Catégorie : 🧑🏻‍🤝‍🧑🏻 Société

  • Vous avez dit conservateur ?

    Vous avez dit conservateur ?

    Je trouve enfin le temps de faire la recension de l’excellent livre de Laetitia Strauch-Bonart, « Vous avez dit conservateur ?« . J’avais eu la grande chance de l’écouter présenter son livre lors d’un apéro de l’Avant-Garde. Je l’avais trouvée passionnante, sincère. Et comme elle avait cité dans son discours mon livre politique préféré (« Droit, Législation et liberté »), je ne pouvais qu’être conquis.

    3 idées clés du livre

    Si l’on devait se risquer à  résumer ce livre en quelques phrases, il faudrait insister sur trois idées clés :

    • la pensée conservatrice a ses auteurs, et est d’une manière générale une pensée de la transmission, de la stabilité dans l’évolution
    • les conservateurs ne sont pas opposés au changement ; ils veulent simplement inverser la charge de la preuve. A ceux qui veulent modifier la société d’expliquer, quand c’est nécessaire, pourquoi il faudrait le faire, plutôt que de laisser en place les structures que la tradition humaine a fait émerger ? Le conservatisme, ce n’est pas un rejet du progrès, c’est un refus du progrès pour le progrès, et une manière de questionner les « constructivistes ». Conservatisme et progressisme sont donc, à  mes yeux, les deux faces indispensables d’une même chose qui est la pensée du changement. Qu’est-ce qui reste constant dans le changement, et qu’est-ce qui change ?
    • le conservatisme est un contrepoint indispensable pour penser le libéralisme ; c’est pourquoi à  l’époque où j’oeuvrais sur des blogs politiques, j’avais à  coeur avec d’autres, de faire émerger un courant libéral-conservateur. Le conservatisme, adossé à  une culture, à  une identité, permet d’ancrer la pensée libérale, souvent abstraite et générale.

    Vous avez dit conservateur ?

    Je vous recommande ce livre très facile à  lire, très direct, et qui pose beaucoup de bonnes questions. Laetitia Strauch-Bonart a eu l’intelligence de convoquer des auteurs et intellectuels français pour échanger et construire sa réflexion (le conservatisme est plutôt naturellement présent dans les pays anglo-saxons). Nous avons donc le plaisir de découvrir ou de redécouvrir des personnes comme Rémi Brague, Alain-Gérard Slama, Philippe Bénéton, Chantal Delsol, Jean-Pierre Le Goff, Jean Clair, Alain Bensançon, Marcel Gauchet, Alain Finkielkraut, Paul Thibaud, Philippe Reynaud (j’en oublie certainement). Tous ne se disent pas conservateurs, mais pour ceux-là  le mot « conservateur », et les idées conservatrices, méritent un détour et apportent à  notre réflexion.
    Pour terminer, une remarque qui devrait vous conduire à  découvrir ce livre : il est surprenant que le mot de « conservatisme » soit devenu en France une forme d’insulte. Le conservateur se réduit dans notre esprit le plus souvent, à  sa caricature la plus grotesque : une sorte de réactionnaire qui s’oppose farouchement au Progrès (presque déifié et confondu avec la nouveauté) pour des raisons de pouvoir, ou de crispation. Qu’une pensée aussi riche, et actuelle, soit caricaturée à  ce point en dit long sur l’ambiance intellectuelle qui caractérise notre début de siècle. Elevons le débat, lisons Strauch-Bonart !

  • A l’épreuve du réel

    A l’épreuve du réel

    Points communs entre Sansal et Rioufol ?

    Quels sont les points communs entre Ivan Rioufol et Boualem Sansal ? Il y en a plusieurs :

    • l’un et l’autre viennent de publier un livre, « La guerre civile qui vient » pour le premier, et « 2084 » pour le second
    • ces deux livres sont excellents, bien écrits, et portent des valeurs humanistes et démocrates
    • l’un comme l’autre parlent du même sujet : l’islam, mais en l’abordant par deux aspects très différents. Rioufol propose un essai politique, qui va droit au but, et qui montre – à  mon sens avec des très bons arguments – pourquoi les tergiversations d’un Pierre Manent sont dangereuses. Notre société doit résister à  des formes d’organisations qui remettent en question ses valeurs de tolérance, de liberté et d’égalité des personnes. Sansal, romancier, propose un récit qui permet de toucher du doigt la manière dont la vérité disparait dans un univers totalitaire, et avec elle une partie de ce qui fonde les rapports humains tels que nous les connaissons. Comme dans « 1984 », auquel il fait de nombreux clins d’oeils, nous découvrons un pouvoir totalitaire qui pour se maintenir est prêt à  tout ; violences, bien sûr, mais aussi conditionnement, exactions, distorsions du réel, inégalité totale des citoyens.

