂ© partir des savoir-faire de dĂ©fense Ă l’Ă©tranger
- la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure est totalement en berne. Sous l’effet d’une immigration incontrĂ´lĂ©e, de civilisations diffĂ©rentes, toutes les conditions de la guerre civile continuent d’ĂŞtre mises en place. Taper sur les gilets jaunes, ça oui, mais expulser les Ă©tranger en situation irrĂ©gulière, les criminels, ça non.
- Le fonctionnement du système lĂ©gislatif est une catastrophe : les rĂ©glementations s’empilent, dans tous les secteurs et rendent quasiment impossible le fonctionnement normal de la sociĂ©tĂ©. Comme par ailleurs, des lois fondamentales ne sont pas appliquĂ©es, on marche sur la tĂŞte. Mesurer la taille de la barrière qu’un particulier a installĂ© chez lui, ça oui, mais punir de prison les multiples dĂ©lits et mĂ©faits des racailles, ça non.
- Que dire de la justice ? PolitisĂ©e, remplie d’idĂ©ologues, n’appliquant plus la Loi, tant de multiples amĂ©nagements sont prĂ©vus Ă tous les niveaux, on a l’impression d’une mascarade glaçante et inquiĂ©tante.
Ajoutons deux points Ă cela, tout d’abord, nous avons placĂ© une part de notre souverainetĂ© dans les mains de l’UE, c’est-Ă -dire que nous l’avons en partie perdue. La souverainetĂ© ne se partage pas. Ensuite, l’Etat s’occupe maintenant de tellement d’autres sujets qu’il fait tout mal, intervient partout, souvent pour des raisons totalement injustifiĂ©es. Les « bidules », les ministères ridicules se multiplient, et personne n’y trouve rien Ă redire.
Donnez moi tort
Je ne demande rien de plus qu’Ă revoir mon jugement, et Ă me laisser convaincre que si, nous sommes encore en dĂ©mocratie. Mais le referendum de Maastrich, suivi du traitĂ© de Lisbonne pour refaire passer en force ce que le peuple avait rejetĂ©, ou les rĂ©centes Ă©lections lĂ©gislatives, oĂą nous avons du accepter de nous faire, une nouvelle fois, expliquer que plus de 10 millions de français ne pouvait pas participer Ă la « dĂ©mocratie » montrent bien, en plus de tout le reste, Ă quel point le bateau est pourrie de part en part. Il faut revenir aux fonctions rĂ©galiennes listĂ©es ci-dessus, virer des fonctionnaires, arrĂŞter de distribuer de l’argent au monde entier, mettre fin Ă toutes les fraudes et Ă tous les crimes, privatiser des pans entier de l’action de l’Etat, stopper brutalement l’immigration et reposer ensuite le sujet de l’assimilation et de la remigration, reposer une doctrine lĂ©gislative et judiciaire saine, non politisĂ©e, faire appliquer la Loi de manière intraitable, supprimer la plupart des règlementations dĂ©biles qui bloquent la libertĂ© d’agir, d’entreprendre et de faire prospĂ©rer le pays, couper toutes les formes de subventions aux mĂ©dias et aux associations (tous), refaire de la libertĂ© d’expression un principe fort, faire cesser la gabegie gĂ©nĂ©ralisĂ©e, dĂ©noncer le socialisme pour ce qu’il est (du vol auquel on donne le nom de justice social), assumer notre histoire et notre culture. Une fois ce programme enclenchĂ© et mis en Ĺ“uvre nous pourrons peut-ĂŞtre nous dire que nous redevenons une dĂ©mocratie. En attendant cela, il parait très clair que nous sommes dans une forme d’oligarchie de fait.
La rĂ©ponse Ă la question du titre est donc clairement non. J’attends des contre-arguments, je serai heureux de les lire, et de les faire miens. VoilĂ ce que j’aurais voulu lire dans l’interview, au lieu d’une ridicule dĂ©fense de principe de l’Arcom par Gauchet, ou la mention par Manent que nos « élites » sont « compĂ©tentes », mais dĂ©connectĂ©es. Non, ils ne sont pas compĂ©tents, et s’ils le sont, ce sont alors d’horribles menteurs et de vils traitres, et ils ne sont pas dĂ©connectĂ©s : ils nous volent et tuent le pays Ă petit feu depuis trop longtemps. Il est temps de se dire les choses.