    Ce réel que les idéologies déforment

    Ce réel que l’un comme l’autre décrivent, l’un dans un futur lointain, et l’autre dans le présent, c’est la manière subtile avec laquelle les idéologies – l’islam en est une – peuvent se jouer de la réalité, des faits, et influencent peu à  peu les discours, et finalement la pensée.
    Il me semble que ces deux livres, que je relie artificiellement dans ce billet, méritent d’être lus. De manière urgente, et insoumise. Si vous les avez lus, ou si vous comptez le faire, ou si vous ne comptez pas le faire, laissez donc un commentaire ! C’est très exactement ce que les totalitaires et les idéologues ne supportent pas : l’échange, la discussion, la controverse, le débat d’idées critique et pluraliste.

  • Situation de la France

    Situation de la France

    Grâce au commentaire d’un de mes lecteurs (Quentin, pour ne pas le nommer), j’ai découvert et dévoré l’excellent bouquin de Pierre Manent, « Situation de la France« . L’auteur y revient sur les problèmes d’identité qui peuvent se poser aux français, en 2016. Des problèmes qui tournent bien sûr, comme toujours lorsque l’on parle d’identité et de culture (ou de civilisation), autour de la question religieuse, et du fait religieux.

    Situation de la France

    C’est un livre fort, dense, que nous livre Pierre Manent, et qui présente beaucoup de points vraiment positifs et stimulants.

    • en quelques cent pages, il dresse un constat sans appel d’un certain nombre de problème posés par l’islam dans une société chrétienne, en termes de chocs de valeurs. Pas de chichis, pas de politiquement correct pour se protéger de – fort prévisibles – attaques de la bien-pensance. C’est clair, à  la fois respectueux des personnes, et sans concession pour les idées.
    • Pierre Manent amène des idées fortes, et des questions clés à  cette question épineuse. Il constate par exemple que la laïcité, sous la forme qu’on lui connait, c’est-à -dire sous une forme ayant consisté à  vider l’espace public du « fait religieux », n’est pas efficace pour « réformer » l’islam. Force est de lui donner raison, même si pour ma part, je mettrais un bémol. Il me semble qu’une conception stricte de la laïcité, libérale, vise simplement à  séparer le politique du religieux, et non pas à  cacher, ou à  empêcher l’expression religieuse dans l’espace public. Notre société, en partie d’ailleurs, sous les provocations de radicaux, a eu tendance récemment à  vouloir lutter contre cette radicalisation par une sorte d’oubli des signes religieux (ce qui se défend), mais aussi à  une forme d’effacement du religieux.
    • Cet effacement du fait religieux a conduit à  nier longtemps le problème posé par l’islam. Ce n’est pas que nous ne voulions pas, collectivement, voir les problèmes posées par l’idéologie islamique, c’est simplement que nous ne voyions pas cela comme une religion, c’est-à -dire à  la fois comme élément identitaire fort, et comme corpus idéologique structuré
    • Il propose des éléments intéressants également sur nos racines et notre culture : assumons donc d’être une culture chrétienne, qui accueille un certain nombre de cultures différentes, mais qui pour autant n’en demeure pas moins chrétienne. assumons que notre histoire, et nos valeurs peuvent nous permettre d’assumer que la Nation joue un rôle intégrateur, en tant qu’idéal, à  la fois structurant et inclusif.
    • Les pistes proposées par Pierre Manent sont vigoureuses, et « simples » : l’Etat et la Nation doivent « forcer » (« commander » est le terme qu’il utilise) les responsables musulmans à  couper les ponts avec toutes les sources de financement extérieures. Par ailleurs, la communauté musulmane et le reste du pays doivent faire une sorte de « pacte », une sorte de geste de bonne volonté, de main tendue de part et d’autre. Pour cela, un certain nombre de concessions doivent être faites, de part et d’autres, et un certain nombre d’éléments fondamentaux, non négociables, doivent être rappelés. Liberté de conscience, bien sûr. Et d’autres éléments fondateurs d’une société ouverte et libre. Cela me rappelle un de mes billets, parlant d’un Sanhédrin de l’Islam.

    Je ne saurais assez vous recommander la lecture de ce livre indispensable pour alimenter la réflexion politique, la vraie. Pas celle des courses de lévriers électorales, mais celle qui touche à  l’identité, à  ce que nous voulons construire, ensemble, comme société.

    Concessions, ou Egalité ?

    Deux points me posent problème dans le livre de Manent, et mériteraient d’être approfondis par des échanges (en commentaire?). D’une part, Pierre Manent semble prêt à  des concessions sur la place de la femme chez les musulmans, et cela me parait, à  moi, inacceptable. Et incompatible avec l’idée que je peux me faire d’un pays dont la devise comporte le mot ambitieux et exigeant d’ »Égalité ». Et d’autre part, après avoir constaté que la laïcité ne permet pas d’aider l’islam à  se réformer, Pierre Manent semble considérer que la Nation peut le faire. Cela soulève bien des questions, car il me semble que notre Nation, et notre culture française, comporte justement dans ses gènes une forme de laïcité (qui peut être un outil). De plus, après décrit l’Etat et ses institutions comme passablement affaiblis, ils semblent finalement capable de réaliser un tour de force exceptionnel, que seuls une volonté forte et une capacité d’action durable peuvent rendre possible.
    Un dernier point aveugle dans l’ouvrage (mais ce n’est pas une critique, c’est un appel) : si une telle évolution – souhaitable – était possible, elle ne pourrait se faire qu’en ayant au préalable ou en parallèle réduit fortement les flux migratoires entrants dans notre pays. Comment intégrer bien si l’on est trop ouvert ? Qu’en pensez-vous ? L’islam peut-il, en France, se réformer ? Nos institutions sont-elles suffisantes ? Quelles modalités de mise en France ? N’hésitez pas à  partager vos commentaires, idées et suggestions en commentaire !

  • Etes-vous indispensable ?

    Etes-vous indispensable ?

    Je voulais vous raconter l’histoire de ma reconversion dans ma boite. Et voilà  que Dominique me met dans les mains « Linchpin« , de Seth Godin. C’est un superbe livre, passionnant, riche, foisonnant, dérangeant parfois. Au final, il a changé ma manière de penser mon travail, même si cela n’a fait que me permettre de mettre des mots sur ce que je ressentais. Je repousse donc un peu le premier billet de la série, et vous conseille ce livre admirable. De quoi parle ce livre ? De la manière dont on peut se rendre indispensable au travail, s’épanouir, enrichir les autres, créer des connexions. C’est ce que Seth appelle faire son travail comme un art. L’art, c’est ce qui touche les autres et les fait changer. En donnant aux autres, en écrivant le plan plutôt qu’en suivant celui donné par les chefs. Un Linchpin, c’est un pivot, c’est celui qui créé du lien. C’est celui qui change les autres par son art (sa manière pleine de faire son travail). C’est chacun de nous : voilà  le propos de Seth Godin. Chacun peut devenir un « linchpin », et il suffit pour cela de vaincre la résistance, le cerveau reptilien (le « lézard »), qui veut tout sauf se retrouver dans l’inconfort, dans le risque, dans l’inattendu. Je ne saurais trop conseiller ce livre à  tous ceux qui veulent marier travail et passion. Cela ne dépend pas du travail, mais de nous. Il y a des « linchpin » parmi les garçons de café, parmi les ingénieurs, parmi les artistes, parmi les dirigeants. Partout. Pourquoi pas vous ?

  • Vérité partagée, ou solidarité volontaire ?

    En tenant un blog politique, on apprend à  découvrir une vérité simple : la discussion requiert des points de vue variés pour vivre et exister, tandis que l’action nécessite de plutôt se retrouver avec des gens qui pensent la même chose. Les deux situations extrêmes à  éviter sont bien sûr, pour la discussion, de laisser la porte ouverte à  tous les points de vue, ce qui conduit à  un pugilat très peu constructif, et pour l’action, de ne se regrouper qu’avec les gens qui pensent exactement la même chose, ce qui conduit au dogmatisme. Le rapport à  la vérité diffère, d’ailleurs, dans ces deux situations. Dans la discussion, la vérité se construit à  plusieurs, ou au moins nécessite de confronter son point de vue à  celui des autres pour le faire naître, pour lui donner forme. Même en cas de désaccord, la discussion permet de construire des raisonnements, de peaufiner des arguments, de faire ses armes rhétoriques. La vérité se partage, s’explicite. Dans l’action, la vérité est acquise – en partie au moins – et devient plus forte avec le nombre. La logique n’est pas de construire, mais de gagner en puissance, d’influencer. Les opposants et les contradicteurs se transforment en ennemis, même figurés. Mais, et c’est important, les partenaires dans l’action deviennent des amis, au sens où l’on fait ensemble. Finalement, je préfère – dans mon rapport à  la vérité – celui que permet la discussion et l’échange, et le désaccord. La vérité personnelle, mais partagée, et sans cesse confrontée à  l’avis des autres. Et je préfère – dans mon rapport aux autres – celui que permet l’action commune. L’intérêt commun bien compris, la solidarité volontaire. J’ai bien de la chance de pouvoir faire les deux – échanger, agir – avec les mêmes personnes.

  • Faut-il autoriser la construction de nouvelles mosquées ?

    Une association musulmane est entrée de force dans la mairie de Torcy, pour « négocier » avec le maire de la commune l’obtention d’un terrain pour construire une mosquée. Visiblement, il s’agit d’un peu plus qu’une mosquée, mais bon.
    C’est l’éternel débat : au nom de la liberté, doit-on permettre à  tous de pratiquer leur culte, ou doit-on différencier les religions entre elles et reconnaitre un caractère « sectaire » à  l’Islam ?
    Je n’ai pas de réponse définitive à  cette question. Mais, comme je l’avais déjà  exprimé ici, on ne peut pas comprendre la réalité, les rapports de forces à  l’oeuvre, si on ne connait pas cette réalité. Si on s’accroche à  des principes (justes et bons, je suis le premier à  en convenir), sans vouloir différencier ceux qui aspirent à  vivre dans une société ouverte et libre, et ceux qui veulent imposer des règles de vie incompatibles avec ces mêmes principes, on risque bien de scier la branche sur laquelle on est assis.
    Alors, pour ceux qui veulent savoir ce qu’est l’Islam, voilà  une liste fort utile (sinon, vous pouvez continuer à  lire ce blog):
    Se renseigner sur l’Islam :

    Et pour tous, un petit test vous permettant de donner votre avis :
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